M’batto Bouaké, un paisible village de Bingerville, près d’Abidjan, en Côte d’Ivoire, est le théâtre d’un conflit foncier qui a laissé 550 acquéreurs dans une impasse désespérée. Ce drame, qui a débuté par un lotissement controversé, illustre les failles du système foncier ivoirien et l’incapacité des autorités à résoudre ce genre de litiges.
M’batto Bouaké : Plus de 500 acquéreurs dans la détresse, Bruno Nabagné Koné interpellé
Au cœur de cette tragédie se trouve un aménageur foncier qui, après avoir obtenu un accord avec les villageois propriétaires des terrains, a entrepris un lotissement. Lorsque le lotissement a été approuvé, l’aménageur a partagé les lots avec des paysans locaux. Certains paysans, tout comme l’aménageur, ont choisi de vendre leurs lots à des particuliers, notamment des salariés, des entrepreneurs et des retraités à la recherche d’un investissement.
Cependant, la situation a rapidement pris une tournure dramatique. Des groupes de villageois se sont opposés à l’aménageur, affirmant qu’il avait pris davantage de lots que ce qui avait été convenu lors du partage initial. Un long combat judiciaire a suivi, au cours duquel les villageois ont réussi à faire annuler le lotissement réalisé par l’aménageur.
Depuis lors, les terres concernées par cette décision de justice sont dans une impasse totale. Les acquéreurs, qui ont investi financièrement et émotionnellement dans l’achat de ces terres, se trouvent dans une situation précaire dans l’indifférence la plus complète du ministère ivoirien de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme de M. Bruno Nabagné Koné. Ils ne peuvent pas construire leurs biens, car les terrains sont maintenant gelés, et cela fait près de deux ans que leur avenir est en suspens.
La situation est d’autant plus préoccupante que de nombreuses personnes qui ont acheté ces terres ont contracté des emprunts importants pour financer leurs acquisitions. Les familles sont plongées dans l’incertitude, avec des dettes à rembourser et aucune perspective de développement sur ces terrains.
Les acquéreurs ont tenté de se réunir le 24 juin dernier dans la salle de fête du village M’batto Bouaké sur autorisation de la chefferie du dit village. Ils ont pour cela invité toutes les autorités ivoiriennes, La Présidence de Côte d’Ivoire, le Ministère de la construction et de l’urbanisme, celui de la Justice, la Préfecture, la Mairie et la chefferie villageoise. Ces différentes entités ont brillé par leur absence en plus du fait que les jeunes du village ont empêché la tenue de la réunion autorisée par leur chefferie. Des gendarmes dépêchés sur les lieux n’ont pu faire régner l’ordre malgré les différentes autorisations obtenues par le bureau du très dynamique président des acquéreurs, M. Martin A. Akpro, auprès des autorités de la ville et du village.
Les acquéreurs, dans un souci de préserver la paix, se sont repliés sur l’orphelinat de Bingerville pour y tenir leur réunion. De toutes les personnalités invitées, seul M. Edouard Anoman Badiglon, chef du village de M’batto Bouaké, a fait le déplacement pour apporter son soutien aux acquéreurs. Il a tenu un discours apaisé et montré une réelle volonté de trouver une issue favorable aux acquéreurs dans ce conflit foncier qui n’a que trop duré à ses yeux.
Totale indifférence du ministre ivoirien de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme
L’inaction et surtout le désintérêt des autorités compétentes, notamment le ministre ivoirien de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme, sont l’un des aspects les plus troublants de cette affaire. Malgré l’ampleur du problème et les conséquences graves pour les acquéreurs, aucune solution n’a été proposée ni mise en œuvre. Les plaidoyers en faveur de ces familles en détresse semblent être tombés dans l’oreille d’un gouvernement sourd.
Les deux principaux protagonistes de ce conflit, les plaignants villageois et l’aménageur semblent également peu préoccupés par le sort des acquéreurs pris au piège de cette situation. Leur inaction et leur incapacité à résoudre le litige ont laissé plus de 500 personnes dans une impasse sans fin.
Ce drame foncier de M’batto Bouaké révèle des lacunes profondes dans le système foncier de la Côte d’Ivoire. Il met en lumière les défis auxquels sont confrontés les acquéreurs lorsqu’ils investissent dans des terres sans garantie de sécurité foncière. Il souligne également l’importance d’une réforme foncière urgente pour résoudre ces conflits et protéger les droits des citoyens.
En fin de compte, il est impératif que les autorités prennent des mesures immédiates pour résoudre cette situation critique. Les 550 acquéreurs de M’batto Bouaké attendent désespérément une solution à leur calvaire financier et émotionnel. Il est temps que la justice (qui a annulé le lotissement) prévale en ce qui concerne le droit des acquéreurs et que des actions concrètes soient entreprises pour mettre fin à ce drame foncier qui n’a que trop duré.