Les déclarations du sénateur écologiste Yannick Jadot sur le suicide d’agriculteurs français suscitent l’attention. Il a affirmé sur Franceinfo que « un tiers des agriculteurs français vivent sous le seuil de pauvreté » et que « deux agriculteurs se suicident par jour ». Mais, est-ce vraiment vrai ?
France : le mal-être des agriculteurs français
Yannick Jadot s’appuie sur les données de la Mutualité sociale agricole (MSA). Selon un rapport d’octobre 2022, 529 agriculteurs affiliés se sont suicidés en 2016, soit environ 1,5 suicide par jour. Cependant, ces chiffres sont considérés comme sous-estimés, excluant ceux non affiliés à la MSA. Une autre étude mentionne un suicide tous les deux jours entre 2007 et 2011, mais ces données plus anciennes sont moins pertinentes aujourd’hui.
Statistiquement, les agriculteurs français de 15 à 65 ans ont un risque de suicide 30% plus élevé que d’autres catégories professionnelles. En 2020, la MSA rapporte une surmortalité de 30,9 % chez les consommateurs de soins du régime agricole. Les propriétaires agricoles, en excluant les salariés, affichent un excès de risque de 77,3 %.
Plus l’âge avance, plus le risque augmente. Les agriculteurs de 65 ans et plus ont un risque de suicide 63,5% plus élevé que la population générale, et les hommes sont plus touchés que les femmes. Vivre en zone rurale défavorisée ou avoir une affection de longue durée aggrave également le risque.
Les faibles revenus et le sentiment de dénigrement des agriculteurs français sont les principales causes de ce phénomène. Un rapport sénatorial de 2021 souligne l’impact de la question économique, de l’endettement, de l’isolement, des relations familiales complexes, de la pression pour l’agrandissement, de la perte de liberté d’exploiter, de la surcharge de travail et du manque de reconnaissance.
Concernant la déclaration de Yannick Jadot sur le tiers des agriculteurs vivant sous le seuil de pauvreté, les données de l’Insee de 2019 indiquent que 26% des agriculteurs étaient en situation de pauvreté. Cette statistique cache cependant des disparités majeures, avec des revenus moyens mensuels de 2800 euros pour les producteurs de fruits et légumes, mais seulement 700 euros pour les éleveurs de moutons ou de chèvres.
La crise agricole en France est complexe, avec des facteurs économiques, sociaux et psychologiques contribuant aux suicides et à la pauvreté des agriculteurs. La mobilisation actuelle des syndicats agricoles souligne l’urgence d’actions concrètes du gouvernement pour aborder ces défis. Les chiffres, bien qu’impressionnants, ne reflètent peut-être pas pleinement l’ampleur du problème, mais ils mettent en lumière une réalité difficile pour de nombreux agriculteurs en France.