Lôh-Djiboua-Dans quelques mois, se tiendra l’élection couplée des municipales et des régionales pour désigner ceux qui vont conduire pour cinq ans, la destinée de nos villes et de nos régions.
Régionales dans le Lôh-Djiboua : La surprenante sortie des chefs traditionnels
Les états-majors des partis politiques fourbissent leurs armes et s’échinent à trouver les « meilleurs chevaux » à mettre sur le starting-block à l’effet de se donner les moyens de gagner.
Mais çà et là des grincements de dents sont notés. Un fait insolite a retenu l’attention ces derniers jours. Pour l’élection régionale dans le Lôh-Djiboua, le choix de la direction du RHDP (Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix) s’est porté sur le ministre Amédé Kouakou pour être le porte-étendard du parti.
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, un collectif de chefs de villages de la région, avec à sa tête le chef départemental Rabe Gervais, conteste ce choix, estimant entre autre, que M. Amédé Kouakou, député et ministre cumule déjà des postes, pour qu’il prenne encore la tête du conseil régional.
Si dans le fond, on peut comprendre la complainte des chefs, parce que toutes ces hautes fonctions pour un seul individu est véritablement indécent, et on doute fort qu’il soit efficace.
Mais dans la forme, on se demande bien ce que viennent chercher des chefs de villages dans un problème interne d’un parti politique ?
Chefs coutumiers ou militants du RHDP ?
Ces chefs sont-ils des militants actifs de ce parti ? Si oui, ils devraient être démis de leurs fonctions. Si non, ils devront observer en public le principe de neutralité dû à leur statut de chef. Et le silence de l’administration préfectorale est bien éloquent !
Mais on le comprend aisément. Sous le prétexte de bénéficier des « bienfaits du développement », les chefs de villages se sentent dans l’obligation de se passer des incompatibilités inhérentes à leur statut de chef et de soutien à un parti politique. Le devoir de réserve et l’obligation de ne pas afficher en public leurs choix politiques sont relégués aux calendes grecques.
Peut-on vraiment s’étonner de l’attitude de ces chefs ? Assurément non ?
On se rappelle qu’à la fin du deuxième et en principe dernier mandat de l’actuel chef de l’Etat, les responsables de la Chambre des rois et chefs de villages, ont été parmi les premiers à demander à celui-ci de solliciter un troisième mandat, au nom d’une prétendue stabilité et d’une prétendue paix à préserver. En le faisant, la Chambre des rois et chefs de villages, s’est éloignée du principe de neutralité et de l’équidistance à avoir en public par rapport à tous les partis politiques.
Tout ceci donne à croire que la Chambre des rois et chefs de villages est au service du parti au pouvoir, si elle n’est pas son bras séculier.
Fort de ce précédent, les chefs du Lôh-Djiboua, sans aucune gêne, peuvent s’opposer au choix d’un parti politique, comme le ferait n’importe quel militant de ce parti !
En se focalisant sur le choix du candidat du RHDP, et non ceux des autres partis, les chefs se font déjà à l’idée que celui-ci est assuré de gagner les élections. Comment peut-il en être autrement ?
Non contents de cette immixtion indécente dans les affaires internes d’un parti politique, les chefs du Lôh-Djiboua se sont encore ridiculisés en allant à Canossa. Ils se sont rendus au domicile du ministre Amédé Kouakou pour lui présenter leurs regrets, se dédire et surtout lui demander pardon pour leur prise de position en sa défaveur. Comment peut-on tomber aussi bas ?
Mais en réalité ces actes qu’ont posés les chefs du Lôh-Djiboua, les transhumances et les reniements qu’il nous est donné de voir, sont le résultat de messages subliminaux envoyés par les tenants du pouvoir, et qui sont désormais passés dans la conscience collective de nombreux Ivoiriens.
On se rappelle qu’en 2018, la ministre d’Etat, ministre des Affaires Etrangères, Mme Kandia Kamara à un meeting, a fait une scandaleuse exhortation à son auditoire. Elle a demandé aux populations de poser à chaque candidat qui viendrait les voir, la question de savoir s’il est « un bon petit » du président de la République ou du Premier ministre. Si c’est la négative, alors les populations devraient les huer et les chasser. Car élus, les candidats qui ne sont pas proches des autorités susmentionnées, n’auront pas les moyens pour mettre à exécution le programme pour lequel ils sont élus. Tout un programme !
C’est ce message à relent de chantage, qui a été intériorisé par de nombreux Ivoiriens, et qui explique le comportement de ces chefs, et leur fait parfois manger bien des totems.
Mais arrive le jour où l’ivraie sera séparée du vrai.