La Côte d’Ivoire nouvelle ne finira pas d’étonner le monde. Sa principale caractéristique, c’est que toutes les grandes décisions, toutes les opérations qui ont une retombée sur le quotidien, l’avenir et le devenir des Ivoiriens, se prennent ou se font au pas de course. Cela se comprenait il y a quelque temps, car tous les obstacles devaient être levés avant que 2020 ne pointe son nez, année de notre émergence. Maintenant que nous y sommes de plain-pied, on comprend difficilement la célérité qui continue de présider à la prise des grandes décisions ou aux opérations qui impactent la vie des Ivoiriens.
Côte d’Ivoire : Pourquoi cet empressement dans l’organisation des sénatoriales ?
Pour rappel, c’est avec une célérité inouïe, que la Constitution, mère de la troisième République, sortie de l’expertise de nos valeureux juristes, fut adoptée, votée et promulguée, sans que le temps ne soit laissé aux Ivoiriens de la lire, de la comprendre, de se l’approprier, de faire des critiques et des amendements avant d’aller voter. L’urgence du moment ne permettait pas cela !
Même ceux qui étaient chargés d’en faire la promotion auprès des populations n’avaient pas eux-mêmes une idée claire de son contenu.
Je me souviens de ce député de la Nation, qui, parti faire campagne pour le « oui » et à qui des questions furent posées sur le contenu du projet de la Constitution, n’a eu d’autre réponse que celle-ci : « Votez le oui seulement, après on viendra vous expliquer ». C’est tout dire !
Malgré tout, la loi fondamentale de la troisième République est advenue !
La mise en place de la deuxième chambre de notre parlement en 2018, le Sénat, n’a pas échappé à ce paradigme dans l’action. Une ordonnance, au lieu et place d’une loi, a été prise pour en définir la structuration, une semaine accordée aux candidats pour faire campagne, et après les élections, quelques jours ont suffi pour tenir la première session. 33 sénateurs sur 99 étaient absents au motif que ceux qui ont reçu l’onction divine pour en faire partie n’étaient pas encore…nommés.
On avait alors pensé que l’urgence qu’il y avait de se tenir prêt pour attendre 2020, année de l’émergence, était à l’origine de cette célérité dans l’action relativement au référendum pour l’adoption de la nouvelle constitution, et à la mise en place de la deuxième chambre de notre parlement ; les choses devant rentrer dans l’ordre après 2020, avec les effluves de notre émergence. Que nenni !
Le 2 septembre 2023, les Ivoiriens étaient appelés aux urnes, à l’effet de renouveler les instances dirigeantes de leurs communes et de leurs régions. Sans surprise, le RHDP s’est taillé la part du lion en remportant la majorité des communes et des régions.
Il reste entendu que des réclamations ont été faites par de nombreux candidats et portées à l’attention de l’arbitrage de la CEI. Ces contentieux en attente n’étaient pas encore vidés que l’organe en charge des élections, a programmé l’élection des sénateurs qui s’est déroulé le 16 septembre 2023 ; élection dont le collège électoral est composé de conseillers municipaux, de conseillers régionaux et de conseillers de districts.
Les observateurs de la vie politique en Côte d’Ivoire se posent de nombreuses questions légitimes :
Pourquoi cet empressement dans l’organisation des sénatoriales ? De toute évidence, il n’y a pas de feu en la demeure, puisque le parti au pouvoir n’avait aucun souci à se faire, ayant dans son escarcelle la majorité des communes et des régions.
Est-ce à dire que les contentieux sont devenus caducs ?
Est-ce un message subliminal de la CEI à l’endroit de ceux qui ont formulé des réclamations, pour leur faire intérioriser qu’il n’y aura pas de changements dans les résultats déjà donnés ?
Au cas où la CEI venait à vider effectivement les contentieux des régionales et des municipales, et que des reprises d’élections donnent lieu à des changements de vainqueurs, que pourra-t-on penser du vote de personnes qui ne sont plus des conseillers municipaux ou régionaux ?
Que dire de sénateurs élus par des personnes qui n’ont pas le droit de voter ?
Certes, le président de la CEI, M. Koulibaly Kuibiert a donné des explications sur ces élections, mais ses explications alambiquées n’ont convaincu personne.
Mais bon…Dieu reconnaitra les siens.
Ainsi va le pays.
Toutefois arrive le jour où l’ivraie sera séparée du vrai