La relance du dialogue politique a réuni, jeudi 16 décembre 2021, les acteurs politiques ivoiriens. Pascal Affi N’Guessan, président du FPI et premier responsable de la plateforme Alliance des Forces Démocratiques (AFD-CI), qui a pris part à ce rendez-vous, a produit un communiqué relativement à cette rencontre. Selon le président du Front populaire ivoirien, cet exercice doit être conduit sans esprit de vengeance.
Affi N’guessan (FPI) : « Nous accueillons cette rencontre comme une formidable opportunité de paix »
Je voudrais d’emblée vous exprimer ma satisfaction, celles du Front Populaire Ivoirien et de l’Alliance des Forces Démocratiques (AFD-CI), de la reprise du dialogue politique entre le Gouvernement et les partis politiques, dont en particulier ceux de l’opposition. Nous accueillons cette rencontre comme une formidable opportunité de paix et de progrès pour notre pays et donc comme une chance qu’il nous appartient de savoir saisir. C’est ce que nos compatriotes espèrent de nous. Dialoguer c’est d’abord reconnaitre l’existence d’une divergence, d’une contradiction et la nécessité de la résoudre. Dialoguer c’est faire le choix du règlement pacifique des contradictions, des conflits, contre la voie de l’affrontement et de la violence. Dialoguer enfin, c’est prendre en compte l’autre, sa spécificité, ses préoccupations, ses attentes ; c’est se disposer au compromis.
C’est pourquoi, nous tenons tout d’abord à saluer cette initiative qui s’inscrit dans la volonté du président de la République et du gouvernement d’œuvrer à la réconciliation de tous les enfants de notre pays, à la décrispation durable du climat politique et au renforcement de la cohésion nationale. Des actes ont déjà été posés : la loi d’amnistie en faveur des détenus de la crise post-électorale de 2010-2011 ; des mesures d’apaisement à la suite de la désobéissance civile et de la crise électorale de 2020. Les questions qui nous opposent sont connues, diagnostiquées, documentées, consignées. Je forme l’espoir qu’ensemble, nous sachions ouvrir une nouvelle page pour enfin solder le cycle de trois décennies de violence, de méfiance réciproque, de douleurs et de deuils. Il n’y a pas de fatalité. Si nous le voulons avec la même sincérité et une commune détermination, la Côte d’Ivoire retrouvera le chemin de la stabilité politique et de la cohésion sociale.
» Nos compatriotes attendent de nous la construction d’une vraie nation, unie dans sa diversité »
Le Front Populaire Ivoirien ( FPI ) et l’Alliance des Forces Démocratiques (AFD) sauront se hisser à la hauteur de cet enjeu. Depuis 30 ans, notre histoire est brutale. Depuis 30 ans, nos compatriotes subissent les conséquences de notre incapacité collective à leur offrir cet environnement de paix et de stabilité qui doit permettre l’épanouissement de chacun d’entre eux et le rayonnement de notre pays. C’est pourtant la raison d’être des leaders politiques. Depuis 30 ans, notre histoire a creusé des fossés, bâti des murs de mésentente et parfois de haine. Notre histoire n’est pas à l’image de ce que nous sommes. Notre histoire ne reflète pas l’identité profonde de la Côte d’Ivoire. Elle ne répond pas davantage aux aspirations de nos compatriotes, un peuple épris de paix.
Nos compatriotes attendent de nous la construction d’une vraie nation, unie dans sa diversité, confiante en ses institutions, un pays modèle, un pays moteur pour le reste du continent. Aujourd’hui, le contexte international et Sous-régional ne nous laisse en réalité plus le choix. Il nous impose de faire preuve d’esprit de responsabilité et de dépassement. La menace terroriste nous oblige à faire bloc. Elle nous incite à la cohésion, au rassemblement autour de l’essentiel, l’intérêt de la Côte d’Ivoire. Si nous ne sommes pas au rendez-vous de l’histoire, nous risquons la déstabilisation de notre pays, la dislocation de notre Nation si fragile, encore en construction. Nous risquons des périodes plus noires encore que celles que nous avons traversées. Il y a urgence. Nous devons répondre présents au rendez-vous de l’histoire.
» Nous devons adopter, pour les futures élections, un cadre inclusif et accepté par tous »
Être au rendez-vous de l’histoire, c’est mesurer les enjeux institutionnels, politiques, diplomatiques, économiques, sociaux et sécuritaires de notre dialogue. Mesurer les enjeux et savoir trouver entre nous la force du consensus sur l’essentiel. L’essentiel, c’est pour le Front Populaire Ivoirien l’affermissement de la démocratie, la réconciliation nationale et la cohésion sociale. Être au rendez-vous de l’histoire, c’est donc en premier lieu œuvrer à l’affermissement de la démocratie. Nous ne sommes pas condamnés à ce que nos scrutins présidentiels se transforment systématiquement en crises électorales. Ce dialogue politique doit nous donner les moyens de désamorcer tout risque de voir de tels schémas se reproduire dans l’avenir. Nous devons le faire dès maintenant. Nous devons adopter, pour les futures élections, un cadre inclusif et accepté par tous, qui garantisse la sincérité du scrutin et donc une confiance en nos institutions. Toute une série de questions ont déjà été identifiées et doivent faire l’objet d’un consensus : le code électoral, la liste électorale, la composition de la CEI, le découpage électoral, le mode de scrutin, etc.
Une Nation plus forte, c’est l’assurance de ne jamais avoir dans notre pays de prisonniers d’opinions ; c’est se montrer fidèle à la lettre de notre Constitution qui proclame qu’aucun Ivoirien ne peut être contraint à l’exil. Nous attendons de ce dialogue l’engagement en faveur de la libération des derniers prisonniers d’opinion et le retour de tous les exilés. Être au rendez-vous de l’histoire, c’est aussi réussir notre réconciliation nationale. Pour nous, la réconciliation constituera le socle de la fondation de cette Nation ivoirienne que j’évoquais il y a quelques minutes, une Nation unie et rassemblée autour des valeurs de la République, au service de la paix et du développement. La réconciliation passe par l’expression de toutes les douleurs, la prise en compte de toutes les victimes, la reconnaissance solennelle par la Nation de toutes les souffrances.
« Pour le FPI et l’AFD-CI, cet exercice doit être conduit sans esprit de vengeance ou de revanche »
Pour le FPI et l’AFD-CI, cet exercice doit être conduit sans esprit de vengeance ou de revanche, mais avec une volonté partagée de justice et de réparation, sur le plan matériel, mais aussi symbolique et moral. La libération des mémoires délivrera définitivement la Côte d’Ivoire de tout ressentiment et donc de tout sentiment de haine. Être au rendez-vous de l’histoire, c’est enfin consolider notre cohésion sociale. Elle est la condition de l’harmonie entre les différentes communautés qui composent notre pays, du vivre ensemble dans le respect les uns des autres. Elle impose une meilleure valorisation des différentes coutumes et traditions et une totale impartialité de l’État dans le traitement réservé aux uns et aux autres, quelles que soient leurs origines ethniques ou géographiques. Elle permet la projection dans un avenir partagé.
Si nous sommes au rendez-vous de l’histoire, nous pourrons partager une immense fierté, la fierté d’avoir, ensemble, renforcé notre pays, son image, son rayonnement, son attractivité. Soyons en sûrs : une Côte d’Ivoire apaisée, réconciliée et plus démocratique, c’est la garantie de la respectabilité et de l’influence. C’est une voix qui portera davantage encore, c’est la possibilité pour nos cadres de haut niveau d’être plus facilement cooptés dans les grandes institutions mondiales. C’est une assurance de stabilité pour les investisseurs internationaux, et donc un facteur de développement et de progrès. C’est un pays plus solide et moins fragile en termes de sécurité. Un pays rassemblé sur l’essentiel offre moins de prises aux tentations de l’extrémisme et aux dérives individuelles. Alors, donnons cette chance à la Côte d’Ivoire. Ce n’est pas faire preuve d’un héroïsme particulier, c’est simplement nous montrer à la hauteur de ce que le pays attend de nous. Soyons, ensemble, à la hauteur de ce que notre pays attend de nous.