À en croire le gouvernement ivoirien, il n’y a pas de prisonniers politiques en Côte d’Ivoire. Cependant, un député français qui vient de séjourner à Abidjan dit en avoir dénombré plus de 200 qui sont détenues dans des conditions inhumaines, apprend-on de Koaci.com.
Affaire prisonniers politiques, un député français fait toute la lumière
Depuis la chute de Laurent Gbagbo en avril 2011, plusieurs cadres de son régime sont incarcérés aussi bien en Côte d’Ivoire qu’à l’étranger. En effet, l’ex-président ivoirien et son ancien ministre de la Jeunesse, Charles Blé Goudé, se trouvent dans la prison de Scheveningen et leur procès est pendant devant la Cour pénale internationale (CPI).
Quant à l’ex-première dame Simone Gbagbo et plusieurs autres barons de l’ancien pouvoir, ils croupissent dans les geôles ivoiriennes. Ceux qui sont ainsi détenus sur le sol ivoirien connaissent des fortunes diverses. Certains ont déjà été jugés et condamnés à de lourdes peines d’emprisonnement, d’autres, en procès depuis plus de six ans, demeurent encore en prison. N’empêche que Pascal Affi N’Guessan et plusieurs autres prisonniers pro-Gbagbo ont été libérés.
Toutefois, selon la version officielle donnée par le gouvernement, il n’existe pas de prisonniers politiques en Côte d’Ivoire. Pour les autorités ivoiriennes, il ne s’agit que des prisonniers de droit commun qui sont emprisonnés pour des infractions bien constituées, et non pour leurs appartenances politiques.
Michel Gbagbo, le fils de l’ancien président ivoirien et le patron d’un journal en ligne avaient récemment été condamnés par la justice ivoirienne pour avoir osé utiliser ce vocable de « prisonniers politiques ».
Mais de retour d’Abidjan, Michel Larive, député français proche de Jean-Luc Mélenchon, a levé un coin de voile sur la situation des prisonniers d’Abidjan. Pour ce cadre de la France Insoumise (FI), des proches de l’ex-chef d’État ivoirien sont incarcérés par centaines en Côte d’Ivoire, dans des conditions qui irriteraient toute organisation des droits humains. Cependant, face au mutisme généralisé, l’opposant membre de la gauche française a décidé d’interpeller les autorités de son pays, en l’occurrence, Jean-Yves Le Drian, ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, sur la situation des droits de l’homme sur les rives de la lagune Ébrié.
L’intégralité de l’adresse de Michel Larive aux autorités françaises
« M. Michel Larive attire l’attention de M. le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères sur la situation politique ivoirienne. La situation en Côte d’Ivoire, d’où il revient, est marquée depuis 2011 par une fracture de la société entre les vainqueurs et les vaincus, avec toutes les atteintes au respect des droits de l’Homme qu’elle a engendrées. Selon les témoignages qu’il a recueillis, les opposants à M. Ouattara et leurs familles sont persécutés. Six ans après le changement de régime, près de 200 prisonniers politiques sont détenus dans des conditions avilissantes. Ils sont incarcérés dans une promiscuité insupportable. Plus de la moitié d’entre eux sont détenus, sans jugement.
Selon ces témoignages, tortures et mauvais traitements sont monnaie courante dans les geôles de la DST. En découlent des conséquences dramatiques : aux maladies s’ajoutent les morts, 7 en prison et 5 juste après des « libérations » précipitées. Ces faits lui ont été rapportés par les femmes et les enfants de prisonniers. C’est ainsi que la famille de l’ancien Président Laurent Gbagbo est régulièrement persécutée. Son épouse, très affaiblie, a été condamnée à une lourde peine de prison par une justice aux ordres. Son fils, Michel Gbagbo, a subi une pénible peine de prison à cause de son seul patronyme. Il est né à Lyon, il est donc ressortissant français. Mais il ne peut pas revenir en France, pour répondre à la convocation de juges français, parce que le gouvernement ivoirien lui interdit de quitter la Côte d’Ivoire.
Laurent Gbagbo en est à sa septième année de détention. 82 témoins présentés par l’accusation n’ont pas suffi à certifier les charges qui pesaient contre lui. Les magistrats de la Cour pénale internationale ont enjoint au procureur d’abandonner ou de requalifier les charges contre l’ancien président ivoirien. La France est un partenaire privilégié de la Côte d’Ivoire. C’est pourquoi il voudrait connaître la position du Gouvernement sur la situation politique et sociale ivoirienne, et sur la cohérence de l’incarcération de M. Gbagbo, au regard de la faiblesse des charges reconnues contre lui. »