La Côte d’Ivoire, avec ses récentes découvertes de gisements de pétrole, se positionne comme un acteur majeur dans le secteur des hydrocarbures. Cependant, cette croissance est freinée par des contraintes logistiques importantes. Des acteurs ivoiriens du secteur pétrolier se sont réunis pour réfléchir aux défis majeurs qui entravent le développement de cette industrie en plein essor.
Côte d’Ivoire : défis et enjeux de la logistique pétrolière
Abidjan, la capitale économique ivoirienne, a accueilli du 5 au 7 février 2025 une série de tables rondes sur le thème de la logistique et les défis majeurs qui entravent le développement de l’industrie pétrolière. Cette initiative, du commissaire général de ‘’Table ronde logistique pétrolière’’, Guy Hervé Zakpa, a réuni 70 entreprises du secteur et 200 participants qui ont partagé leurs expériences et leurs préoccupations.
La Côte d’Ivoire, avec ses récentes découvertes de gisements de pétrole (Baleine et Calao), se positionne comme un acteur majeur dans le secteur des hydrocarbures. Cependant, cette croissance est freinée par des contraintes logistiques importantes, tant en amont (extraction et production) qu’en aval (transport et distribution).
La directrice générale de SLB Côte d’Ivoire, Olivia Djibo, a souligné les problèmes d’équipements bloqués en douane. Le responsable logistique chez ENI Côte d’Ivoire, Michele Ciccone, a insisté sur la nécessité de trouver des solutions à la congestion portuaire, un obstacle majeur pour l’industrie.
Face à ces défis, le gouvernement ivoirien, à travers le ministère des Mines, du Pétrole et de l’Énergie, a pris l’initiative de mettre en place un comité de pilotage pour élaborer un plan directeur de la logistique pétrolière. Selon le sous-directeur de la production des hydrocarbures, Yeboué Kakousi-Rafen, « cette initiative permet de rassembler toutes les parties prenantes pour adresser les questions logistiques essentielles au développement du secteur. »
Au terme d’une série de panels et d’ateliers, le constat est une réalité à double facette. D’un côté, une nation dotée d’un potentiel énergétique exceptionnel, d’une position géographique stratégique et d’une industrie en pleine expansion, tant en amont qu’en aval. De l’autre, des infrastructures sous pression, dû à des processus administratifs encore trop lourds et à une nécessaire montée en compétitivité face à un environnement régional en mutation.
Sur l’amont pétrolier, le pays se positionne de plus en plus comme un acteur clé de l’industrie pétrolière et gazière régionale, avec des découvertes significatives et une production croissante. Cependant, cette montée en puissance s’appuie sur des infrastructures qui ne sont plus adaptées à la forte croissance du secteur. Certains gazoducs, essentiels pour l’acheminement du gaz, approchent la saturation.
Les bases logistiques, avec des quais insuffisants, ne répondent plus aux exigences d’efficacité et de sécurité qu’exige notre ambition nationale. Du côté aval, il a été observé des congestions sévères dans les dépôts de stockage, des délais de chargement et d’acheminement trop longs, et une dépendance excessive au transport routier qui impacte à la fois notre compétitivité et l’état des infrastructures.
A la sortie d’Abidjan, nous avons un poste de pesage qui contrôle inutilement la conformité des chargements des camions citernes carburant, qui ne peuvent excéder leur poids tout simplement parce qu’ils sont hermétiques (on peut mettre deux litres d’eau dans une bouteille de un litre). Ces dites citernes passent plus d’une heure par jour à ce poste de pesage. Conséquence, cela ralentit les chaînes d’approvisionnement et crée des congestions sur les autres flux. L’insuffisance de planification logistique cohérente et d’interconnexion entre les différents modes de transport pèse sur l’efficacité globale.
Solutions et perspectives pour la logistique pétrolière
Il est essentiel d’instaurer un cadre de concertation régulier entre l’État et le secteur privé, pour accélérer la prise de décision et assurer une flexibilité nécessaire à la compétitivité. Au niveau de l’innovation technologique, l’automatisation des processus, le suivi en temps réel des flux, la maintenance prédictive des infrastructures grâce à l’IoT (Internet of Things) et aux capteurs intelligents, ainsi que l’utilisation du big data pour optimiser la gestion logistique, sont autant d’éléments qui doivent être au cœur de notre stratégie.
Pour la question environnementale et sociale, les activités ne doivent pas compromettre le cadre de vie des populations. La pollution de la lagune d’Abidjan impacte déjà directement le transport maritime vers nos plateformes offshore, avec des coûts opérationnels croissants et des risques accrus pour les infrastructures maritimes. Il faut intégrer des normes environnementales strictes et responsabiliser chaque acteur sur la préservation des ressources.
Il est primordial d’agir maintenant pour éviter que les défis d’aujourd’hui ne deviennent des crises demain. À moyen terme, il est nécessaire de créer un hub logistique régional, qui viendrait compléter et alléger les charges d’Abidjan, d’intégrer davantage le rail et les corridors multimodaux pour limiter la dépendance au transport routier. À cela s’ajoute le renforcement du cadre légal sur la gouvernance des infrastructures pour garantir un développement harmonieux du secteur.
À long terme, l’ambition est de positionner la Côte d’Ivoire comme le leader régional en matière de logistique pétrolière et gazière, avec des infrastructures modernes et un cadre de gouvernance agile. De développer une industrie de transformation locale pour réduire la dépendance aux importations et maximiser la valeur ajoutée nationale puis, mettre en place un modèle énergétique durable, qui tienne compte des réalités environnementales et intègre les technologies les plus avancées.
Le développement du secteur pétrolier et gazier ivoirien est une opportunité sans précédent pour notre économie. Mais cette opportunité ne pourra être pleinement exploitée que si nous faisons preuve de vision, d’anticipation et d’engagement. La Côte d’Ivoire dispose aujourd’hui des ressources, des compétences et des acteurs capables de transformer le pays en un hub énergétique majeur en Afrique de l’Ouest.
« Ce qu’il nous faut maintenant, c’est la volonté collective d’avancer ensemble, de ressources, de compétences et des acteurs capables de mettre de côté les intérêts individuels pour bâtir une industrie plus forte, plus performante et plus durable. Le travail qui nous attend est immense, mais les perspectives qui s’offrent à nous sont encore plus grandes. Que chacun d’entre nous prenne la mesure de sa responsabilité et que nous nous engageons, dès aujourd’hui, à bâtir l’avenir de la logistique pétrolière et gazière en Côte d’Ivoire, » a invité M. Guy Hervé Zakpa.