Le Togo envisage une adhésion à l’Alliance des États du Sahel (AES). Si cette ambition se concrétise, le pays quittera-t-il la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) comme l’ont fait le Mali, le Niger et le Burkina Faso ? Théodore Holo, ancien ministre béninois des Affaires étrangères et ex-président de la Cour constitutionnelle du Bénin, apporte son éclairage.
Théodore Holo explique pourquoi le Togo pourrait rejoindre l’AES
Dans un entretien accordé à VoxAfrica, le ministre togolais des Affaires étrangères a indiqué que son pays n’exclut pas la possibilité d’adhérer à l’AES. Selon Théodore Holo, cette annonce n’est pas surprenante. Il estime qu’il existe une convergence idéologique entre les trois pays membres de l’AES et le Togo, ce qui renforce leur proximité. Le Togo est d’ailleurs perçu comme un « pays ami » des États membres de l’AES.
Pour l’heure, le port de Lomé sert de solution de rechange pour le commerce avec le Niger, le port de Cotonou étant fermé. Théodore Holo observe que cette situation crée un intérêt économique, et même politique, pour le Togo à intégrer l’AES.
Une divergence politique au sein de la CEDEAO
Théodore Holo explique qu’au sein de la CEDEAO, une convergence politique axée sur la démocratie unit la plupart des pays anglophones et quelques pays francophones. Toutefois, il estime que le Togo, qui ne partage pas totalement cette dynamique, pourrait se sentir plus proche des pays de l’AES qui se revendiquent « souverainistes ».
Cela dit, l’ancien président de la Cour constitutionnelle du Bénin pense qu’une adhésion du Togo à l’AES n’exigerait pas un départ de la CEDEAO. « Le Togo peut être membre de l’AES tout en restant membre de la CEDEAO. Il est dans son intérêt de poursuivre le partenariat avec la CEDEAO, même s’il adhère à l’AES », a-t-il affirmé dans un entretien accordé à RFI.
La souveraineté en question…
Théodore Holo soulève une contradiction dans l’utilisation du concept de « souveraineté » par les pays membres de l’AES. « Je crois que les États souverainistes doivent comprendre que nous vivons dans un monde globalisé. Beaucoup de ces États, tout en rejetant la présence militaire française, nouent des coopérations militaires avec d’autres pays comme la Russie », a-t-il observé.
Être souverain, selon lui, c’est prendre des décisions en tenant compte des intérêts de son pays et non ceux de la classe dirigeante. Il cite l’exemple de Thomas Sankara. « Je crois que quelqu’un comme Sankara était très souverainiste, mais n’a jamais décidé de quitter la CEDEAO ni l’Union africaine », a-t-il indiqué.
Pour l’ancien ministre des Affaires étrangères, « la souveraineté, c’est de défendre ses intérêts », ce qui est également possible au sein de la CEDEAO. « C’est donc un prétexte de dire que c’est des Etats qui se veulent souverainistes. Il y a d’autres pays qui sont souverainistes, mais qui sont toujours dans la CEDEAO », a affirmé Théodore Holo.