L’ex-chef de milice Amadé Ourémi comparaît ce mercredi 24 mars 2021 après-midi, dans le cadre de l’affaire relative aux massacres perpétrés à Duékoué lors de la crise militaro-politique de 2010-2011.
Côte d’Ivoire: Le procès des massacres de Duékoué s’ouvre ce mercredi; Amadé Ourémi, seul accusé
Ce mercredi 24 mars 2021, s’ouvre devant la Cour d’ Assises d’ Abidjan, le procès des massacres perpétrés à Duékoué et environs, durant la crise post-électorale de 2010-2011. À la barre, est appelé à comparaître un seul accusé. Il s’agit de l’ex-chef milicien d’origine burkinabè, Amadé Ourémi, en dépit de l’ampleur et de la gravité des faits.
Les faits remontent au mois de mars 2011 où une offensive militaire des forces de la rébellion armée de Guillaume Soro, soutien du président déclaré élu par la Commission électorale indépendante (CEI), Alassane Ouattara, a tenté de déboulonner Laurent Gbagbo qui s’accrochait au pouvoir. Si l’ensemble du territoire ivoirien a été le théâtre de combats entre forces pro-Ouattara et pro-Gbagbo, l’ouest du pays a été particulièrement touché.
Plusieurs centaines de personnes dont au moins 800 dans le seul quartier de Duékoué carrefour, ont perdu la vie, selon des rapports accablants d’organisations internationales de défense des droits de l’homme.
« Les forces loyales au président élu Alassane Ouattara ont tué des centaines de civils, violé plus de 20 femmes et filles perçues comme appartenant au camp de son rival, Laurent Gbagbo, et incendié au moins 10 villages dans l’ouest de la Côte d’Ivoire », déclarait Human Rights Watch, dans un rapport publié en avril 2011.
« Dans un cas particulièrement atroce, des centaines de civils de l’ethnie Guéré, perçus comme des partisans de Laurent Gbagbo, ont été massacrés dans la ville de Duékoué, dans l’ouest du pays, par un groupe constitué de diverses forces pro-Ouattara, dont des unités des Forces Républicaines, lesquelles sont sous le haut commandement du Premier ministre d’Alassane Ouattara, Guillaume Soro », poursuivait l’organisation internationale de défense des Droits de l’Homme, dans son rapport.
« Ce n’est pas en tuant et violant des civils, que les forces d’Alassane Ouattara devraient mettre fin à ce conflit (…) Il faut, pour que la Côte d’Ivoire puisse émerger de cette effroyable période, qu’ Alassane Ouattara respecte son engagement public d’enquêter sur les violences perpétrées par les deux parties et de poursuivre leurs auteurs en justice», avait enfoncé Daniel Bekele, directeur de la division Afrique à Human Rights Watch, dans ledit rapport.
Au lendemain de sa prise de fonction, en avril 2011, après la chute de Laurent Gbagbo, le président Ouattara avait lui-même promis que la justice ivoirienne jugerait « tous ceux qui ont commis des crimes de la même manière ».
Sauf que durant ces 10 dernières années, cette justice ivoirienne a semblé s’acharner sur le seul camp des partisans du président déchu Laurent Gbagbo au point où certaines voix s’élevaient sans cesse pour dénoncer « une justice des vainqueurs ».
La comparution d’Amadé Ourémi, un début de justice pour les milliers de victimes Wê
C’est le 18 mai 2013 que le tristement célèbre chef de milice, Amadé Ouérémi, qui sévissait depuis des années dans l’ouest de la Côte d’Ivoire, a été arrêté. Il aura fallu du temps et des exactions.
Mais l’ancien supplétif des FRCI, après son arrestation, n’ avait exprimé un seul regret : «En octobre dernier, j’ai fait la promesse de partir après la grande récolte de cacao, mais la petite traite a tellement donné que je suis retourné dans la forêt. Je regrette mon attitude, j’ai commis de graves erreurs », avait-il expliqué, contris, après son arrestation, dans un article publié par Jeune Afrique.
Après 8 ans de détention, l’ancien chef milicien devrait comparaître devant la Cour d’ Assises d’ Abidjan, pour les exactions commises dans la région de Duékoué.
Un procès qui pourrait être perçu comme un debut de justice pour les milliers de victimes wê, sauf que le sieur Amadé Ourémi sera le seul à comparaître dans le box des accusés.
Une situation que déplore Issiaka Diaby, président de la coalition des victimes de la crise ivoirienne de 2010-2011, dans une publication sur son compte Facebook.
« Ouverture d’un procès (…) mercredi 24 mars au tribunal d’Abidjan Plateau où comparaîtra malheureusement un seul accusé en la personne de Amadé Ouérémi malgré l’ampleur et la gravité des crimes commis », a-t-il dénoncé.
« Aussi, en dépit de nos actions, l’éventualité d’un déficit quant à la participation voire massive des témoins et des victimes à ce procès, soulève actuellement nos inquiétudes », a-t-il déploré.
L’ouverture de ce procès à Abidjan, faut-il le rappeler, intervient alors que la chambre préliminaire II de la CPI se préparerait à ouvrir l’affaire concernant les crimes attribués au camp Ouattara lors de la tragique crise militaro-politique de 2010-2011.
La crise de 2010-2011 a fait au moins 3000 morts, selon un bilan officiel des Nations-Unies. Jugés par la Cour pénale internationale, pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité, Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé ont été acquittés et pourraient rejoindre la Côte d’Ivoire les jours à venir si l’appel interjecté contre leur acquittement, est rejeté par la Chambre d’appel.