Pourrait-on assister à une reprise du dialogue entre Soro Guillaume et Alassane Ouattara ? En tout cas, dans un entretien accordé à nos confrères de Générations Nouvelles, l’ancien chef de la rébellion ivoirienne a livré ses conditions pour des discussions avec l’actuel président de la République de Côte d’Ivoire.
Soro Guillaume, le rebelle contre Gbagbo
Après des années de longue lutte, Laurent Gbagbo accède au pouvoir le 26 octobre 2000. Mais très tôt, le fondateur du Front populaire ivoirien (FPI) est confronté à une rébellion armée basée dans la ville de Bouaké, dans le centre du pays. La tentative de coup d’Etat menée contre le pouvoir de l’époux de Simone Gbagbo se transforme en une rébellion qui prend ses quartiers dans la deuxième plus grande ville de la Côte d’Ivoire. Le pays est coupé en deux et les rebelles contrôlent la partie nord.
On apprend plus tard que les rebelles, réunis au sein des Forces nouvelles, sont dirigés par un certain Soro Guillaume, ancien secrétaire général de la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI). Il contraint M. Gbagbo à discuter avec lui et finit par se hisser au rang de Premier ministre du gouvernement de Côte d’Ivoire grâce aux accords politiques de Ouagadougou. Sous l’ère Gbagbo, Soro Guillaume gère la Primature durant trois ans.
Soro Guillaume, le « fils » de Ouattara
En octobre 2000, la Côte d’Ivoire organise l’élection présidentielle avec la présence de ceux qui ont toujours été considérés comme de véritables poids lourds de la classe politique ivoirienne. Il s’agit de Gbagbo Laurent (FPI), Alassane Ouattara (Rassemblement des républicains, RDR) et Henri Konan Bédié (Parti démocratique de Côte d’Ivoire, PDCI).
Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo accèdent au second tour du scrutin présidentiel. Mais l’élection débouche sur une profonde crise avec à la clé un lourd bilan. Les deux candidats revendiquent la victoire. Des forces loyales à Ouattara et d’autres à Gbagbo s’affrontent. La crise ivoirienne fait officiellement 3 000 morts. Le régime de l’opposant historique de feu Félix Houphouët-Boigny s’écroule le 11 avril 2011.
Dans cette crise, Soro Guillaume se positionne aux côtés d’Alassane Ouattara et ses troupes se battent contre l’armée du président sortant. « Je ne peux pas accepter que l’on assassine la démocratie en Côte d’Ivoire. L’enjeu, d’ailleurs, nous dépasse. Si nous nous soumettons à l’arbitraire, c’est toute l’Afrique qui risque d’en revenir aux présidences à vie ! », s’était exprimé l’ancien Premier ministre ivoirien dans les colonnes de Jeune Afrique.
Comment Soro Guillaume se sépare de Ouattara
Alassane Ouattara s’installe au palais présidentiel avec le soutien de Soro Guillaume. Mais les rapports entre les deux hommes ne parviennent pas surmonter leurs divergences. En effet, le président ivoirien rêve de voir son « fils » militer au sein du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP). Le chef d’Etat se heurte à un refus catégorique de la part de celui que l’on considère comme le filleul de Blaise Compaoré.
Très remonté contre Soro, l’homme fort du Rassemblement des républicains (RDR) exige la démission de ce dernier. Le 8 février 2019, le député de Ferké quitte la tête du Parlement ivoirien. Depuis, les deux hommes ne se parlent plus. Soro Guillaume, condamné à 20 de prison ferme et sous le coup d’un mandat d’arrêt international, vit en exil dans l’hexagone.
Cependant, Soro Guillaume demeure ouvert au dialogue, mais pas à n’importe quel prix. « Le président Félix Houphouët-Boigny a fait du dialogue une seconde religion. Mais pas à n’importe quel prix ! Pas le dialogue de la soumission ni de l’humiliation. Vous savez, le dialogue doit être sincère. Le dialogue des braves ! Mais pas le dialogue du plus fort ou du maître et de l’esclave. Dans une République, un tel dialogue n’est pas constructif », a précisé Soro Guillaume à Générations Nouvelles.