Déclaré perdant à l’issue des municipales du 13 octobre à Divo (Centre-Ouest ivoirien), le député Famoussa Coulibaly estime qu’il n’a pas « été battu à la régulière » mais a « préféré l’injustice au désordre » en reconnaissant la victoire de son principal adversaire le ministre Amédé Kouakou, dans une interview.
Famoussa Coulibaly, préfère l’injustice qu’au désordre à Divo
Comment expliquez-vous votre défaite aux municipales à Divo ?
D’abord, je tenais à remercier les électeurs pour leur sang-froid. Divo avait été décrétée zone rouge, nous avons pu y faire prévaloir la dignité humaine. Beaucoup de choses se sont passées, des cas d’irrégularités, des actes d’intimidation, de vandalisme, des urnes ont été enlevés à PK8. Comme le président Houphouët le disait si bien, nous nous sommes dit qu’il fallait préférer l’injustice au désordre.
Je n’ai jamais voulu faire la politique en ayant les mains tachetées de sang. Pour moi, la politique, c’est servir et non se servir. J’ai vu une population déterminée qui m’a suivi pendant la campagne. Nous avons fait une campagne digne. Nous avons résisté, malheureusement certaines pratiques ont eu raison de nous au cours des élections.
Avez-vous des preuves de ces cas d’irrégularités que vous évoquez ?
Je ne veux pas paraître comme un mauvais perdant dans la mesure où nous n’avons pas saisi la Cour suprême pour un quelconque recours. S’il y a eu des observateurs au cours des élections à Divo, ils ont pu le constater. Certains de mes représentants ont été violentés dans des centres. Je devais voter à 10H00, on m’a dit qu’on ne pouvait pas garantir ma sécurité, qu’il me fallait attendre.
Une élection ne doit pas donner lieu à l’affrontement. On a interpellé certaines personnes avec des bulletins pré-cochés, on a vu des forces de l’ordre se rendre complice de ces personnes. Des gens qui n’avaient pas leur nom sur les listes ont pu voter, d’autres qui avaient leur nom, n’ont pas pu voter. Je me suis dit qu’il fallait éviter un bain de sang.
J’ai appelé le maire sortant pour le féliciter. Malgré cela, le lendemain, on a pris des machettes pour aller attaquer ma famille. Nous avons enregistré avant, pendant et après ces élections beaucoup de cas d’agressions de nos militants, ce qui est déplorable pour une démocratie. Les élections locales sont des élections de développement, ça n’a rien avoir avec la politique, fallait laisser le peuple s’exprimer de façon démocratique.
Nous prenons acte et nous tirons les leçons de ce qu’il s’est passé. Je ne pense pas que j’ai été battu à la régulière. Malgré les menaces, 30 % de la population s’est reconnu en nous. Cela dénote du fait que notre électorat reste intact et déterminé pour les échéances futures. J’appartiens à une formation politique qui est l’UDPCI qui fait partie du RHDP, donc je demeure RHDP, tant que mon parti adhère à cette coalition.
Ce que je souhaite, c’est que nous ayons une Côte d’Ivoire réconciliée entre toutes ses filles et fils. On peut ne pas se comprendre sur un certain nombre de choses, mais il important que les différents acteurs au haut niveau puissent se parler, pour préserver la Côte d’Ivoire. C’est pourquoi notre slogan de campagne était « Divo d’abord, Divo avant nous-même, les partis, l’ethnie, la religion ». Pour nous, ce n’est pas un échec, c’est une épreuve. Et d’ici quelques mois, le temps nous donnera raison.
Vous soutenez n’avoir pas été battu à la régulière, regrettez-vous d’avoir félicité votre adversaire ?
Non, je ne le regrette pas. Malgré les irrégularités constatées, nous nous sommes dit qu’il fallait préserver les vies humaines. J’ai préféré l’injustice d’aujourd’hui au désordre. J’aurais appelé mes partisans, dire que je ne reconnais pas ce qu’il s’est passé, ça aurait entraîné d’autres situations, on aurait comptabilisé des blessés, des morts.
Que comptez-vous faire maintenant ?
Je continuerai d’exercer ma fonction de député, d’être auprès des populations pour continuer à mériter leur confiance, me mettre au service de mon parti pour tout autre challenge à venir.
Vous affirmez être du RHDP, mais vous avez pourtant maintenu votre candidature face à un candidat RHDP ?
J’ai répondu aux sollicitations des populations, elles m’ont fait confiance. Le processus de choix des candidats n’a pas été ce qui aurait dû être. Après avoir déposé notre candidature avec une quarantaine de personnalités de bords différents, il est difficile pour nous de faire marche arrière à un moment donné, nous sommes allés jusqu’au bout, sans défier qui que ce soit. Mais c’était pour répondre à l’appel des populations, cela ne fait pas de nous des anti-RHDP. Je demeure ce que je suis, nous ne regrettons pas d’avoir été candidat et répondre à l’appel des populations.
Ce que je déplore, c’est la manière avec laquelle ces élections se sont déroulées. Une élection ce n’est pas la guerre, ce n’est pas des machettes, des pistolets, c’est convaincre les populations avec un programme, avec des idées. C’est ce que nous avons essayé de faire malheureusement, on nous a opposé la force, des pistolets, des fusils. Nous regrettons cela et j’espère que ceux qui l’ont fait vont également regretter pour que nous ayons des élections apaisées en 2020.