Innocent Gnelbin, président du Parti Force au peuple, a évoqué, dans un post sur son compte Facebook, la question de l’ Union du grand Nord, un projet initié par Gilbert Kafana Koné, actuel maire de la commune de Yopougon. Pour l’activiste politique proche du RHDP du président Alassane Ouattara, cette forme de regroupement géographique à caractère tribal, interroge sur le sens de la Nation et de la responsabilité des pouvoirs publics.
Union du Grand Nord: « Ce genre d’initiative de regroupement de cadres issus du grand centre, du grand nord, etc., renforce l’idée de l’appartenance à une communauté plus qu’à la nation » (Innocent Gnelbin)
Je n’arrive pas à comprendre cette histoire d’union du grand nord autant que j’ai du mal à projeter l’association des cadres du grand centre, du grand Ouest, etc. Cette forme de regroupement géographique à caractère tribal, interroge sur le sens de la Nation et de la responsabilité des pouvoirs publics. Mon regard tend à se focaliser sur la responsabilité de ceux qui incarnent les pouvoirs publics dans la persistance de la création de ce type d’associations. Non parce que l’État doit les interdire… quoique cela est à regarder de très près, mais parce que la mission essentielle que ces associations se donnent rentre dans les prérogatives des pouvoirs publics.
En effet, la mission clé que ces regroupements tribaux s’assignent est le développement local. La question alors est : à qui est-ce que la politique de développement notamment local est dévolue ? L’on me dira que ces regroupements viennent pour suppléer les pouvoirs publics dans leurs insuffisances et que l’Etat ne saurait tout faire. S’il en est ainsi, il ne reste qu’à prier Dieu pour que ces organisations puissent satisfaire aux besoins sans cesse croissants des communes, des régions et du pays.
Parce que :
Des écoles demeurent des cabanes en bois dans ce pays ; de nombreux centres de santé restent éloignés des villages et campements ; de l’eau potable reste encore une denrée rare dans de nombreuses localités ; le chômage est bien une réalité quotidienne des populations ; nos populations ont du mal à manger deux repas par jour, etc.…
Restons donc dans cette approche et je comprendrai alors pourquoi est-ce que nos populations en général attendent plus de leurs cadres, de la poche des maires, des présidents de conseil régionaux, que des entités publiques que sont les conseils municipaux, régionaux, et de l’exécutif. Pourtant l’idée de la décentralisation va dans le sens justement de permettre aux populations de s’approprier le développement local à travers les conseils municipaux, régionaux, qui doivent venir en appoint au pouvoir central.
Hélas, la démission et les faiblesses des pouvoirs publics, donnent du sens à ce genre de regroupements, qui d’ailleurs, ne sauraient avoir les moyens conséquents pour répondre aux exigences de mieux-être des populations. Car, si les conseils municipaux et régionaux font souvent l’objet de critiques acerbes, est-il fondé de porter ces critiques, vu que sans autonomie financière ils sont très mal nantis avec des budgets soumis au bon vouloir de l’exécutif ? La grande responsabilité qui est engagée est celle de l’Exécutif.
Face donc à la centralisation de la gouvernance par l’Exécutif, qui n’a manifestement aucune volonté de se déposséder de ses attributions depuis des décennies, nous déduisons que le pouvoir central encourage par ses faiblesses la floraison d’associations tribales de développement. D’ailleurs, ce n’est pas étonnant de voir des ministres et présidents de région en exercice se prêter à ce jeu inquiétant, en adhérant à ces « jets sets ». Inquiétant, parce qu’agir ainsi est un aveu manifeste d’échec de la gouvernance. Les populations ont donc le droit de s’inquiéter et de s’interroger sur l’avenir de la nation. Dans le contexte de l’histoire récente de la Côte d’Ivoire, difficilement reconstituée après sa partition en deux, ce genre d’initiative de regroupement de cadres issus du grand centre, du grand nord, etc., renforce l’idée de l’appartenance à une communauté plus qu’à la nation.
Par ailleurs, ce qui inquiet le plus, c’est la responsabilité des partis politiques traditionnels dans cette approche communautaire de mauvais aloi. Enraciné de façon tribale, ils ont tendance à trop tirer sur la corde en renforçant ce genre d’assise fort contestable. L’on ne peut pas continuer à conquérir ou à conserver le pouvoir, en renforçant son assise tribale au détriment de la nécessaire construction de la nation.
Ces partis politiques là, jouent avec le feu…
Les peuples de Côte d’Ivoire, constitués en majorité de jeunes qui sont souvent nés de parents venant de différentes contrées de ce pays, se doivent de refuser ce genre de réductions et de déchirures improductives. Il est possible d’avoir une Côte d’Ivoire, une et indivisible, ouverte sur les cultures de chacun de ses peuples pour construire une culture nationale intégrée, et en apporter à la culture universelle. Que la force soit aux Peuples de Côte d’Ivoire et à leur unité pour une Côte d’Ivoire rassemblée autour du bien-être partagé !
Innocent Gnelbin