Une fois encore, la Radiodiffusion télévision ivoirienne (RTI) sera aux abonnés absents pour un événement aussi important pour les amoureux du football, que sont les qualifications pour la phase finale de la coupe du monde 2026.
Le cas de la RTI n’est pas singulier…
Les Ivoiriens ne décolèrent pas depuis qu’il est acquis que leur télévision nationale n’a pas pu s’octroyer les droits de retransmission des matches des Éléphants, comme ce fut le cas de la coupe du monde de football 2022 au Qatar.
Leur colère est d’autant plus compréhensible, que c’est la deuxième fois depuis des années, que la télévision ivoirienne ne sera pas au rendez-vous d’un événement aussi important, depuis 2011.
C’est à juste titre que nombre de ces Ivoiriens se demandent à quoi sert la redevance qu’ils payent, à leur corps défendant, à cette entreprise publique.
À cause de la vacuité de ses programmes, la RTI est surnommée par les Ivoiriens dans leur humour caustique « la chaîne des grands énervements », en parodiant un de ses slogans d’il y a quelque temps : « la chaîne des grands événements ». D’autres iront plus loin en l’affublant désormais du surnom de, « Sous le haut parrainage… ».
Ce saut d’humeur est exacerbé par le fait qu’une chaîne privée, moins expérimentée que la RTI, ait pu s’offrir ce privilège, avec tout ce que cela comporte comme gains, sans que les responsables de la télévision nationale ou toute autre voix autorisée aient eu l’élégance et la courtoisie de donner des explications satisfaisantes aux Ivoiriens. Ils acceptent difficilement cette situation, d’autant plus que tout près de chez eux, des chaînes nationales diffuseront les matches pour le bonheur des populations.
En l’absence d’explications satisfaisantes données par les responsables de la RTI en dépit d’un communiqué laconique, les ivoiriens se perdent en conjectures et se posent mille et une questions, dont :
– Le fait que NCI, l’une des deux chaînes privées du pays ait pu obtenir ces droits, comme l’année dernière pour la coupe du monde au Qatar, signifie-t-il que cette entreprise a une assise financière et technique supérieure à la RTI ?
– Ou a-t-elle bénéficié de passe-droit pour supplanter la RTI ?
Cet épisode de notre histoire contemporaine met en évidence ce qui est de la vie de nos entreprises publiques, soumises à la concurrence avec des entreprises privées.
Le cas de la RTI n’est pas singulier. La Sotra, la société de transport public, vit également cette concurrence pour une partie de ses activités : le transport lagunaire.
La spécificité des entreprises privées en concurrence avec les deux entreprises publiques, c’est qu’elles appartiennent dans leur entièreté ou pour une bonne part, à des personnes qui sont ou qui gravitent autour du pouvoir, certaines, figurant même parmi les décideurs de ce pays.
Dans ce cas de figure, la concurrence peut-elle être saine et loyale ?
Des pressions ne sont-elles pas s’exercer sur les entreprises publiques au bénéfice de la concurrence ?
Rien pour le moment ne permet de l’affirmer.
Toutefois, des questions se posent quant aux choix stratégiques de la RTI et de la Sotra, pour tenir la concurrence et offrir des services de qualité aux consommateurs.
On note à la Sotra, un vieillissement des bateaux et des installations, notamment les quais, qui sont dans un état de délabrement avancé. Comment peut-elle dans ce cas, tenir la concurrence, si des investissements ne sont pas faits pour renouveler le matériel roulant ou réhabiliter les installations ?
Certes on applaudit le tarif social appliqué par cette entreprise pour le bonheur des élèves et des étudiants, mais cela ne suffit pas.
Les mauvaises langues affirment que certains auraient voulu voir la Sotra dans sa composante transport lagunaire, s’écrouler pour laisser la latitude aux entreprises privées appartenant à des barons du régime d’occuper ce secteur dans son entièreté.
Ceci expliquerait cela.
La RTI ne vit pas autre chose. De nombreux agents de cette chaîne de télévision ont été débauchés et se sont retrouvés sur les chaînes concurrentes.
Alors que les Ivoiriens sont connus pour être friands des débats, surtout politiques, ils en sont sevrés par la RTI. Les deux autres chaînes privées s’y adonnent à cœur joie et ne cessent d’étendre leur influence, là où de nombreux Ivoiriens déçus du contenu des programmes qu’offre la RTI ont décidé de lui tourner le dos. La non-réaction des responsables de la RTI face à cet état de fait est difficilement compréhensible. Impuissance ? Contraintes ? Ou volonté délibérée ?
En tout état de cause, l’ouverture à la concurrence ne peut qu’être saluée. Elle permet aux consommateurs d’avoir le choix de leurs consommations, mais devrait pouvoir obliger les entreprises publiques à proposer des produits de qualité afin de pouvoir exister.
C’est pourquoi, les entreprises publiques soumises à la dure concurrence, doivent être à mesure de faire les investissements nécessaires pour être à la hauteur des défis qui se posent à elles.
Ce qu’il est donné de voir relativement à la RTI et à la Sotra, laisse penser que ces deux entreprises ne font pas l’effort ou ne se donnent pas les moyens pour être à la hauteur du challenge qui leur est imposé à leur corps défendant. Le font-elles sciemment ou sont-elles contraintes ? On ne saurait le dire.
Si des entreprises publiques ont vu leurs secteurs d’activités libéralisés, et soumis à concurrence, le temps est venu pour mettre fin à la situation de monopole qui existe dans les secteurs de l’eau et de l’électricité.
Il est temps de libéraliser ces deux secteurs et trouver des concurrents à la Cie et à la Sodeci. Cela ne sera qu’au bénéfice des consommateurs ivoiriens, par la qualité du service fourni.
Ainsi va le pays.
Mais arrive le jour où l’ivraie sera séparée du vrai.