Sunday Adeyemo est né en 1972 à Igboho, dans l’État d’Oyo. Son histoire se confond avec celle du Nigeria, épicentre de violents conflits ethniques et communautaires très meurtriers entre éleveurs et/ou agriculteurs.
Nigeria: Sunday Adeyemo comme l’homme par qui est arrivée la guerre du Biafra
Vendredi dernier, le président nigérian Muhammadu Buhari a promis de protéger « tous les groupes religieux et ethniques » du pays le plus peuplé d’Afrique, en réaction aux violences meurtrières qui ont éclaté le 12 février 2021 entre communautés sur un marché du sud-ouest du Nigeria.
Des médias nigérians ont rapporté que des troubles avaient éclaté vendredi sur le marché de Shasha à Ibadan, dans l’Etat de Oyo, entre les communautés haoussa (ethnie majoritaire dans le nord du pays) et yoruba (ethnie majoritaire dans le sud-ouest).
Originaire de cet État, Sunday Adeyemo a acquis une certaine notoriété nationale en octobre 2020 lorsqu’il a profité de la journée de l’indépendance du pays pour appeler à la création d’une république yoruba indépendante.
Par une série de déclarations incendiaires, ce riche vendeur de voitures a été propulsé au cœur de l’un des clivages ethniques les plus meurtriers du Nigeria, à savoir le conflit entre les éleveurs peuls et d’autres groupes, concernant l’accès aux terres et les droits de pâturage.
L’homme a été lionisé localement pour son rôle, à la fin des années 1990, dans des batailles intercommunautaires séculaires entre Yoruba. Ses célèbres exploits ont été mis en scène dans un long métrage qui était un étalage fantastique de charmes magiques et de juju.
Dans une scène où des gangs rivaux s’affrontent, l’acteur qui joue le rôle de M. Adeyemo, arrive à moto, ramasse une banane empoisonnée et en mange calmement la moitié sans en ressentir les effets néfastes. Il sort ensuite une mitrailleuse de nulle part et tire sur ses adversaires qui s’enfuient dans toutes les directions.
Qui est Sunday Adeyemo alias “Igboho”
Anciennement mécanicien moto, Sunday Adeyemo est aujourd’hui un richissime homme d’affaires qui a fait fortune dans la vente de voitures neuves et d’occasion au Nigeria. Mais ce “dangereux fauteur de troubles” au Nigeria est surtout connu comme une figure nationale controversée dans le conflit entre les éleveurs de plus en plus meurtrier, comme le rapporte l’émission Nduka Orjinmo de la BBC.
Le mois dernier, après le meurtre d’un politicien, M. Adeyemo a estimé en avoir vu assez et a attiré l’attention en demandant que les éleveurs peuls, du nord du Nigeria, quittent le sud-ouest, considéré comme le foyer du groupe ethnique Yoruba, pour tous leurs crimes présumés.
Mais ce soi-disant défenseur des sans défense, populairement connu sous le nom d’Igboho – d’après sa ville natale dans le sud-ouest de l’État d’Oyo – n’est pas étranger à la controverse et aux conflits meurtriers.
Ce film et d’autres récits à son sujet, comme celui où il se promène avec un serpent autour du cou, ont contribué à la réputation d’invincibilité de la région.
Ce personnage controversé nous rappelle l’ancien président autoproclamé du Biafra, Chukwuemeka Odumegwu Ojukwu, mort le 26 novembre 2011. À la mort d’Ojukwu, le président Goodluck Jonathan a salué un homme qui avait « un immense amour pour son peuple, pour la justice et l’égalité », mais pour beaucoup il reste celui par qui le premier drame humanitaire de l’histoire postcoloniale de l’Afrique est arrivé.
En effet, l’ancien chef de la rébellion du Biafra, région d’origine des Ibos, fut, pendant deux ans et demi (du 30 mai 1967 au 8 janvier 1970), le président autoproclamé de cette région sécessionniste au prix de centaines de milliers de morts.
La déclaration sécessionniste de Chukwuemeka Odumegwu Ojukwu, avait été suivie d’une guerre meurtrière (1 million de morts, dont de très nombreuses victimes de la famine) qui émeut l’opinion publique internationale. Le 15 janvier 1970, l’armée loyaliste du gouvernement fédéral du général putschiste Yakubu Gowon qui y voyait une véritable déclaration de guerre, parvient à reprendre le Biafra. Quelques jours plus tôt, Ojukwu avait fui en Côte d’Ivoire. Il s’est éteint à Londres en 2011, à l’âge de 78 ans.
Nigeria: la traque aux éleveurs peuls dans le nord du pays
Plusieurs campements d’éleveurs peuls (du nord du pays) ont été récemment attaqués dans les régions du sud-ouest dominées par l’ethnie Yoruba et le sud-est, majoritairement Ibo. Les éleveurs sont accusés par certains d’être responsables de la montée des enlèvements et d’attaques meurtrières dans ces régions.
A la suite de ces attaques, quelque milliers d’éleveurs peuls ont fuit le sud du pays pour gagner le nord. Ces dernières années, la baisse des précipitations et les sécheresses dans le nord ont progressivement poussé les éleveurs peuls à s’aventurer plus au sud et à s’y installer, souvent de manière durable.