Depuis quelques années, les solutions de paiement électronique s’imposent progressivement au Bénin. L’État encourage cette révolution à travers des mesures fiscales appliquées à des paiements en espèces à partir d’un montant seuil. Les structures bancaires ne sont pas en reste : la plupart ont déjà développé des systèmes pour dématérialiser les opérations de dépôt et de retrait.
Paiements électroniques : vers une économie sans cash au Bénin ?
En Afrique, malgré le fort penchant des populations (90 % selon Soprabanking) pour les espèces sonnantes, les solutions de paiement électronique se frayent un chemin prometteur. Selon une étude de McKinsey, d’ici 2025, les paiements électroniques devraient augmenter de 20 % en Afrique et générer jusqu’à 40 milliards de dollars.
Comme plusieurs pays africains, le Bénin n’est pas en marge de cette révolution technologique qui touche les opérations financières. Les populations, surtout en zones urbaines, adoptent de plus en plus les moyens de paiement électronique, qui facilitent les échanges commerciaux et permettent de gagner du temps. Les agrégateurs se sont rapidement positionnés, et l’État s’emploie aussi à suivre cette dynamique, notamment avec le service eQuittance du Trésor public.
Selon les données de l’Autorité de régulation des communications électroniques et de la poste, en 2023, plus de 11 millions de clients des transactions mobiles pour un montant dépassant 2 milliards de FCFA, soit une moyenne de 5,6 millions d’opérations quotidiennement.
« Je ne me rappelle pas la dernière fois où j’ai fait la file d’attente dans une agence de la Société nationale des eaux du Bénin (Soneb) ou de la Société béninoise d’énergie électrique (SBEE) pour payer une facture. C’était une situation pénible, vu la lenteur des guichets. Je peux dire que je fais partie des premières personnes à avoir très vite adopté les solutions de paiement en ligne pour régler mes factures d’eau et d’électricité », confie Janvier, l’un des utilisateurs assidus des solutions électroniques de paiement.
Des obstacles à surmonter
Le système progresse, mais il doit encore affronter certains obstacles pour mieux s’imposer. « C’est vrai qu’il y a une adoption croissante, mais la grande majorité des gens préfère encore le cash, car c’est ancré dans leurs habitudes », explique Assan Salami, développeur Full Stack et manager de TranXact. Il ajoute que la réticence de certaines personnes à adopter le e-paiement peut s’expliquer par la méfiance vis-à-vis des outils de paiement en termes de sécurité.
Cette méfiance est parfois alimentée par des bugs techniques qui découragent les utilisateurs. Eric Codjo, par exemple, a décidé de ne plus utiliser un agrégateur pour effectuer des paiements en ligne après avoir failli effectuer un double paiement pour le même service, alors que son compte avait déjà été débité. « Tout est rentré dans l’ordre après, mais le désagrément m’a laissé un traumatisme. C’était beaucoup d’argent », raconte-t-il. Malgré les goulots d’étranglement, Assan Salami assure que l’e-paiement est nécessaire et pourrait donner un coup d’accélération à l’économie béninoise.
Des mesures fiscales pour encourager l’e-paiement
Depuis 2011, la Direction générale des impôts a pris des mesures pour contraindre les entreprises à adopter les paiements en ligne lorsque la somme dépasse 100 000 FCFA. Selon le Directeur général, Nicolas Yenoussi, une amende de 10 % était appliquée aux entreprises qui ne respectaient pas cette mesure. En 2012, l’amendement a été effectué mais réduit à 5 % du surplus au-delà des 100 000 FCFA. À partir de 2025, il s’agira d’un prélèvement direct de 1 %.
Selon Nicolas Yenoussi, cette mesure vise à renforcer la bancarisation et la digitalisation des paiements pour « diminuer le transport et les paiements en espèces ». « Aujourd’hui, le gouvernement a développé de nombreux systèmes de paiement numérique. » L’adoption du e-paiement, en plus de faciliter les transactions, permet de renforcer la traçabilité des opérations et de lutter contre la fraude fiscale.
Un environnement à consolider
Cependant, pour un envol réel, un environnement approprié est nécessaire. « Aujourd’hui, est-ce que les outils nécessaires pour soutenir la révolution de l’e-paiement sont suffisamment disponibles ? Le gouvernement doit accompagner les fintechs présentes pour leur permettre de rendre ces outils accessibles. Par exemple, les TPE (terminaux de paiement) ne sont pas encore largement déployés. Il manque des mécanismes décentralisés pour faciliter les paiements », observe Assan Salami.
Ce manque pourrait bientôt être comblé, car TranXact prévoit d’apporter une solution. « Nous sommes en train de lancer un service de ce type. C’est un marché colossal que nous avons envie de conquérir, mais nous sommes également ouverts à la concurrence », conclut le manager de TranXact.