Il y a quelques temps, le président français, M. Emmanuel Macron a effectué un voyage de trois (3) jours en Chine. Trois (3) raisons ont officiellement présidé à ce voyage : – La crise en Ukraine, où le président français espère voir la Chine peser de tout son poids pour infléchir la position de la Russie. – La lutte contre le réchauffement climatique – Les enjeux stratégiques de la zone indo-pacifique, pomme de discorde entre la Chine et les Etats-Unis et partant les alliés de ce dernier.
Visite du president Emmanuel Macron en Chine : les dessous d’un voyage
Bien entendu qu’il y a d’autres raisons, surtout économiques, puisqu’une flopée d’hommes d’affaires français était du voyage. Ce voyage s’est fait dans un contexte particulier et complexe. Il intervient à un moment où la Russie, alliée de la Chine, vient de prendre pour le mois d’avril, la présidence du Conseil de Sécurité de l’Onu, après qu’un mandat d’arrêt international a été lancé par la Cpi à l’encontre du président russe et malgré les grincements de dents des occidentaux et les cris de protestation du président ukrainien Volodymyr Zelensky.
Dans ce contexte décrit, il faut également adjoindre, la visite du président chinois, Xi Jinping en Russie, où ont été affirmées et magnifiées les relations entre la Chine et la Russie. On ne saurait non plus ignorer, la rude concurrence à laquelle la France doit faire face en Afrique, dans ce qui était jusque-là, son pré-carré. Parmi ses concurrents, figure en bonne place la Chine, qui est aujourd’hui le principal partenaire économique de nombreux pays africains.
Que cache réellement cette visite ?
Comme mentionné plus haut, le monde aujourd’hui, vit au rythme de l’évolution de la crise entre l’Ukraine et la Russie. Quelle que soit l’issue de cette crise, le monde entier sera impacté d’une façon ou d’une autre. De nombreux pays s’y préparent pour espérer en tirer un meilleure parti. Si de façon unanime, les pays occidentaux ont pris fait et cause pour l’Ukraine et mettent tout en œuvre pour la victoire de celle-ci, en imposant des sanctions de toutes sortes à la Russie, la Chine n’a ni condamné la Russie et encore moins ne l’a soumise à une quelconque sanction.
Bien au contraire, les relations entre les deux pays se sont renforcées. Il s’agit donc pour le président français de tenter d’éloigner Pékin de Moscou, de fragiliser leurs relations, d’affaiblir la Russie et de récupérer un membre important du Conseil de Sécurité de l’Onu. C’est une volonté manifeste d’isoler la Russie, ce qui l’affaiblirait et donnerait l’opportunité d’une solution à la crise ukrainienne. Ainsi affaiblie, la Russie ne pourrait non plus continuer de bouter la France hors de certains pays d’Afrique où elle régnait en maîtresse absolue.
Au nombre des non-dits de ce voyage, figure également une raison qui tient à cœur à la France. Pour le président français, il est d’une nécessité absolue de réduire la concurrence féroce que livre la Chine à la France en Afrique. La France n’a plus les moyens de soutenir une telle concurrence, et sa présence est de plus en contestée dans de nombreux pays africains. Les hommes politiques, les journalistes et autres analystes français ont tôt fait d’indexer « la propagande » chinoise, russe ou turque à l’origine de ce sentiment « anti-français ».
Mais la réalité est que la France n’a jamais changé les paradigmes de ses rapports avec les pays d’Afrique, et son économie en difficulté ne permet pas de tenir une concurrence au plan économique. Il est donc important pour M. Macron, au cours de ce voyage, d’obtenir d’importants contrats en chine, à l’effet de donner une bouffée d’oxygène à l’économie déclinante française. Des contrats ont pu être obtenus, comme celui d’Airbus, pour le bonheur du vaillant peuple français.
La Chine n’est donc plus dangereuse ?
Mais pour les Africains que nous sommes, des interrogations taraudent l’esprit. En effet, depuis la percée de la Chine en Afrique, des hommes politiques, des chefs d’entreprise, des journalistes et bien d’autres français, n’ont eu de cesse de mettre les africains en garde contre ce commerce avec la Chine. Il était demandé aux africains de se méfier de la Chine qui ferait main-basse sur leurs richesses et les réduirait en esclavage.
Bien plus, la France accuse la Chine de néocolonialisme, bien que ce pays n’ait pas de passé colonial sur le continent. Alors si les pays d’Afrique doivent se méfier de la Chine, qu’est ce qui fait courir la France au point de se plier en quatre pour avoir quelques contrats et une alliance stratégique ? La Chine n’est donc plus dangereuse ? Ou bien elle n’est dangereuse que lorsqu’elle est en relation avec les pays africains ?
Mais nul n’est dupe. La grande débauche d’énergie de la France, appuyée en cela par l’Union Européenne et certainement par les Etats-Unis, répond à des préoccupations existentielles. Il s’agit de mettre à mal la relation entre la Chine et la Russie, et éviter ainsi la naissance d’un bloc rival, et surtout les perspectives de naissance d’un monde multipolaire où l’hégémonie de l’occident serait conjuguée au passé.
A bien y regarder, c’est peine perdue. La Chine est bien consciente que si la Russie s’écroule, elle est le prochain pays qui serait dans le viseur des occidentaux. Elle n’oublie pas qu’elle est perçue comme « une menace systémique » pour les pays de l’Otan. De ce fait, cette politique de diviser pour régner ne saurait prospérer. Ainsi va le monde. Mais arrive le jour où l’ivraie sera séparée du vrai.