Alors que sa candidature à l’élection présidentielle de 2025 en Côte d’Ivoire, est de plus en plus évoquée ou réclamée (c’est selon), Tidjane Thiam, lui, préfère d’abord se construire un réseau d’influence. Sans trop penser à un quelconque avenir politique. Dans un entretien accordé à Hichem Ben Yaïche, l’ancien Directeur démissionnaire du Crédit Suisse, présenté comme un technocrate émérite, s’est prononcé sur son avenir politique. Ci-dessous, de larges extraits de son interview.
Tidjane Thiam: « Si nous sommes moins avancés que les autres, ce n’est pas en travaillant moins que nous arriverons à les rattraper»
En soi, la satisfaction est toujours à combattre et je reste un éternel insatisfait, pas seulement sur l’Afrique. L’insatisfaction est l’un des moteurs les plus puissants de l’évolution ! Au contraire, nous devons aller plus vite que les autres. Si nous sommes moins avancés que les autres, ce n’est pas en travaillant moins que nous arriverons à les rattraper et encore moins à les dépasser. Cela dit, il faut une saine appréciation des choses et savoir motiver sans décourager. Pas de complaisance donc mais il faut aussi savoir apprécier, compte tenu des défis auxquels ont été confrontées les générations précédentes, le chemin qu’elles ont permis à l’Afrique de parcourir et qui demeure important.
Ce qu’il pense de la dette africaine
Sur le long terme, la seule solution à la dette est la croissance et celle-ci viendra des éléments dont je viens de vous parler. Regarder la dette, c’est souvent regarder le symptôme plutôt que le mal. La dette n’est pas mauvaise en soi si on a assez de croissance et qu’on la rembourse. Tous les États qui ont fait leur décollage économique se sont endettés à un moment parce qu’ils avaient besoin d’un capital supérieur à leurs capacités d’épargne propre. L’obsession, ce doit être la croissance économique. Dans ce contexte, il faut à tout prix obtenir une meilleure mobilisation des ressources domestiques des économies africaines.
Le développement d’institutions financières locales et en particulier celui de systèmes de retraite par capitalisation, compte tenu de la jeunesse de la population sur le continent, sont essentiels pour financer et stimuler l’investissement. La croissance économique est un impératif d’autant plus important pour l’Afrique que la croissance démographique y est très élevée. C’est un peu moins le cas maintenant, mais à l’époque où il y avait 3,8% de croissance démographique en Côte d’Ivoire, chaque année où la croissance économique annuelle était inférieure à 4%. On reculait ! C’est quand même extraordinaire alors qu’avoir 4% de croissance est une très bonne performance économique. Cette pression supplémentaire en Afrique est réelle mais, la Chine l’a montré, il est possible d’avoir une croissance explosive et ce pendant longtemps.
Vers une reconversion dans la politique ?
Non, je préfère vraiment m’en tenir, pour l’instant, à ce que je connais. Je suis assez occupé comme cela et j’arrive à parler à tout le monde et à être écouté, ce qui est un avantage. Mon objectif pour l’instant est d’avoir de l’influence. Pour le reste, l’avenir nous le dira.