Le retour au Burkina Faso de Blaise Compaoré est de plus en plus évoqué, aussi bien à Ouagadougou qu’à Abidjan. Zephirin Diabré, ministre de la Réconciliation nationale n’a pas manqué de rendre visite à l’ancien chef d’État burkinabè, le 5 mai dernier, lors de son passage dans la capitale économique ivoirienne. Cette question de retour au bercail a à nouveau été à l’ordre du jour.
Blaise Compaoré, des craintes au sujet de son retour au Burkina Faso ?
Déposé par une insurrection populaire, le 30 octobre 2014, Blaise Compaoré a trouvé refuge en Côte d’Ivoire, où il est dans les bonnes grâces des autorités ivoiriennes. Bénéficiant de gîte et couvert à Abidjan, l’ancien président burkinabè s’est également vu octroyer la nationalité ivoirienne.
Cependant, au Pays des hommes intègres, l’affaire de l’assassinat du capitaine révolutionnaire Thomas Sankara a été remise au goût du jour. Le tribunal militaire du Faso a en effet mis en accusation l’ancien locataire du palais du Kosyam, ainsi que 14 de ses proches, pour « attentat à la sureté de l’État, complicité d’assassinat et recel de cadavres ».
Le magistrat en charge du dossier prévoit un jugement par contumace au cas où le principal accusé ne comparaissait pas en personne. N’empêche que de nombreux citoyens burkinabè, ainsi que certaines associations ne cessent de réclamer à cor et à cri que Blaise Compaoré soit extradé vers Ouaga. Ils ont pour ce faire, adressé un plaidoyer aux autorités ivoiriennes afin de favoriser ce retour de Compaoré vers sa patrie.
C’est dans cette dynamique que Zéphirin Diabré, ministre de la Réconciliation nationale, s’est rendu en Côte d’Ivoire, où il a été reçu en audience par Alassane Ouattara, ainsi que par Kouadio Konan Bertin, son homologue ivoirien. Il était porteur d’un message du Président Roch Kaboré au chef d’État ivoirien.
Au lendemain de ces rencontres, l’ancien chef de file de l’opposition burkinabè, qui a finalement rejoint la majorité présidentielle, a rendu une visite « fraternelle » à Blaise Compaoré, mercredi dernier. Au cœur de leurs échanges, la question d’un éventuel retour de Blaise Compaoré dans son pays.
Blaise Compaoré peut-il contribuer à arrêter le terrorisme au Faso ?
Le Burkina Faso, faut-il le rappeler, est empêtré dans une menace terroriste à nulle autre pareille. Il ne se passe presque plus de semaine sans que des groupes armés ne commettent des attentats, avec à la clé des dizaines de morts, civils comme militaires, d’importants dégâts matériels et des milliers de déplacés.
En visite en Allemagne, en février 2019, le président Roch Marc Christian Kaboré déclarait : « Le Burkina Faso a bénéficié de la paix sociale pendant des années parce que, quelque part, nous avions un deal. Cela me semble évident d’autant que je dois rappeler qu’après le départ de Blaise Compaoré et les élections, à peine avons-nous mis en place le gouvernement, le 12 janvier 2016, que nous avions le premier attentat au Burkina Faso et depuis, nous sommes dans une activité antiterrorisme dont l’objectif est de nous empêcher de travailler. »
La réaction à cette sortie ne s’est nullement pas fait attendre. Dans une missive adressée à son successeur, Blaise Compaoré avait proposé « sa disponibilité et son soutien dans le cadre de la continuité de l’État face à la situation de déchirure que traverse actuellement le Burkina ». Puis, il ajoute : « J’ai souffert lorsqu’il (Ndlr, le Burkina Faso) a été l’objet d’attaques terroristes qui ont occasionné de nombreuses pertes en vies humaines. »
La situation sécuritaire au Burkina Faso est d’autant plus alarmante que le président déchu, lors de sa rencontre avec l’émissaire de Kaboré, a manifesté à nouveau sa volonté de rentrer dans son pays afin d’apporter sa contribution à l’effort de paix.
« Le président Compaoré a manifesté le souci de rentrer, surtout devant la catastrophe que nous vivons », a déclaré le ministre burkinabè de la Réconciliation, nationale, avant d’exposer les réserves émises par le président Compaoré : « Maintenant, il souhaite rentrer en homme libre chez lui, ce serait tout à fait normal. »
Roch Kaboré entend certes lancer une réconciliation au Burkina, avec le concours de tous les fils et filles du Faso. Mais entre-temps, la justice burkinabè a bouclé son enquête sur l’assassinat de Thomas Sankara. Le procès peut donc s’ouvrir et Blaise Compaoré figure parmi les accusés. « Peut-il revenir dans ces conditions ? », s’interroge le confrère RFI.