Il en va de la vie des hommes comme celle des partis politiques. La recherche du bien-être et de réponses aux nombreuses préoccupations existentielles qui les assaillent, les conduit à se fixer un but et des objectifs à réaliser pour y arriver. Mais il arrive que, las d’attendre des résultats probants qui ne viennent pas, fatigués de parcourir des chemins tortueux, parsemés d’embûches, et surtout las de tirer le diable par la queue, la solution souvent usitée, est de changer le fusil d’épaule ou d’explorer d’autres horizons. Pour les hommes politiques ivoiriens et leurs partis, le raccourci est vite pris de se renier, « de manger leur totem », en ralliant celui qui fut l’adversaire politique, qu’on a combattu de toutes ses forces : le Rhdp.
Côte d’Ivoire : La transhumance est-elle consubstantielle au cheminement des hommes politiques ?
C’est en ce moment qu’on les entend parler de paix et de stabilité du pays à sauvegarder, comme si intégrer ce parti en est la solution. C’est également en ce moment qu’on les voit découvrir les réalisations faites par le pouvoir, et sous le charme desquelles ils tombent. Mais en vérité, cela n’est pas nouveau. La transhumance semble être consubstantielle au parcours politique de certains de nos hommes politiques. Faut-il s’en étonner ? Assurément non.
L’inconfort du voyage dans le train de l’opposition, l’incertitude de ce que demain sera fait, et les difficultés liées au quotidien des opposants, ont très vite raison d’eux. Ils croulent sous le poids des responsabilités à assumer et à faire vivre leurs partis, ainsi que les nombreuses attentes de leurs militants qu’ils ont du mal à satisfaire. Nombre d’entre eux n’ont pas acquis la culture de l’opposition, au fil des obstacles franchis, des privations endurées et de l’humiliation qui est le quotidien de l’opposition.
L’existence de ces partis politiques et de leurs animateurs, est mue par la recherche du meilleur positionnement, qui leur permettra de tirer des dividendes dans l’immédiat, ou d’escompter en tirer dans un futur proche. Ainsi, peu avant la période de braise, période pré-électorale de 2020, des hommes politiques comme M. Marcel Amon Tanoh, avaient rejoint l’opposition, en espérant pouvoir inscrire leur nom au panthéon de l’histoire qui s’écrivait.
M. Mabri Toikeusse et son parti, l’Udpci, font le chemin retour pour se fondre dans le Rhdp
Nombreux étaient les ivoiriens qui avaient applaudi son discours à tout rompre, quand il intervenait au meeting de l’opposition au stade Félix Houphouët-Boigny, en octobre 2020. Mais après la parodie d’élection, et la reconduction de l’actuel chef de l’Etat pour le troisième mandat, M. Amon Tanoh est allé à Canossa, en se fendant d’une déclaration de reniement et de regret, pour les propos tenus au stade Félix Houphouët-Boigny et est retourné là d’où il est venu.
Peu après, un poste de Secrétaire Exécutif du Conseil de l’Entente l’accueillait ! On se souvient également de cet éminent professeur d’université, fondateur d’établissement, connu pour ses critiques et ses diatribes à l’endroit du pouvoir, rejoindre comme par magie le Rhdp. Les écailles sont tombées de ses yeux, mais a surtout eu sa révélation comme Saul (Saint Paul) sur le chemin de Damas, pour admirer l’énorme travail qu‘abat le pouvoir Rhdp et justifier son adhésion à ce parti.
Mais les mauvaises langues affirment que les impôts sont passés par là. Aujourd’hui, il nous revient que M. Mabri Toikeusse et son parti, l’Udpci, font le chemin retour pour se fondre dans le Rhdp. Parti qu’il avait quitté en raison du choix de feu Amadou Gon Coulibaly, avant sa mort pour être le porte-étendard du Rhdp aux joutes électorales de 2020. Un choix qui ne rencontrait pas son assentiment.
M. Mabri n’ambitionne nullement de devenir président de la République
D’autres partis politiques de l’opposition frapperaient également à la porte du Rhdp, attendant que celle-ci s’ouvre. Il n’y a véritablement pas de raison de s’étonner de cet état de fait. De nombreux partis politiques n’ont aucune ambition de prendre le pouvoir et de l’exercer. Si nouer des alliances peut leur permettre d’avoir des postes ministériels, surtout pour le président du parti, cela suffit largement à combler leurs ambitions.
Le microcosme politique ivoirien nous a habitué à ces jeux d’alliance et de rupture, à ces aller-retours, et à ces reniements qui frisent le ridicule. Peu sont ces hommes politiques qui ont la culture de l’opposition et qui ne rêvent pas des ors et des lambris dorés qu’offre le cheminement dans le sillage du pouvoir.
En retournant au Rhdp, M. Mabri n’ambitionne nullement de devenir président de la République, mais obtenir un poste ministériel suffirait amplement à ses ambitions…Il en est habitué. Ainsi va le pays. Mais s’il y a eu un soir en Eburnie, Il y aura assurément un matin et l’ivraie sera séparée du vrai.