Des centaines d’habitations ont été détruites le 9 juillet dernier à Angré-Djibi nord sur le site du « lotissement pâturage », par Interbat, une entreprise immobilière, suite à un litige foncier avec des occupants d’une parcelle de terrain d’une superficie de 5,7 ha. Les victimes qui « dénoncent » un abus, lancent un cri de cœur aux autorités compétentes.
Litige foncier: Interbat fait démolir des habitations de plusieurs particuliers
Des propriétaires encore sur le champ des ruines, au milieu des gravats et des déchets, dépassés par l’ampleur des dégâts, réclament justice. Le fruit de plusieurs années de dur labeur, a été démoli en un laps de temps. Les faits se sont déroulés, début juillet 2021 dans le quartier d’Angré-Djbi nord, à quelques encablures de la cité GESTOCI. Une centaine d’habitations rasées par des bulldozers de l’entreprise Interbat, brandissant une décision de justice délivrée par le Tribunal du Commerce d’Abidjan, sous l’œil vigilant de centaines d’agents des forces de l’ordre déployés sur place.
Les acquéreurs constitués dans un collectif de victimes, soutiennent pourtant n’avoir reçu aucune notification de mise en demeure. » Nous le Collectif des victimes de Interbat, nous n’avions jamais été informés ni visés par une quelconque procédure en ce qui concerne les parcelles de terrain que nous avons acquis auprès du détenteur de droit sur le site d’Angré Djibi, dont nous avons les lettres d’attributions, en attendant d’en finir avec la suite des documents, notamment nos arrêtés de concession définitive. Nous avons été surpris qu’en exécution d’une décision de justice, concernant des personnes dûment identifiées et citées, nos réalisations aient été détruites par un tiers sans raison apparente et sans en avertir », s’est insurgé le porte-parole Ali Ouattara. Qui informe que l’affaire a été portée devant les autorités compétentes, notamment le ministère de la Construction et celui de la Justice.
» La façon de procéder dans l’exécution de la décision du tribunal par la démolition sans distinction de nos biens, est en violation de nos droits, car n’étant pas partie au procès dans le litige qui opposait INTERBAT aux occupants cités en justice. Cela va de soi que nous ne pouvions être concernés par les opérations ordonnées; et donc nos biens ont été abusivement détruits sans que nous ayons eu l’occasion de nous défendre. En conséquence, nous portons l’information à la connaissance de l’ensemble du public, mais en particulier aux autorités compétentes, notamment le ministère de la Construction, le ministère de la Justice, mais aussi le ministère de la Sécurité, quant à la menace de trouble à l’ordre public que cette situation peut entrainer », a-t-il fait savoir.
Version d’Interbat
Pour en savoir plus sur cette affaire, nous avons été plutôt renvoyés par certains responsables de l’entreprise Interbat vers un article publié en juin dernier par le quotidien gouvernemental Fraternité matin. L’information contenue dans ladite publication, estiment-ils, est assez suffisante pour nous éclairer.
« Dans le courant de l’année 2005 la société internationale de bâtiment a acquis une parcelle de terrain d’une contenance de 5,70 hectares sis dans la commune de Cooody-Angré Djibi nord, objet du titre foncier n°205792 de la circonscription foncière de Cocody. L’entreprise a prévu y réaliser son programme immobilier dénommé Arcade 5. Cependant, elle va constater l’occupation de sa parcelle régulièrement acquise par des occupants sans titre ni droit », lit-on dans ledit journal, s’inspirant d’un communiqué de presse de l’entreprise Interbat en date du mercredi 9 juin 2021.
« Aux fins de préserver ses droits et intérêts, la société immobilière a assigné lesdits occupants devant le Tribunal du Commerce d’Abidjan avec demande et prétention de leur déguerpissement. Malgré la procédure judiciaire entamée, les occupants illégaux ont marqué le refus de comparaître, a souligné le directeur général de INTERBAT », fait savoir Fraternité Matin. L’une des victimes, jointe au téléphone, a souhaité réagir à ces explications. « Nous ne sommes pas des occupants clandestins, nous avons travaillé à la sueur de notre front pour pouvoir payer nos terrains et construire nos maisons. Nous avons nos attestations de cession (…) Nous ne sommes pas dans un état de non droit. Nous faisons donc recours à l’ Etat de Côte d’Ivoire afin d’obtenir justice », a-t-elle fait savoir.
L’intermédiaire Coulibaly Kélétien Nambélé donne sa version des faits
Coulibaly Kélétien Nambélé, premier adjoint au maire de Foumbolo, dans le département de Dabakala, intermédiaire dans la vente des parcelles, que nous avons rencontré sur les ruines du site, a également donné sa version des faits. « Je suis l’intermédiaire clé de cette parcelle de la famille Marcellin Abougnan Topé, ancien journaliste de Fraternité matin. Il était en collaboration avec vieux Dosso Aboubacar Siriki, qui est opérateur foncier. La parcelle a été confiée par Abougnan au vieux Dosso pour lotissement.
Vieux Dosso Aboubakar l’a morcelée et lotie. Après le lotissement, il s’est rendu à Abobo Baoulé pour prendre l’attestation coutumière. Les gens d’Abobo Baoulé se sont rendus ici pour la visite. Présent ce jour, le secrétaire général de la chefferie a fait savoir que c’est Djorogobité 2 qui doit délivrer l’attestation coutumière puis qu’il y avait un conflit entre Abobo Baoulé et Djorogobité 2. C’est ainsi qu’Abougnan et moi nous nous sommes rendus à Djorogobité 2.
Ce jour-là, le chef Zephirin Atsin Anon (il n’avait pas encore été nommé chef, mais avait son arrêté de nomination) nous a reçus. Abougnan a attesté que la parcelle lui appartient et qu’il l’a cedée à vieux Dosso. C’est à partir de là que le chef Zephirin Atsin Anon a délivré l’attestation coutumière. C’est ce qui a servi à vieux Dosso d’avoir un titre provisoire sous réserve d’approbation sur le plan du morcellement des lots qu’il a cédés à ces acquéreurs.
Deux ans après cela, Abougnan le propriétaire terrien est décédé. Son cousin Joseph Ako qui est actionnaire à Interbat, a eu des brouilles avec Roger Abougnan, le fils du défunt Abougnan, relatives à ladite parcelle. Le neveu a fait comprendre à son oncle que son père a vendu la parcelle au vieux Dosso. Mais comme il s’agissait d’une question de village, il y a eu certains membres de la famille qui se joints à Joseph Ako, puis se sont rendus à la chefferie d’Abobo Baoulé et ont pris une attestation coutumière pour engager un ACD. Sur le plan de 7,5ha, leur ACD a été validé sur 5ha. Les acquéreurs ont été déguerpis sans avoir été signifiés », a-t-il témoigné.