Depuis le déclenchement de l’opération militaire russe en Ukraine, les journalistes, les reporters, les stratèges militaires occidentaux et autres spécialistes de tous genres, n’ont eu de cesse de nous abreuver d’informations et d’analyse sur une victoire de l’Ukraine qui se profile à l’horizon. Tout ce beau monde met en exergue les faiblesses de l’armée russe, mal équipée, encline à des pénuries alimentaires et démotivée. Celle-ci a déclenché une guerre qu’elle a voulu éclair, mais qui dure dans le temps. Elle a été incapable de prendre Kiev, elle est contrée à Kharkiv et est sur le point d’être chassée de Severodonetsk.
Guerre en Ukraine: Comment les stratèges militaires russes ont mystifié les occidentaux
Tous les journaux, télévisions et agences de presse occidentaux en rendent compte, avec pour source, le maire de Kiev, le maire de Kharkiv ou celui Marioupol …donc les autorités ukrainiennes ! Mais une observation attentive de ce qui se passe sur le terrain, permet de faire une lecture différente du déroulement des opérations militaires. Il ne serait pas exagéré et surtout pas faux, de se rendre compte que les stratèges militaires russes, ont réussi l’exploit de « bluffer » et de « flouer » leurs homologues occidentaux. En effet, au-delà des intentions qu’on lui prête, personne ne peut se targuer de connaitre le véritable objectif que s’est fixé le président russe, Vladimir Poutine en déclenchant cette opération militaire spéciale. Même s’il a évoqué la dénazification de l’Ukraine et la protection des populations russophones de Lougansk et du Donbass, comme une préoccupation existentielle, il reste évident que personne ne sait véritablement ce qu’il veut, et jusqu’où il veut aller.
Ensuite nulle part, les russes n’ont fait mention d’une guerre-éclair de quelques jours pour atteindre leurs objectifs. Cette déduction et cette affirmation, sont sorties de l’imagination fertile des occidentaux. Le déroulement des opérations montrent que les russes ont utilisé des « leurres » qui ont détourné l’attention des ukrainiens et de leurs alliés européens et américains. En effet, après avoir encerclé Kiev, et fait diriger une longue colonne en direction de cette ville, les russes n’ont donné aucun véritable assaut sur cette ville. Certes on pourra toujours disserter sur l’échec de la prise d’un aéroport dans les environs de Kiev. Mais véritablement la prise de cette ville, n’était pas inscrite dans l’agenda militaire des russes. Les russes ont donc réussi à mystifier les Ukrainiens en les obligeant à concentrer et à fixer leur attention autour de cette ville. Une fois le gros des forces ukrainiennes fixées à Kiev, les russes ont pu opérer tranquillement et méthodiquement à l’Est et au Sud de l’Ukraine. C’est le même mode opératoire qui se déroule à Kharkiv.
Un message que la Russie envoie à l’Union Européenne mais également à l’Otan et par-delà, aux Etats-Unis
Les forces ukrainiennes y sont fixées, se défendent avec acharnement, mais laissent les mains libres aux russes de consolider leur mainmise sur le Donbass, en contrôlant toute la zone industrielle, les ports et l’accès à la mer de l’Ukraine. Cela se ressent aujourd’hui où l’Ukraine n’est pas en mesure de faire sortir son blé de ses ports. Mais ce qui ressort de cette opération militaire spéciale russe en Ukraine, c’est qu’outre les gains territoriaux (que les occidentaux qualifient de minimes), c’est un message, que la Russie envoie à l’Union Européenne mais également à l’Otan et par-delà, aux Etats-Unis. Ce message on ne peut plus clair, met en évidence le fait que la Russie ne transige pas avec sa sécurité. Si pendant longtemps, ses protestations et ses mises en garde relatives à l’élargissement de l’Otan à ses frontières, se sont heurtées au parapluie de l’indifférence et du mépris de ses interlocuteurs, cette opération en Ukraine est le signe que la Russie est prête à aller jusqu’à l’affrontement nucléaire, si cela est nécessaire pour assurer sa sécurité.
Les Européens en sont conscients, et certains pays, pris de peur, frappent à la porte de l’Otan, à l’effet de bénéficier du parapluie de cette organisation. Mais apparemment, le message russe semble avoir été entendu et l’on note une évolution dans le discours de nombre de dirigeants occidentaux. C’est également le lieu d’inviter certains de nos journalistes sous les tropiques, à prendre un peu de recul dans les reportages sur cette guerre. Il ne serait pas malséant qu’ils puissent interroger les informations qu’ils ont de leurs confrères occidentaux, de les confronter à d’autres sources et à se faire une opinion. Certains d’entre eux ont pris le pli, de reproduire in-extenso, ce qu’écrivent leurs confrères, en ignorant que nombre d’entre eux sont dans une logique de propagande et de fidélité au discours officiel de leurs pays. Ainsi, reprendre à tout vent, que l’Ukraine est sur le point de gagner la guerre, alors que la réalité sur le terrain est toute autre, ou ne faire que le décompte des morts russes sans toutefois mentionner un seul mort ukrainien est…désespérant. Cela se comprend. Tout le monde a été mystifié par la stratégie militaire russe ! Ainsi va le monde. Mais arrive le jour où l’ivraie sera séparée du vrai.