Des violences ont éclaté dans de nombreuses localités ivoiriennes avant, pendant et après l’élection présidentielle du 31 octobre 2020. L’opposition ivoirienne avait en effet appelé au boycott de ce scrutin en appelant à des manifestations contre le 3e mandat d’Alassane Ouattara. La répression de ces manifestations, ainsi que l’intervention de groupes d’individus armés de machettes et autres armes blanches ont fait basculer la Côte d’Ivoire dans l’horreur. Amnesty International fait le point de cette crise et appelle à la libération des cadres de l’opposition emprisonnés.
Amnesty International : « L’utilisation de machettes et d’armes à feu révèle les horreurs de la violence postélectorale »
Dans le rapport d’Amnesty International sur les violences qui ont secoué la Côte d’Ivoire en marge de l’élection présidentielle du 31 octobre 2020, certains faits retiennent particulièrement notre attention. Il s’agit en effet de témoignages de personnes qui ont vécu des atrocités ou ont été témoins de ces scènes horribles dépeintes par l’ONG des droits de l’homme. Morceaux choisis de ces faits tels que relatés dans le rapport dont Afrique-sur7 a recu copie.
« Des témoins oculaires interrogés par l’organisation ont décrit des scènes de violence postélectorale qui se sont déroulées au milieu d’affrontements s’intensifiant entre l’opposition et les partisans du parti au pouvoir depuis le 31 octobre. Dans certains cas, les forces de sécurité ont été débordées de ne pas avoir empêché la violence des deux côtés. »
« Nous exhortons les autorités ivoiriennes à enquêter sur les violences sanglantes et à traduire les auteurs en justice. L’impunité qui règne depuis longtemps en Côte d’Ivoire constitue un terrain fertile pour que des personnes commettent des meurtres et d’autres violations des droits humains sans crainte d’être tenues pour responsables », a déclaré Samira Daoud, directrice d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre.
« C’est la deuxième fois en une décennie que les élections en Côte d’Ivoire sont marquées par la violence. Les autorités doivent prendre d’urgence des mesures pour protéger des vies et envoyer un message clair que les meurtres ne resteront pas impunis. »
« La violence a éclaté dans plusieurs villes de Côte d’Ivoire à la veille de l’élection présidentielle et s’est poursuivie après le vote. Selon le Conseil national des droits de l’homme, les violences ont fait 55 morts entre le 31 octobre et le 10 novembre et 282 personnes ont été blessées. »
« Des témoins oculaires ont déclaré à l’organisation que des partisans du parti au pouvoir avaient attaqué les manifestants avec des pierres, ce qui a ensuite conduit à un violent affrontement avec des machettes et des fusils alors que les forces de sécurité étaient débordées. »
«… Ils ont commencé avec des pierres, puis des machettes, et enfin nous avons entendu des coups de feu… Nous avons été brutalement agressés… Ils ont commencé à brûler, à casser certaines choses et à nous blesser avec des balles. Les gendarmes qui étaient au milieu pour disperser la foule avec des gaz lacrymogènes étaient (même) découragés. Nous étions livrés à nous-mêmes. Nous n’avons jamais vu cela, généralement les gens prennent des machettes, mais cette fois, ils ont tous utilisé des armes à feu », a déclaré un témoin à Amnesty International
Selon un autre témoin, « au moins 24 personnes ont été blessées par arme à feu les 9 et 10 novembre, et cinq dans un état critique n’ont pas pu être évacuées en raison des violences persistantes. Nous n’avons jamais vu cela, généralement les gens prennent des machettes, mais cette fois, ils ont tous utilisé des armes à feu », a-t-il déclaré.
Le chef de l’opposition Pascal Affi N’Guessan a été arrêté et détenu au secret du 6 au 9 novembre au soir, période pendant laquelle ni sa famille ni son avocat n’ont eu accès à lui. Affi N’Guessan a déclaré qu’il n’avait pas vu la lumière du jour pendant 60 heures. Il y a 30 chefs d’accusation contre lui, dont « attaque et complot contre l’autorité de l’État, meurtre et acte de terrorisme ».
« Le 3 novembre, 21 personnes ont été arbitrairement arrêtées au domicile du vétéran de l’opposition Henri Konan Bédié, dont cinq sont toujours en détention. Parmi eux figurent Maurice Guikahué, vice-président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI en français), les sénateurs Seri Bi N’Guessan, Bassy Koffi Bernard et le chef de cabinet d’Henri Konan Bédié, Narcisse N’dri Kouadio. »
Cette vague d’arrestations d’opposants politiques fait suite à une autre série d’arrestations plus tôt cette année. En août, Amnesty International a signalé une vague d’arrestations de dissidents politiques. Entre le 13 août et le 25 octobre, au moins 41 personnes ont été arrêtées à Abidjan, Korhogo, Toumodi et Alépé, alors qu’elles manifestaient ou après avoir appelé les gens à manifester.
Cela comprend cinq membres du parti d’opposition GPS, qui ont été arrêtés le 13 août alors qu’ils se rendaient à une manifestation, et Pulchérie Édith Gbalet, coordinatrice de l’ONG Alternatives Citoyennes (ACI), arrêtée le 15 août à l’hôtel où elle résidait avec deux collaborateurs après avoir appelé les gens à protester contre le troisième mandat d’Ouattara.
« La répression croissante des dirigeants de l’opposition et des critiques du gouvernement est une attaque contre les droits de l’homme. Les autorités doivent cesser de restreindre le droit à la liberté de mouvement des personnes à l’intérieur de la résidence des dirigeants de l’opposition en supprimant les forces de sécurité qui les entourent », a déclaré Samira Daoud.
« En août, Amnesty International a rapporté que la police avait autorisé des hommes armés de machettes à attaquer les manifestants le 13 août dans le district de Yopougon à Abidjan. Un affrontement entre partisans du parti au pouvoir et partisans des partis d’opposition à Dabou entre le 19 et le 21 octobre a fait 16 morts et 67 blessés. »