La crise entre Guillaume Soro et son « père » Alassane Ouattara a pris une autre tournure depuis le 23 décembre 2019. Ce jour-là, après le retour manqué à Abidjan de l’ancien président de l’Assemblée nationale, plusieurs de ses proches ont été interpellés. Plus d’un an après, le député de Ferké est toujours en exil en Europe.
Comment Guillaume Soro a soutenu Ouattara en 2010
C’est un secret de Polichinelle. Alassane Ouattara doit beaucoup à Guillaume Soro dans son accession au pouvoir en 2011. L’actuel président ivoirien a bénéficié de l’appui du député de Ferké alors qu’il disputait le pouvoir avec Laurent Gbagbo, au second tour de l’élection présidentielle d’octobre 2010.
En effet, le président sortant, candidat de La majorité présidentielle (LMP), était déclaré vainqueur par le Conseil constitutionnel. Pendant ce temps, la Commission électorale indépendante (CEI) avait déjà proclamé la victoire d’Alassane Ouattara, le candidat du Rassemblement des républicains (RDR).
Il faut rappeler qu’ Henri Konan Bédié, président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), un autre poids lourd de la scène politique, s’était engagé à soutenir l’ancien directeur général adjoint du Fonds monétaire international (FMI) en appelant ses partisans à voter pour lui au second tour.
Dans la crise armée qui a opposé les forces loyales à Laurent Gbagbo à celles fidèles à Alassane Ouattara, Guillaume Soro s’est positionné comme un meneur de troupes.
L’ex-chef de la rébellion ivoirienne a pris fait et cause pour le leader des républicains. « Je ne laisserai pas Gbagbo assassiner la démocratie », avait-il confié à Jeune Afrique pendant la crise.
Pourquoi Guillaume Soro s’est séparé de Ouattara
Les relations entre Guillaume Soro et Alassane Ouattara ont très vite été rattrapées par les intempéries de la vie. Après avoir réussi à faire chuter le fondateur du Front populaire ivoirien (FPI) du pouvoir, les deux hommes font chemin ensemble jusqu’à ce que le chef de l’Etat demande à l’homme qui a dirigé la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI) de 1995 à 1998, de rejoindre le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP).
Pour Guillaume Soro, il n’est pas question de brandir une carte de militant du RHDP. Le natif de Kofiplé (nord de la Côte d’Ivoire) rejette l’offre d’Alassane Ouattara.
Le 8 février 2019, « Bogota » rend le tablier et démissionne de la présidence de l’Assemblée nationale plutôt que d’intégrer le RHDP.
Guillaume Soro, victime d’ingratitude ?
En exil en Europe, le chef de file des soroistes est persuadé que, contrairement à ce que pense le camp Ouattara, l’actuel régime fait preuve d’ingratitude à son égard.
Finalement, il y a lieu de se demander qui du président de la République ou de son ancien Premier ministre est redevable à son prochain.
Sur la question, El Hadj Mamadou Traoré est formel : Alassane Ouattara doit tout à Guillaume Soro. « Entre leur gourou et Guillaume Soro qui doit à qui ? C’est leur gourou qui doit à Guillaume Soro et non le contraire », est convaincu ce soroiste, qui rappelle que le président ivoirien « n’a pas mis un seul centime dans la rébellion ».
Il n’empêche que les houphouëtistes voient le député de Ferké comme un ingrat qui se retourne contre son bienfaiteur.