Campagne électorale-Dans quelques heures, les électeurs ivoiriens prendront d’assaut les lieux et bureaux de vote pour désigner ceux des leurs qui prendront en main, la destinée de leurs communes et de leurs régions.
Municipales et régionales : Chronique d’une campagne électorale
Une semaine durant, et des semaines avant, Abidjan la capitale économique du pays s’était vidée d’une partie de sa population, partie à l’assaut des villes, villages et hameaux de l’intérieur du pays, pour faire la cour aux électeurs, gagner leur sympathie et partant, s’assurer leurs votes.
Les administrations ont fonctionné en mode ralenti, parce que directeurs, sous-directeurs, chefs de service ou simples agents se sont tous rués vers « l’or » que représente la voix des électeurs. Tous étaient partis en campagne électorale.
La particularité de ces élections, et qui a marqué de nombreux Ivoiriens, c’est la présence sur le starting-block de la majorité des membres du gouvernement, à commencer par le Premier ministre et des présidents d’institution. Ils sont tous à l’assaut, qui d’une mairie, qui d’une région.
Nombre d’entre eux sont déjà députés et on s’explique difficilement cette boulimie du cumul. Quoi que non interdit par la loi, il est vraiment indécent qu’un seul individu puisse être à la fois ministre, député, maire ou président de conseil régional. Quelle sera son efficacité dans les activités de chacune de ces entités, si tant est qu’elles adviennent concomitamment ? Mais qu’importe.
Le déferlement de ces hauts commis de l’État à l’intérieur du pays s’est également accompagné d’un déferlement de leurs véhicules de fonction ou de service, avec leurs plaques jaunes qu’on retrouvait dans les différents cortèges. Est-il permis d’utiliser les moyens de l’État pour des activités privées ? Bon…
La période de la pré-campagne et de la campagne électorales fut aussi une période où tout le monde était d’une gentillesse à couper le souffle ou à faire éternuer un bouc !
Tout le monde était gentil, affable, abordable, serviable à souhait et d’un commerce si facile !
On a même retrouvé un candidat en train d’aider une mère de famille à piler son foutou ! Que ne ferait-on pas pour s’assurer une voix ?
L’argent a aussi coulé à flot. Certains candidats étaient d’une telle générosité, qu’on se demande bien d’où ils ont tiré tout cet argent qu’ils distribuaient sans compter. Que dire des motos, des tricycles et autres matériels, distribués à tour de bras pour le bonheur des populations ?
Ces populations en extase, souhaitent que chaque jour de l’année soit un jour de campagne électorale, tant elles étaient l’objet d’attention particulière, tant une oreille attentive était prêtée à la moindre de leurs demandes.
Mais tous sont conscients qu’après le 2 septembre, la vie reprendra son cours normal, et peu sont les candidats heureux ou malheureux qui seront accessibles, et leur prêteront une attention. La vie est ainsi faite !
Des rencontres et des meetings de quelques candidats auxquels l’opportunité nous a été donnée d’assister, nous conforte à l’idée que « l’âge d’or » n’est pas pour demain. De deux choses l’une : soit ils méconnaissent le fonctionnement et le financement des collectivités territoriales, soit il s’agit d’un véritable « foutage » de gueule des populations, qu’on croit naïves et qui ne comprennent pas grand-chose.
La pauvreté des discours entendus le disputent à la démagogie et aux promesses farfelues qu’ils ne pourront pas tenir.
Ces candidats bâtissent des châteaux en Espagne, et gageons que leurs désillusions seront à la dimension des promesses farfelues faites, lorsqu’élus, ils seront confrontés à la dure réalité du fonctionnement des mairies et des conseils régionaux.
Ainsi on a entendu des candidats promettre la réforme de l’éducation dans leur région, comme si cela est dans leurs cordes. D’autres promettent le bitumage de tronçons de routes pour relier des villages de leur région. Comme si la plupart des budgets d’investissement des régions peuvent permettre de bitumer 2 km de route !
D’autres encore promettent d’aller à l’international rechercher des partenaires et des fonds pour impulser le développement, ignorant les balises et les garde-fous mis en place par la tutelle et qui étranglent toute action.
Certes, cela est possible, mais il faut savoir que l’État freine des quatre fers quand il s’agit d’emprunt extérieur des collectivités. Étant entendu qu’en cas d’insolvabilité, la responsabilité incombe à l’État.
Des candidats évoquent enfin leur proximité avec le pouvoir ou se disent envoyés par le président de la République, et il leur est donc possible de faire un lobbying pour obtenir des moyens additionnels, pour assurer le développement, que leurs adversaires de l’opposition ne pourront jamais obtenir.
Ce fut donc une véritable foire aux promesses qu’on sait objectivement ne pas pouvoir tenir. Mais qu’importe ?
L’essentiel est de marquer l’esprit des électeurs, en espérant que leur naïveté fera le reste, surtout que des babioles ont été distribuées !
Ainsi va le pays.
Et bonne chance à tous les candidats !
Mais arrive le jour où l’ivraie sera séparée du vrai.