Au Kenya, William Ruto succède à Uhuru Kenyatta. Qui est cet homme parti de rien pour devenir vice-président de la République et accéder à la Magistrature suprême?
William Ruto: Un ancien vendeur de poulets dans le fauteuil présidentiel au Kenya
Aujourd’hui une des plus importantes fortunes du Kenya, cet ancien vendeur de poulets a été déclaré vainqueur de l’élection présidentielle et devient le cinquième chef d’Etat du Kenya. Il était l’ancien bras droit avant d’être déshérité par Uhuru Kenyatta.
A 55 ans, l’ambitieux William Ruto, malgré son statut de vice-président, faisait figure de challenger durant la campagne électorale face à Raila Odinga, 77 ans, le vétérant soutenu par le président sortant au scrutin présidentiel.
Le vice-président sortant William Ruto a été déclaré lundi vainqueur de l’élection présidentielle du 9 août, dans une ambiance chaotique marquée par des désaccords au sein de la Commission électorale et l’éruption de violences localisées.
A l’issue d’un scrutin pacifique et d’une interminable attente de six jours, celui qui faisait figure de challenger a cumulé 50,49% des voix contre 48,85% pour son principal rival, l’ancien opposant historique Raila Odinga soutenu par le pouvoir, selon le président de la Commission électorale (IEBC), de laquelle se sont désolidarisés la majorité de ses membres.
Qui est William Ruto ?
La vie de William Ruto, commencée dans les zones rurales de la vallée du Rift, dans l’ouest du Kenya, est tout un enseignement. Un modèle de courage et de détermination pour quiconque veut passer de la rue à la présidence de la République.
C’est à l’âge de 15 ans qu’il va porter sa première paire de chaussures après avoir été à l’école primaire pieds nus. Il a également vendu des poulets et des arachides au bord de la route dans les zones rurales de la vallée du Rift.
C’est ce jeune homme téméraire, convaincu que la misère n’est pas une fatalité, va se donner les moyens de changer le visage du Kenya. Réinventer un pays où le taux officiel de chômage des personnes âgées de 18 à 34 ans est de près de 40 %.
William Ruto va donc inventer l’expression « Hustler nation » pour désigner les jeunes qui ont du mal à joindre les deux bouts.
Il se lance dans la politique en 1992, après avoir été encadré, dit-il, par le président de l’époque, Daniel Arap Moi. Il faisait partie des militants chargés de mobiliser les électeurs pour les premières élections multipartites du pays, organisées la même année.
Il se taille la réputation d’être un orateur puissant qui attire des foules immenses lors des rassemblements, et d’être très performant lors des interviews avec les médias.
Il commence souvent son discours en disant « Mon ami », ce qui l’aide à établir un rapport avec les électeurs et à désarmer les critiques.
M. Ruto a promis une approche ascendante de l’économie, affirmant qu’elle bénéficierait aux pauvres qui supportent le poids de la crise du coût de la vie qui a frappé le monde.
En 2012, la Cour pénale internationale (CPI) annonce des poursuites à l’encontre les deux hommes pour les violences postélectorales de 2007-2008, qui ont principalement opposés Kalenjin et Kikuyu et qui ont fait 1200 morts. Candidat à la présidentielle suivante, en 2013, Ruto s’allie alors à Kenyatta.
Les deux ennemis scellent ainsi une paix fragile entre leurs ethnies respectives et font bloc face à la CPI. Le ticket « UhuRuto » rafle la magistrature suprême, les charges contre Kenyatta sont abandonnées en décembre 2014, celles contre Ruto en avril 2016, non sans que plusieurs témoins aient subi une campagne d’intimidation.
A l’occasion de la présidentielle d’août 2017, la victoire à l’élection de Uhuru Kenyatta et son colistier William Ruto à un second mandat est invalidée par la Cour suprême face à Raila Odinga.
Kenyatta sera finalement réélu à l’issu d’un remake controversé et boycotté par Odinga. Une séquence durant laquelle Ruto est apparu comme l’un des seuls en mesure de tenir la maison présidentielle. Au sortir du scrutin, le « colistier » fait plus que jamais figure d’héritier
Cinq ans plus tard, alors qu’il s’était d’abord engagé à soutenir son colistier à la présidentielle de 2022, le président sortant a finalement choisi de se ranger du côté de son ancien opposant, Raila Odinga. Au risque de réveiller le spectre des violences post-électorales de 2007-2008.
L’alliance contre nature tourne au ridicule. William Samoei Ruto devient le cinquième président du Kenya.