Le Premier ministre de Côte d’Ivoire, Patrick Achi, a annoncé lundi, lors d’une conférence de presse à Abidjan, la reprise du dialogue politique «dès décembre» 2021 avec les acteurs concernés.
Côte d’Ivoire: L’opposition partagée entre ambitions, alliances et trahisons
Le chef de l’Etat « m’a instruit en ce qui concerne effectivement le dialogue politique mené précédemment par feu Hamed Bakayoko et Gon Coulibaly, de reprendre dès décembre la poursuite de ce dialogue politique avec les acteurs concernés. Dans les tous prochains jours, je les contacterai », a déclaré Patrick Achi.
La presse locale s’interroge sur la stratégie d’une opposition encore terne et divisée face à la machine du RHDP d’Alassane Ouattara. Alors que c’est au cours de ces assises politiques que se joue le destin de Laurent Gbagbo et d’Henri Konan Bédié menacés d’exclusion par la limitation à 75 ans, l’âge des candidats au scrutin présidentiel de 2025.
Le Premier ministre a, en outre, fait observer que le dialogue politique « ne s’est jamais arrêté », puisque le chef de l’Etat a échangé avec les anciens présidents Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo.
Le Président Ouattara « a la main tendue, il a le cœur ouvert (et) il fait la démonstration quotidienne et permanente du dialogue politique » avec des actes de cohésion sociale, a soutenu Patrick Achi.
« Il ne faut pas attendre au dernier moment pour engager des discussions », avait déclaré Affi N’Guessan qui conduisait une délégation de son parti.
L’opposant a émis le vœu que 2025, une année électorale, puisse permettre à la Côte d’Ivoire de tourner la page des élections contestées et des crises.
Avant cette annonce, le président du Front populaire ivoirien (FPI, opposition), Pascal Affi N’Guessan a, au cours d’une rencontre avec Alassane Ouattara au palais présidentiel, plaidé pour la reprise du dialogue politique en vue d’un « consensus », autour de la présidentielle de 2025.
Alors, Laurent Gbagbo, Henri Konan Bédié, Pascal Affi N’Guessan et Albert Mabri Toikeusse réussiront-ils à former une coalition solide autour d’un chef de file pour faire face au bloc Ouattara. L’enjeu étant de tirer le meilleur parti de ces négociations et aller en toute confiance vers la présidentielle de 2025 en Côte d’Ivoire.
Fracture profonde au sein de l’opposition ivoirienne
Malheureusement, une partie de cette opposition conduite par le FPI de Pascal Affi N’Guessan mobilise dans le Hambol pour son congrès et enregistre même l’adhésion de nouveaux à Korhogo.
Le président du parti aux deux doigts roses ferait les yeux doux à Simone Gbagbo, l’ex-Première dame ivoirienne en instance de divorce d’avec son époux Laurent et qui a décidé de faire cavalière seule.
« Bédié à trahi le FPI » selon le Secrétaire général du FPI, Issiaka Sangaré, qui n’exclut pas l’éventualité pour son parti de virer au RHDP de Ouattara dans les mois à venir.
Gbagbo et Bédié devront nécessairement changer de logique s’ils entendent mener les premiers rôles et s’imposer lors de ce dialogue politique national. « La balle est dans le camp de l’opposition », prévient le quotidien.
Mais pour Hubert Oulaye, président exécutif du PPA-CI de Laurent Gbagbo, « en 2025, qu’ils le veuillent ou pas, le pouvoir sera au PDCI et au PPA-CI ».
Ces assises interviennent un an après que le Conseil constitutionnel a déclaré le président sortant Alassane Ouattara vainqueur de la présidentielle du 31 octobre en Côte d’Ivoire, compte tenu de l’absence d’adversaires de poids.
L’opposition, quant à elle, avait appelé à l’instauration d’une « transition civile ». Mais derrière cette annonce, aucune stratégie fiable et consensuelle n’avait été élaborée par l’énorme bloc d’opposition pour tenir sur le long terme.
Finalement, la montagne a accouché d’une souris et plusieurs dirigeants seront arrêtés et jetés en prison comme Pascal Affi N’Guessan et d’autres barons du PDCI-RDA.
Reste que, si les ambitions et les trahisons ne sont pas propres à la Côte d’Ivoire, la classe politique dans le pays de Houphouët-Boigny est réputée pour ses alliances et mésalliances.
En 1995, Laurent Gbagbo boycotte la présidentielle en soutien à Alassane Ouattara, et Henri-Konan Bédié est élu triomphalement face à un seul candidat.
2010, l’élection se termine par une crise meurtrière entre les camps des deux candidats, le sortant Laurent Gbagbo élu en 2000, et les partisans de Ouattara. Il faut dire que tout au long de la décennie 2000, le pays a été coupé en deux avec, au nord, des partisans d’Alassane Ouattara emmenés par Guillaume Soro, qui sera Premier ministre et président de l’Assemblée nationale d’Alassane Ouattara qu’il combat aujourd’hui avec véhémence.
L’on peut également rappeler la présidentielle de 2015 lorsque Henri-Konan Bédié se désiste et offre à Alassane Ouattara une confortable réélection sous les couleurs d’une coalition RHDP dans laquelle Bédié ne voudra finalement pas dissoudre son parti, le PDCI. Ce désaccord sera à l’origine de la “brouille” entre Bédié et Ouattara.