Président en exercice de l’Union africaine (UA), Paul Kagamé s’impatiente de voir une Afrique véritablement indépendante. Pour ce faire, le président rwandais ne manque aucune occasion pour affirmer son vœu pieu de s’affranchir de toutes puissances tutélaires.
Paul Kagamé veut se passer des « donneurs de leçons »
« L’attitude de la France à l’égard du Rwanda ne changera pas tant que la France n’aura pas changé d’attitude vis-à-vis de l’Afrique en général », telle était la déclaration de Paul Kagamé lors d’une interview à JA. Aussi, les relations naguère tumultueuses entre le Rwanda et le France se sont nettement améliorées depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron à l’Elysée. Cependant, la France n’a pas d’ambassadeur à Kigali depuis 3 ans, car pour le président Kagamé, il est aberrant de croire encore, en 2018, que « le Rwanda puisse appartenir à qui que ce soit d’autre qu’aux Rwandais ».
Le chef d’Etat rwandais reste donc jaloux de sa liberté de penser et d’agir conformément à ses propres principes, sans se voir dicter son comportement depuis l’extérieur. A ce titre, il n’a cure des critiques portées contre sa longévité au pouvoir, sa récente réélection avec un score soviétique, ses relations avec ses voisins, encore moins de l’orientation politique, économique et surtout diplomatique pratiquée par Kigali. A titre d’exemple, il a récemment signé un partenariat avec l’équipe anglaise d’Arsenal en vertu duquel le club londonien portera, dès août prochain, un maillot estampillé « Visit Rwanda » pour le développement du tourisme au pays des mille collines.
Décomplexé et surtout charismatique, le sexagénaire s’est vu confier, depuis l’année dernière, le processus de réforme de l’Union africaine (UA) afin d’assurer à l’organisation panafricaine une indépendance – notamment financière et économique – et une crédibilité vis-à-vis de l »étranger.
A l’endroit de ceux qui critiquent sa gouvernance et sa main mise sur le pouvoir, le président Paul Kagamé a déclaré : « J’ai appris à coexister avec ce genre de critiques, tout comme mon successeur et le successeur de mon successeur coexisteront sans doute avec elles. Je n’éprouve plus aucun besoin de convaincre ceux qui les répètent qu’ils se trompent et qu’ils trompent l’opinion, ce serait une perte de temps. »
Convaincu de ce que « moins le monde prête attention à l’Afrique, mieux l’Afrique se porte », l’homme fort de Kigali reste formel : « Nous devons comprendre que le temps du baby-sitting est révolu et que nous ne grandirons jamais tant que nous estimerons avoir un besoin éternel de baby-sitters européens, américains, asiatiques ou autres. » Puis, il ajoute : « D’autant que ce baby-sitting implique toujours une forme profonde de paternalisme. Quand j’entends certains de vos confrères journalistes asséner leurs jugements et leurs conseils avec une autorité inversement proportionnelle à leur expertise, je m’interroge. »
Notons que la ministre rwandaise des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo, est candidate pour la présidence de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Le président du Rwanda qui s’active pour l’élection de sa compatriote a déclaré à juste titre : « Louise est africaine, parfaitement bilingue français-anglais et professionnelle : si la Francophonie veut s’ouvrir à la diversité et s’internationaliser au-delà d’un cercle étroit de pays, elle est la candidate idéale. »