Les manœuvres politiques qui se sont intensifiées ces dernières semaines, démontrent l’importance des alliances politiques avant 2020. Alors que Blé Goudé réitère son soutien à Laurent Gbagbo, et que Bédié lui envoie un émissaire, le RHDP cherche des représentants des partis de l’opposition à la CEI. Il faut composer la nouvelle commission électorale indépendante, validée le 31 Juillet 2019 par la majorité parlementaire. Quelle marge de manœuvre pour le gouvernement face à une opposition hétéroclite.
Un passage en force avec un texte rejeté par tous, quelle marge de manœuvre pour Ouattara?
Mon cher Gbanzan,
Je voudrais avant tout propos dénoncer ici le laxisme de votre gouvernement face à l’insécurité grandissante chez vous. De mémoire à Bloléquin, dans la région du Cavally (Ouest de la Côte d’Ivoire) des populations avaient lynché à mort un gendarme le 17 Février 2018. Dimanche à Abidjan, un gendarme subissait le même sort, dans la commune de Yopougon. Je t’épargne la liste des policiers égorgés et autres agents des forces de l’ordre exécutés sommairement. Tu sais, dans ton pays, personne n’apprend du passé et on reproduit les mêmes erreurs qui vous condamnent à revivre votre passé. Et les hommes politiques sont sur la bonne voie. Je t’en parle.
La dernière interview du chef de l’Etat ivoirien, dans le cadre de la traditionnelle adresse à la nation, a confirmé les propos du ministre de l’intérieur: « Nous n’allons pas passer tout le temps en discussions », avait lancé Sidiki Diakité lors des débats en commission avec les députés, portant sur la nouvelle CEI. Quant au président de la République, il avait annoncé que « des réglages » étaient prévus dans la constitution. Certainement pour la bonne marche du pays. Modification par décret présidentiel de quelques clauses qui laissent croire à un passage en force pour un troisième mandat. Non il ne se représentera pas, lui-même l’a dit. De plus, même ses lieutenants les plus fidèles et illustres reconnaissent l’impossibilité pour Alassane Ouattara de briguer un troisième mandat. N’est-ce pas un homme de parole? Le vote de la nouvelle loi régissant la CEI reste quand même le point de discorde essentiel entre l’opposition et le RHDP au pouvoir.
L’enjeu est désormais de faire accepter un texte anticonstitutionnel par un jeu d’alliance et des soutiens de partenaires. Alors Alassane Ouattara active ses réseaux et les résultats tombent déjà. A l’extérieur du pays, l’union africaine par la voix du président de sa commission a salué l’adoption de la nouvelle loi sur la composition de la CEI. Moussa Faki Mahamat « se félicite » de la prise en compte des recommandations de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples dans la nouvelle mouture de la Commission électorale ivoirienne (CEI).
En interne, les barons du RHDP donnent de la voix pour convaincre. Mais qui prend en compte l’opinion des forces politiques du pays? Même si elles peinent à créer une dynamique, leur avis ne devrait pas être ignoré. Nous sommes encore en démocratie, n’est-ce pas! Pour l’heure rien ne semble arrêter le chef de l’Etat, président du RHDP, qui va donner de quoi moudre à ses partenaires pour apporter leur soutien à la nouvelle CEI. L’opposition quant à elle, se cherche une identité.
Qui pour porter la plateforme de l’opposition face au RHDP aussi déterminé?
De Guillaume Soro à Laurent Gbagbo en passant par Pascal Affi N’guessan, la plateforme de l’opposition peine à naître. Le projet d’Henri Konan Bédié pour arrêter le RHDP en 2020 est confronté à sa propre nature. Si au départ, les concepteurs de la plateforme de l’opposition pensaient marquer un bon point avec Guillaume Soro, ils se sont vite ravisés. Ce n’est pas parce qu’il venait de claquer la porte du RHDP comme le PDCI-RDA que Guillaume Soro devenait un allié de choix.
Comme dans la fable de la tortue et du Scorpion, c’est la nature du président du Comité politique qui pose problème. S’il a quitté Gbagbo hier pour Ouattara, ce n’est certainement pas pour venir soutenir Bédié aujourd’hui pour le porter au pouvoir. D’ailleurs, ils ont partagé ce pouvoir avec Ouattara pendant 8 ans. N’oublie pas l’objectif du fauteuil.
Alors Affi Nguessan devenait l’option pour draguer un FPI malade de son unité. Mais l’acquittement de Laurent Gbagbo et de Blé Goudé a refait les cartes des alliances. La question du « vrai » FPI s’est résolue pour Bédié quand Affi N’guessan a manqué son rendez-vous de Bruxelles. Henri Konan Bédié était donc contraint de choisir. Laurent Gbagbo l’a finalement reçu le lundi 29 juillet 2019. Après avoir échangé pendant deux heures sur la situation politique et sociale de la Côte d’Ivoire, rien de concret n’a filtré au sujet d’une alliance qui semble difficile.
Peux-tu me dire comment des socialistes et des libéraux peuvent-ils cohabiter? De plus, la récente déclaration du secrétaire exécutif du PDCI-RDA, vient corser l’équation “Houphouët-Boigny avait 85 ans quand il a été réélu en 1990 (…) Ce qu’on a fait pour lui, si on veut on peut faire la même chose avec Bédié. Cela dépend de lui. S’il veut, on va avec lui (comme candidat) parce que c’est lui notre chef’’, a déclaré Maurice Kakou Guikahué, lors d’une réunion publique avec les militants de son parti à Daoukro (centre), bastion du président du PDCI-RDA.
Bédié veut-il une coalition autour de sa personne? Tout compte fait, cette déclaration sera moyennement appréciée par ceux que le PDCI-RDA appelle dans une alliance. Car même si Laurent Gbagbo ne se prononce pas, l’allégeance de Blé Goudé en dit long sur ses intensions de retour au pouvoir. En attendant, peux-tu demander à Affi N’guessan s’il a mesuré les conséquences de la déclaration suivante: « Nous avons été sollicités par le gouvernement pour désigner un représentant à la CEI, nous avons répondu que nous ne nous sentons pas concernés. Parce que cette loi ne correspond ni à l’esprit, ni à la lettre de la réforme telle que sollicitée ».
A Bientôt