Trois coups d’État dans trois pays d’Afrique dans la même année, cela devient de trop en ce troisième millénaire. Le recul de la démocratie au Tchad, au Mali et en Guinée donne de réfléchir dans un continent qui cherche jusque-là ses marques.
Quand l’armée flirte avec le pouvoir en Afrique…
Pluie de condamnations à la suite du coup d’État perpétré contre Ibrahim Boubacar Kéita, le 19 août 2020. La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) avait alors pris de nombreuses sanctions contre la junte militaire, tout en les appelant à céder le pouvoir aux civils.
En dépit des multiples restrictions qui leur étaient imposées, le colonel Assimi Goita et ses compagnons du Comité national pour le salut du peuple (CNSP) ont parachevé leur coup en déposant à nouveau Bah N’Daw, le président de la transition, ainsi que son Premier ministre Moctar Ouane. La communauté internationale est à nouveau montée au créneau pour prendre un régime de sanctions contre les putschistes, avant de leur lancer une mise en demeure quant au respect du chronogramme, déjà établi, d’un retour à l’ordre constitutionnel au Mali.
La situation sociopolitique au Mali n’a pas encore trouvé une issue qu’au Tchad, les rebelles du Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (FACT) font passer de vie à trépas le Président Idriss Déby Itno. C’était le 19 avril dernier, au cours d’une rencontre entre l’armée tchadienne et les forces rebelles en vue de trouver une issue quant à la bataille armée qui est survenue dans le sillage de l’élection présidentielle. Un Conseil militaire de transition dirigé par le général Mahamat Idriss Déby Itno, fils du président décédé, avait alors été mis en place pour diriger la transition tchadienne.
La Guinée vient par ailleurs rallonger la liste des pays africains qui ont subi un coup de force, en cette année 2021. Le dimanche 5 septembre, le président Alpha Condé a en effet été déposé à la suite d’une mutinerie, qui a éclaté très tôt le matin, aux abords du palais présidentiel. Dès sa prise de pouvoir, le Colonel Mamady Doumbouya, commandant des Forces spéciales, a annoncé la dissolution des Institutions de la République, ainsi que la mise en veilleuse de la Constitution. En dépit des vagues de condamnations qui fusent çà et là, le nouvel homme fort de Conakry, ancien légionnaire français, semble rester droit dans ses bottes.
En cette même année 2021, la tension politique était à son comble en Tunisie, où le président Kaïs Saïed a suspendu le parlement pour 30 jours. Suspension qui a été interprétée par beaucoup d’observateurs comme un coup de force. Un peu plus tôt en novembre 2017, c’était Robert Mugabé qui abdiquait au Zimbabwe, sous la pression de l’armée. Que dirait-on de Blaise Compaoré qui a lâché du lest à la suite d’une insurrection populaire soutenue par l’armée, après 27 ans passés au pouvoir ? Le coup d’Etat perpétré par le Général Robert Guéi sur Henri Konan Bédié, le 24 décembre 1999, avait alors annoncé les couleurs du troisième millénaire.
« Depuis les années 1950, il y a eu un total de 204 coups d’État – réussis ou non – en Afrique, selon des données compilées par deux politologues américains, Jonathan Powell et Clayton Thyne, qui sont respectivement de l’Université de Floride centrale et de l’Université du Kentucky (Etats-Unis) », apprend-on dans un dossier de BBC Afrique produit en janvier 2019. Avec ces statistiques à couper le souffle, c’est à croire que l’Afrique, Berceau de l’humanité, peut désormais être rebaptisée « berceau des coups d’État », tant la liste des pays qui ont subi ces coups de force, depuis les années d’indépendances en 1960, semble interminable.