L’intention de Tidjane Thiam d’être candidat à la présidentielle d’octobre 2025 en Côte d’Ivoire provoque un conflit au RHDP. Le ministre Serey Doh a publiquement denié sa nationalité ivoirienne à Augustin Thiam âné de Tidjane Thiam, président du PDCI-RDA. Alors que le leader de ce parti, le Président Alassane Ouattara, a été à la pointe de la lutte contre la xénophobie, ses proches tiennent aujourd’hui, de façon décomplexée, des discours xénophobes dans l’espoir d’écarter Tidjane Thiam de la présidentielle de 2025.
Au RHDP, la peur de Tidjane Thiam mène à une guerre de clans
La star actuelle de la politique ivoirienne est Tidjane Thiam, ancien patron de Crédit Suisse et président du principal parti d’opposition, le PDCI-RDA. Pas un jour ne passe sans qu’il fasse la une de l’actualité. Depuis son retour en politique en Côte d’Ivoire, le banquier inspire de la crainte au régime d’Alassane Ouattara, dont certains membres s’érigent en nouveaux chantres de la xénophobie.
L’histoire a de la mémoire. Il y a quelques années, à la sortie de feu Henri Konan Bédié du RHDP, certains spécialistes de l’actualité ivoirienne, affiliés au parti d’Alassane Ouattara, suppliaient Tidjane Thiam de revenir en politique en Côte d’Ivoire. À ce moment-là, ils préféraient le voir à la tête du parti fondateur de la Côte d’Ivoire plutôt qu’un Henri Konan Bédié déterminé à contrer le régime Ouattara.
Il faut croire que les cieux ont exaucé leurs vœux, puisqu’au décès de l’ancien président, c’est Tidjane Thiam, qu’ils suppliaient, qui a pris la tête du PDCI-RDA. Mieux, il est candidat déclaré à la prochaine élection présidentielle, et rien ne semble pouvoir l’arrêter dans l’atteinte de cet objectif.
Congrès du PDCI-RDA : première démonstration de force de Tidjane Thiam
La première adversité a été observée lors de la campagne de Tidjane Thiam pour la présidence du PDCI. Des individus membres du parti ont été instrumentalisés pour saisir la justice afin d’empêcher la prise du PDCI par Tidjane Thiam. Une décision de justice a même annulé la convention qui devait se tenir à l’Hôtel Ivoire.
Mais loin de céder à la panique, Tidjane Thiam a tenu un discours déterminé, appelant ses militants au calme et leur assurant que la convention se tiendrait bien dans les jours suivants et que leur choix serait respecté.
Après quelques manœuvres habiles de l’Ingénieur, la convention s’est tenue et son élection a été actée, malgré une seconde décision judiciaire censée l’interdire, mais qui est finalement restée lettre morte. Dès lors, les militants du PDCI-RDA et les observateurs de la vie politique ivoirienne ont compris que Tidjane Thiam, au-delà des apparences, avait plusieurs tours dans son sac.
Depuis cette démonstration de force, la peur de Tidjane Thiam s’est amplifiée chez ses détracteurs. Ces dernières semaines, de supposés consultants politiques, en réalité des affiliés du RHDP, ont mis en avant une prétendue inéligibilité du président du PDCI-RDA. Par la même occasion, ces intellectuels d’un autre genre tentent de lui tailler une réputation de menteur, alors qu’il joue carte sur table depuis son retour au pays.
Côte d’Ivoire : Quand plus aucune stratégie du RHDP ne fonctionne
« Mensonge » ? Ce mot lâché par ces mercenaires de l’analyse a choqué et retourné l’opinion ivoirienne contre son auteur, un certain Arthur Banga. Tidjane Thiam n’a jamais caché sa double nationalité française. Pour preuve, lorsqu’il s’est engagé dans la démarche de renonciation à sa nationalité d’adoption pour se conformer aux conditions imposées par la Constitution ivoirienne, il l’a fait publiquement.
Cela n’a pas empêché le sulfureux Arthur Banga d’attribuer à Tidjane Thiam des déclarations mensongères sur une renonciation déjà effectuée.
Puisqu’ils ont perdu du terrain sur ce sujet, les adversaires politiques de Tidjane Thiam se lancent sur un autre terrain : lui nier ses origines ivoiriennes. Sauf que sur ce point, un malaise accompagne les discours de certains membres du gouvernement. Pourquoi ? Parce que leur leader, le Président Alassane Dramane Ouattara, lui aussi Ivoirien, a des origines étrangères de par son père, bien que né à Dimbokro.
Le ministre Serey Doh, invisible dans l’action gouvernementale, s’est offert un peu de publicité en évoquant une supposée nationalité sénégalaise du père de Tidjane Thiam. « Il ne peut pas mentir en disant que son pays et le nôtre ont la même frontière », une allusion claire à Alassane Ouattara, dont l’origine ivoirienne avait, en son temps, été expliquée par certains cadres du RHDP en arguant que Sindou, le village de son père, était frontalier des villages ivoiriens.
Les deux problèmes de la déclaration de Serey Doh
Pourtant, plusieurs villages burkinabés (Léra, Loumana et Niankorodougou) séparent le village de Sindou de la frontière ivoirienne. Serey Doh affirme : « Thiam ne peut pas mentir en disant que lui et nous avons la même frontière. Il doit d’abord sauter un pays (la Guinée ou le Mali, ndlr) pour arriver en Côte d’Ivoire. »
Il poursuit dans sa rhétorique xénophobe en déclarant : « Son papa est sénégalais, sa maman est sénégalaise. Ce n’est pas parce qu’il a été adopté par Houphouët-Boigny qu’on va dire qu’il est notre frère. »
Même dans ce cas, on peut se demander : un enfant adopté n’est-il pas considéré comme le frère des enfants du couple adoptif ?
Cette déclaration pose plusieurs problèmes. Tout d’abord, M. Serey Doh affirme implicitement que son collègue, le ministre-gouverneur de Yamoussoukro, M. Augustin Thiam, frère de père et de mère de Tidjane Thiam, n’est pas Ivoirien. On imagine donc l’ambiance au sein du RHDP.
Le second problème est que la famille Thiam étant dans la même situation que le Président Alassane Ouattara, qui a des origines burkinabées, Serey Doh remet en cause l’origine de son propre chef d’État.
Cette déclaration n’a donné lieu à aucun communiqué officiel du RHDP pour clarifier la situation concernant la nationalité du ministre Augustin Thiam. Les journalistes proches du parti au pouvoir relaient sans analyse cette sortie scandaleuse de Serey Doh, qui risque en réalité de desservir le RHDP.
La peur de Tidjane Thiam provoque clairement un vent de panique au sein du RHDP, qui avance sans stratégie claire.