Qui peut aujourd’hui s’opposer à Cissé Bacongo, Ministre-Gouverneur D’Abidjan, capitale économique de la Côte d’Ivoire ? La question se pose avec l’incident du Lundi 18 novembre dernier à l’abattoir de Port-Bouët, où il a fait interdire par l’usage de la force, une cérémonie organisée par le Ministère des Ressources Animales et Halieutiques, cela en présence du ministre Sidi Tiémoko Touré.
Le Ministre Cissé Bacongo, l’homme trop fort d’Abidjan
La presse a largement commenté les incidents prenant fait et cause pour l’un et l’autre camp. Sans se prononcer sur le fond de cette affaire, on retiendra que le MRAH avait bien informé le gouverneur du District Autonome d’Abidjan de la tenue d’une cérémonie à l’Abattoir de Port-Bouët, par un courrier réceptionné à son secrétariat en date du 08 Novembre.
Le courrier adressé au ministre Cissé Bacongo est resté sans réponse, ce qui signifie que le District ne s’opposait pas à la tenue de la cérémonie. Celle-ci portait sur le lancement des équipes de contrôle et d’inspection sanitaire de l’abattoir. Signalons au passage que l’abattoir de Port-Bouet fait l’objet de deux tutelles. Sur le plan administratif, il relève du ministère de l’intérieur, via le District autonome d’Abidjan (DAA), et sur le plan technique, il relève du Ministère des Ressources Animales et Halieutiques.
Si le gouverneur Bacongo avait clairement exposé ses réserves, cela aurait certainement donné lieu à un arbitrage de la part du Premier Ministre, un terrain d’entente aurait été trouvé, et les incidents du 18 Novembre auraient été évités. Au lieu de cela, il ne dit rien, et le jour-J, fait interdire la cérémonie manu militari alors qu’elle est sur le point de débuter, humiliant au passage son collègue Sidi Tiémoko Touré du Ministère des Ressources Animales. Il se justifie ensuite dans la presse, en étalant ses arguments. Sa démarche donne une image de désordre et de cacophonie, elle montre surtout que l’homme agit comme il l’entend, sans que personne ne puisse s’y opposer, sans se soucier de l’impact de ses décisions.
Rappelons que suite aux premiers déguerpissements en janvier dernier, le conseil des ministres du 28 Février avait décidé la mise sur pied d’un comité interministériel présidé par le premier ministre, chargé désormais de la question. En d’autres termes, le gouverneur Bacongo était dessaisi de la question des déguerpissements. Mais sur le terrain, ce fut une décision sans effet, car l’homme a continué et continue de mener seul les déguerpissements, sans que personne ne puisse faire d’objections. Ce comité interministériel était bien mort-né.
La récente nomination de « gouverneurs adjoints » au District d’Abidjan est visiblement un lot de consolation pour ses personnalités. Cissé Bacongo ne partage son pouvoir avec personne. Aujourd’hui le District autonome d’Abidjan est en conflit avec certaines communes, concernant la propriété de certains sites qui ont été déguerpis. Au mépris des textes, l’homme a procédé à des déguerpissements sur des sites qui relèvent de l’autorité des communes, et non du District d’Abidjan.
Cissé Bacongo foule au pied les textes, et fait toujours usage de la force. Ce sont deux constantes dans sa démarche, alors qu’il est juriste de formation. Il rase des sites qui ont fait l’objet de morcellement avec attribution d’ACD, et de titres fonciers, remettant ainsi en cause des documents délivrés par le Ministère de la Construction. Il n’est que gouverneur de la ville d’Abidjan, pourtant son pouvoir est immense.
Cissé Bacongo apparaît bien comme « l’homme fort » de la place aujourd’hui, celui qui détient la réalité du pouvoir. On a la nette impression que personne ne peut lui tenir tête, ni le Ministre de l’Intérieur, son ministre de tutelle, ni même le Premier Ministre, encore moins les maires des communes d’Abidjan. Il est par ailleurs le secrétaire exécutif du parti au pouvoir, ce qui lui donne un avantage indéniable dans une éventuelle course à la succession du président, course dans laquelle son nom est régulièrement cité.
Douglas Mountain
Le Cercle des Réflexions Libérales