A quoi sert de doter un pays de constitutions nouvelles tandis qu’il est couramment confronté aux coups d’Etat où les institutions de la République sont régulièrement dissoutes ?
La junte militaire veut doter le Mali d’une nouvelle constitution
Même si rien n’interdit à ce que le législateur modifie, complète ou abroge les dispositions législatives antérieures, le droit de l’État, cependant, doit se concilier avec l’Etat de droit. En principe, la souveraineté du peuple ne peut être entamée que par le peuple lui-même. Ce que le peuple a fait, il lui appartient, de le défaire, en retour. En revanche cela ne doit pas se faire avec un pistolet sous la tempe. Toute constitution étant une œuvre humaine, elle est faite pour régler un problème politique, pour être adaptée à l’évolution de la société, et doit être parfaitement conforme à l’Etat de droit; où les procédures sont respectées et que la révision s’effectue dans les formes républicaines.
Quelle est la forme républicaine qui sous-tende la décision des putschistes ? Le pouvoir militaire Malien, en se basant sur le pouvoir de révision ou de modification, veut procéder à des modifications constitutionnelles pour des intérêts de toutes sortes voire de se réinstaller ou se pérenniser au pouvoir en se débarrassant des braies militaires pour amadouer la conscience collective. Cette modification constitutionnelle peut représenter un danger pour le processus et la consolidation de la démocratie au Mali. Elle est aujourd’hui un des enjeux pour la lutte pour le pouvoir. Si à chaque putsch chacun veut modifier la constitution pour s’assurer un avantage décisif dans l’accession ou le maintien aux commandes de l’Etat, la démocratie peut encore attendre longtemps.
Le principe de l’alternance politique sera inéluctablement affecté. Tant que les uns et les autres seront prompts à tordre le cou à la Constitution en opérant des coups d’Etat militaires, la démocratie sera toujours malmenée sous nos tropiques. Pour inverser la tendance, il ne s’agit pas forcément de mettre en place de nouvelles Constitutions de manière intempestive, mais de faire en sorte que personne n’ait le droit de piétiner la Constitution en toute impunité. La plupart des constitutionnalistes, estime que les changements faciles et intempestifs de la Constitution, créent une instabilité institutionnelle, mettant à mal l’Etat de droit et la démocratie. « Les pays africains ont besoin d’institutions fortes et non d’hommes forts», dixit Barack OBAMA.
Idriss DAGNOGO