Mirdidingkingathi Juwarnda (Sally Gabori), est une artiste d’art contemporain aborigène atypique (de la tribu Kaiadilt) née en 1924. Elle a 81 ans quand elle commence à peindre.
A l’occasion de la première grande rétrospective (européenne) de son œuvre à la Fondation Cartier (Paris) pour l’Art Contemporain, petit focus sur le parcours hors du commun de la peintre Sally Gabori.
Les origines de son art contemporain aborigène
Jusqu’à 23 ans, elle mène un mode de vie traditionnel sur l’île Bentinck, largement épargnée par l’influence des Européens. C’est une chanteuse respectée qui conte les liens étroits que son peuple entretient avec son île d’origine.
Quand entre 1942-1948, une grave sécheresse et un cyclone rendent son île inhabitable, elle part, invitée par des missionnaires presbytériens sur l’île voisine de Mornington. Elle ne reverra plus jamais son île, se verra interdire la pratique de sa culture, l’utilisation de sa langue, comme tous les Kaiadilt « invités » par les Européens sur Mornington.
Elle sera rebaptisée Sally Gabori.
Un art contemporain Aborigène atypique
En 2005, un atelier est créé par le gouvernement sur l’île, pour produire et commercialiser de l’artisanat traditionnel : le Mornington Island Arts and Crafts Centre. Elle commence à y peindre, elle a alors 81 ans.
La communauté Kaiadilt n’a aucune tradition iconographique mais Sally Gabori s’inspire librement de sa mémoire et des couleurs de son île pour créer un art qui lui sera propre. Elle peindra des vues topographiques dont les codes ne sont connus que d’elle.
Ces œuvres n’ont rien de commun avec l’iconographie traditionnelle australienne aborigène.
Ses œuvres ont été décrites comme s’apparentant à l’expressionnisme abstrait, avec souvent de grands aplats de couleur (un mouvement artistique dont elle n’avait pas connaissance).
Lorsque l’artiste australien indigène Melville Escott découvre la première peinture de Sally, il y perçoit, pour sa part, « la rivière, le banc de sable, les ondulations que les poissons laissent sur l’eau, le pays de son frère le roi Alfred et les pièges à poissons dont elle s’occupait ».
L’art contemporain aborigène de Sally Gabori diffusé à l’international
En 2013, ses travaux sont sélectionnés pour deux grandes expositions collectives internationales, l’exposition sur l’Australie à la Royal Academy of Arts à Londres, mais aussi dans le cadre de la 55e Biennale de Venise.
Sally peint alors cinq jours par semaine, et jusqu’à six toiles (souvent de grande taille) par jour jusqu’en 2012, où elle n’est plus en capacité de continuer à produire.
Les huit années de sa carrière de peintre, elle produit plus de 2 000 peintures d’art contemporain aborigène, et presque toutes les grandes institutions australiennes ont acquis certaines de ses œuvres.
Aujourd’hui, ses œuvres figurent dans les collections permanentes d’institutions culturelles telles que le Musée du quai Branly, à Paris, ou, encore, la Galerie nationale d’Australie, entre autres.
Elle décèdera le 11 février 2015.
Pour en savoir plus : Exposition Sally Gabori,
Jusqu’au 6 novembre 2022
Fondation Cartier pour l’art contemporain
161 Boulevard Raspail
75014 Paris, France