Ce jeudi 8 février 2024, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a tenu une réunion extraordinaire pour se prononcer sur le retrait des pays de l’AES (Mali, Burkina Faso et le Niger). A l’issue de la rencontre, l’Organisation a répondu aux courriers de notification reçus de la part de chacun des trois pays. Elle a également critiqué les raisons évoquées par ces deniers pour justifier leur décision de claquer la porte.
La CEDEAO répond aux accusations du Mali, du Burkina Faso et du Niger
La CEDEAO ne voit pas la pertinence des raisons évoquées par le Mali, le Burkina Faso et le Niger pour soutenir leur retrait de l’Organisation. Point par point, la Commission de la CEDEAO a démonté les arguments des militaires. A l’entame de la réunion, les raisons du « retrait immédiat » annoncé, ont été exposées à l’attention du Conseil de médiation et de Sécurité.
Selon le résumé présenté par la Commission, les trois Etats démissionnaires évoquent :
- la perception d’un éloignement de la CEDEAO des « idéaux panafricains de ses pères
fondateurs » ; - la perception de l’influence de puissances étrangères
hostiles sur la CEDEAO ; - un sentiment d’abandon par la CEDEAO dans
sa lutte contre le terrorisme ; - l’imposition de sanctions « illégales, illégitimes, inhumaines et irresponsables » par la CEDEAO.
Réplique de la CEDEAO
En réponse aux raisons invoquées par le Mali, le Burkina Faso et le Niger pour se retirer de la CEDEAO, la Commission a apporté une réplique pas très tendre. Elle a noté ce qui suit :
- Les sanctions imposées au Niger, en particulier, ne sont ni
illégales ni inhumaines car elles sont ancrées dans les Protocoles
de la CEDEAO dont ces trois pays sont signataires. La Commission a également indiqué que le Burkina Faso et le Mali ne sont pas
soumis aux sanctions de grande ampleur auxquelles font allusion les trois États membres. Les sanctions contre le Niger devaient être progressivement levées une fois qu’une feuille de route pour la transition aurait été adoptée et que le Président Bazoum aurait
été libéré ; - Aucune puissance ou influence extérieure n’a contraint la CEDEAO à adopter ses traités, protocoles et actes dont le Burkina Faso, le Mali et le Niger sont signataires de plein gré ;
- Loin d’«abandonner la vision des pères fondateurs de la CEDEAO», la CEDEAO a approfondi l’intégration et la solidarité régionales dont les trois Etats membres ont été les principaux bénéficiaires ; les exigences de l’époque ont contraint la Communauté à associer la démocratie, la bonne gouvernance, les droits de l’homme et l’état de droit dans son programme d’intégration économique ;
- Enfin, les décisions et directives de la Conférence sur la lutte contre l’insécurité et le terrorisme, ainsi que la mise en œuvre assidue de ces décisions et directives par la Commission, démentent l’affirmation d’abandon évoqué par les trois États membres en ce qui concerne la lutte contre le terrorisme.
De la poudre aux yeux
Selon la Commission, les raisons avancées par Assimi Goita, Ibrahim Traoré et Abdourahamane Tchiani, « ne constituent que de la poudre aux yeux, cachant la véritable raison qui est leur intention de ne pas remplir leurs obligations au titre du traité et du protocole ».
En particulier, ils n’ont nullement l’intention de renoncer, dans un futur proche, au pouvoir politique qu’ils ont obtenu par des voies non constitutionnelles. Leur position pourrait être interprétée comme un stratagème visant à détourner l’attention de l’insistance de la CEDEAO sur le rétablissement rapide de l’ordre constitutionnel.
Commission de la CEDEAO
Pas question de partir avant l’expiration du délai de préavis
La Commission a rejeté catégoriquement la volonté de se retirer « immédiatement » émise par le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Elle a rappelé que ses textes ne permettent pas d’accorder cette dérogation. En effet, l’article 91 du Traité révisé de 1993 impose un préavis d’un an à tout Etat souhaitant se retirer de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest.
La Commission considère donc que les notifiées adressées par chacun des trois Etats font office de préavis. Leur retrait sera donc effectif dans un an, s’ils ne retirent pas ledit préavis avant l’expiration du délai.