Blé Guirao Jean Débadéa revient sur le 19 septembre 2002, date de l’assassinat du général Robert Guéi. C’est étant alité dans une clinique après une agression, que le Secrétaire Général de l’UDPCI a appris la tragique nouvelle.
Dans un texte intitulé “Le début d’une Clandestinité de 11 mois”, l’ex Président National de la Jeunesse de l’UDPCI, Blé Guirao Jean Débadéa, s’est prononcé sur la mort du Général Robert Guéi, 19 ans après.
Le collaborateur de Mabri Toikeusse, actuel président de l’UDPCI, lève un coin du voile sur l’un des plus gros complots d’assassinat de l’histoire jamais élucidés en Côte d’Ivoire.
Blé Guirao et l’UDPCI : « Qui a tué ROBERT GUEI? Qui a donné l’ordre de tuer ROBERT GUEI? »
« Le mercredi 18 Septembre 2002, tous les professeurs du Lycée Classique d’Abidjan Cocody où j’avais entre-temps été affecté et où je venais de terminer ma deuxième année scolaire d’enseignement, ont été conviés à une réunion de rentrée scolaire 2002-2003. A la fin de cette importante réunion avec l’administration du Lycée, nous avons été priés de retirer nos emplois du temps respectifs.
Après avoir retiré le mien, je quitte le Lycée Classique direction Abobo en passant par Adjamé. Au niveau de la gare STIF, au moment où je voulais passer un coup de fil à une cabine qu’un individu en chemise manche longue jaune portant un jean bleu foncé m’accoste en me tendant la main.
Clandestinité de 11 mois
« Bonjour, c’est GUIRAO ? » j’ai le temps de dire oui qu’il m’assène un coup de poing au visage. Surpris, je bascule en arrière mais dans mon dos, deux personnes que je n’avais pas eu le temps de dévisager me prennent à partie. L’un avec un couteau avec lequel il me poignarda le dos et l’autre avec un gros bâtonnet avec lequel il m’assomma.
En tombant à même le sol mes deux portables que j’avais étaient l’objet de saisine de celui qui m’avait envoyé le premier coup de poing quand les deux autres, ses acolytes sans doute continuaient de me ruer de coups. Je n’ai eu mon salut que grâce aux petits vendeurs de journaux à la criée qui m’ayant reconnu sont venus à mon secours.
C’est avec ces jeunes vendeurs que je prenais chaque jour mes journaux. Ils venaient de me sauver la vie. Mes agresseurs m’ont pris un seul de mes portables et ont couru pour se fondre dans le quartier en face de la gare Stif. Ma situation de santé étant préoccupante, mes sauveurs ont jugé bon rebroussé chemin pour s’occuper de moi et m’envoyer en clinique car j’étais mal en point.
De la clinique mes sauveurs ont pu joindre le SG du BEN de la JUDPCI, DIOMANDE SOUALIO dit le vieux lion sur le phone que j’avais pu leur remettre. J’avais tout perdu. J’étais en clinique sans rien. C’est le SG qui a averti le Président ROBERT GUEI de ce qui m’était arrivé et a donné le phone sur lequel on pouvait me joindre. C’est vers 21h par-là que le Président ROBERT GUEI a pu me joindre. Il était cette nuit-là avec Tonton ROGER ABINADER et son épouse, notre Maman, ROSE DOUDOU GUEI.
Chacun d’eux, à tour de rôle, a eu des mots gentils et forts pour moi. Cela m’a fortement remonté le moral. Le Président ROBERT GUEI a ensuite remis de l’argent à DIOMANDE SOUALIO, GUE GONO SYLVAIN et GNAHE THEODORE afin de venir vers moi pour régler mes frais d’hospitalisation à la clinique et payer les ordonnances pour mes médicaments.
Les camarades m’ont quitté vers minuit par là car j’avais été gardé à la clinique. Des questions trottaient dans ma tête. Quels sont ceux qui m’avaient agressé de la sorte après avoir prononcé mon nom ? Et pourquoi voulaient-ils à tout prix prendre mes portables ? Je souffrais mais l’essentiel j’étais déjà en vie et j’en remerciais mon Dieu.
Je ne sais pas si j’ai pu dormir ou fermé l’œil de la nuit mais au petit matin la radio à mon chevet à la clinique annonçait des mouvements de troupes dans Abidjan.
Les choses sont allés vite, très vite même.
ALAIN TOUSSAINT Conseiller en Communication du Président LAURENT GBAGBO «On a identifié qui est à l’origine des troubles. C’est le général Gueï », avait-il déclaré à la presse au moment où le Président GBAGBO se trouvait en voyage officiel en Italie. C’est le Ministre de la Défense LIDA KOUASSI MOISE qui sera plus précis quelques heures plus tard
« La situation est sous contrôle, c’est le Général ROBERT GUEI qui est à la tête des mutins qui ont attaqué le pays. Il s’en allait à la RTI faire une déclaration de prise de pouvoir et il y a eu une altercation avec les forces restées loyalistes. A l’heure où je vous parle il a été tué… » Je ne comprenais rien, mon sang tournait. J’étais faible mais il me fallait rapidement réagir.
Comment le Président ROBERT GUEI qui nous a installé le 07 septembre 2002 à la tête de la JUDPCI dans le cadre de l’organisation du Parti ? Comment ROBERT GUEI qui a reçu mon BEN et moi le 16 septembre 2002 pouvait-il être dans ce qui se racontait. C’est de mon lit de clinique que j’ai réagi sur deux radios étrangères pour porter un démenti formel sur les graves accusations portées sur le Président ROBERT GUEI qui lui valait cet assassinat atroce.
Après ces deux interviews je savais que j’étais en danger. Mes gars ont juste eu le temps de me faire partir de cette clinique que deux vehicules 4×4 vitres teintées sont arrivés avec des gens lourdement armés qui ont, selon le médecin, demandé après moi. Devant son incapacité à leur dire où j’étais, ils ont tout détruit dans sa clinique et sont partis.
Nous étions le 19 septembre 2002. De cette date jusqu’au 03 août 2003 j’étais en clandestinité. Pratiquement 11 mois dans le noir et dans des conditions difficiles pour échapper aux escadrons de la mort qui sévissait en toute impunité à Abidjan. C’était la 2eme clandestinité de ma vie après celle des années FESCI en 1991 qui avait duré 1 mois.
Celle-là a duré 11 mois pratiquement dans le noir. Des camarades ont assuré le relais pour me ravitailler en vivre et en tout. Toute ma gratitude et mon infinie reconnaissance vont à l’endroit de YAO KOUADIO SERAPHIN, GUEU GONO SYLVAIN et YAKOUI GUINZIO SERGE. Ce sont eux qui dans la discrétion totale ont permis que je puisse tenir dans la clandestinité. Ils étaient en contact avec deux personnes qui s’occupaient de ma petite famille et de moi.
En ces instants précis, 19 ans après ce 19 septembre 2002, je voudrais témoigner mon infinie reconnaissance et ma gratitude à jamais à tous ceux qui donnaient les moyens afin que les camarades puissent m’apporter des vivres sans être suivi et qui se sont occupés de ma petite famille durant tous ces 11 mois de clandestinité qu’on ne pourra jamais oublier.
Honneur et Gloire à vous tous. Je ne pourrai jamais assez, vous dire merci. Dieu seul le fera mieux que moi. C’est en partie grâce à vous que le plan de Dieu de ne pas me voir tuer à cette époque a été exaucé. Dieu passe toujours par des gens pour faire aboutir ses œuvres.
Je suis sorti le 03 août 2003 et le 11 août 2003 à la rentrée politique de la JUDPCI on a chanté ensemble cette chanson du groupe HAVRE DE DAVID «Non je ne mourrai pas, je vivrai.
Je raconterai les œuvres de l’Eternel.
Je raconterai les œuvres de mon sauveur
Je ne mourrai pas. Du sein de la détresse j’ai invoqué l’Eternel
L’Eternel m’a exaucé, il m’a mis au large.
Je te louerai, parce que tu m’as exaucé
Parce que tu m’as sauvé. Non, je ne mourrai pas, je vivrai.
Alléluia ; Alléluia»
19 ans après ce 19 septembre 2002, la lutte doit continuer comme ROBERT GUEI le voulait. Mais des questions et des interrogations demeurent toujours. Qui a tué ROBERT GUEI? Qui a donné l’ordre de tuer ROBERT GUEI?
REPOSE EN PAIX PRÉSIDENT. REPOSE EN PAIX MON GENERAL.
La lutte continue
Extrait de mon livre à paraître aux Éditions Harmattan
UDPCI de ROBERT GUEÏ à MABRI TOIKEUSSE
Le Parcours du Combattant
BLE GUIRAO JEAN DEBADEA
Ex Président National de la Jeunesse de l’UDPCI
Secrétaire Général de l’UDPCI