Les réactions continuent de se faire entendre depuis la sortie musclée du ministre Adjoumani Kobenan Kouassi contre le Cardinal Jean Pierre Kutwa qui déclarait récemment que la candidature du président Alassane Ouattara à l’élection présidentielle d’octobre prochain, n’est pas nécessaire. Dans la contribution ci-dessous, l’Abbé Paul Shalom Deliboli interpelle le porte-parole du RHDP sur sa responsabilité en tant que cadre catholique et lui rappelle que l’État et l’Église ne sont pas ennemis.
L’Abbé Paul Shalom Deliboli recadre Adjoumani: « Non ce n’est pas nécessaire une association des cadres catholiques du RHDP »
(…) Face à certaines situations socio-politiques ou de la vie inter-relationnelle en général, les réactions sont diverses d’une personne à une autre. Les uns optent pour un droit de réponse afin de préciser et mieux informer, les autres préfèrent garder le silence parce que cette option leur semble utile car disent-ils : « On n’est pas toujours obligé de répondre à tout, et, quelques-uns dans cette logique du silence disent même « qu’on répond aux imbéciles par le silence ».
Non, l’homme est trop précieux pour qu’il soit traité d’imbécile ou d’idiot. Pour ma part, même si le silence peut être une option, il peut aussi malheureusement cacher une ou des insuffisances et là, ce ne pas être le meilleur choix de communication mais plutôt une fuite de responsabilité. De cette façon, on ne répond pas parce qu’on manque d’arguments. On dira pour se justifier ça passera. Oui, c’est sûr ça passera mais comment ? Quand les plumes du mensonge sont emportées par le vent et dispatchées çà et là, si par la suite, vous voulez vous justifier ou rectifier quoique ce soit, le venin est déjà répandu.
Il me semble nécessaire pour les amis internautes que vous êtes, appartenant à diverses familles politiques de votre convenance librement (il faut y être, c’est très utile, plus que nécessaire), de préciser une ou deux choses à partir de la 2e sortie de notre coreligionnaire, répondant au nom des cadres catholiques de sa représentation politique, Monsieur Kouassi Adjoumani. Son manque d’élégance dans les bureaux de la télévision qui le reçu dans le cadre du « talk » après son show dans la cour de la cathédrale oblige non à lui répondre directement (parce que des voix avisées le feront) mais à préciser deux petites choses : La première chose, c’est le mensonge concernant la laïcité de l’Etat dans ses rapports avec l’Eglise en particulier, et, les Cultes de façon plus générale.
Ce mensonge qui fait croire que l’Eglise et l’Etat sont à couteaux tirés et que pour ce faire, tout leur est toujours parallèle. Ce mensonge qui fait croire que la politique en tant gestion des biens de la République est réservée à une secte et que pour y être, il faut avoir appris l’art du mensonge et de la roublardise ; avoir pour meilleures armes la violence, l’intimidation, l’assujettissement, le musellement des opposants de quelque nature qu’ils puissent être. La deuxième chose, c’est votre rôle en tant que chrétiens dans la cité qui vous fait mériter le double titre de laïc et de citoyen.
1. DES RAPPORTS ENTRE L’ETAT ET LES CULTES 1.1
Un vocabulaire presque sans ambiguïté : On entend souvent parler des rapports entre l’Eglise et l’Etat, ce qui, s’il n’est pas faux, n’est – Faux : C’est faux parce que les termes référentiels juridiques sont » les rapports entre l’Etat et les cultes » car il ne s’agit pas d’un seul culte mais de plusieurs (musulman, catholique, protestant, juif et de tout autre culte reconnu officiel par un Etat – Vrai : Au moment de la Révolution Française du 14 juillet 1789, les révolutionnaires s’étaient dressés contre l’Eglise catholique puisque, depuis lors lorsqu’il s’agissait de culte, il n’y avait que, dans la vérité des choses, les catholiques, les autres dans l’ombre la plus totale ou sans organisation véritable.
1.2 Qu’est-ce qu’un Etat laïc ?
121 le mot « laïc ».
Il a aussi bien une origine grecque que latine, toutefois dans les deux cas, c’est par opposition au clerc. Donc est laïc ce qui n’est pas consacré ou religieux mais qui est du domaine ordinaire ou classique ou commun ; ce qui est réservé au groupe c’est-à-dire au peuple. On l’étend à ce qui est du monde, temporel, profane.
122 L’Etat laïc
En réalité la définition vu le terme laïc revêt plusieurs contenus, la définition assez précise d’un Etat laïc n’est pas assez facile mais on peut retenir que de façon plus simple c’est l’organisation un Etat qui ne veut pas se trouver sous la domination de tout ce qui est religieux. Ayant trop souffert du catholicisme avec ses relations ambiguës avec les rois tyrans en France, les révolutionnaires, en écrivant les dispositions du 09 décembre 1905 relatives à la séparation des églises ou des Cultes et de l’Etat souverain, voulaient ce qui suit :
– Traiter tous les cultes sur une même base d’égalité (pas de privilège d’un culte sur un autre, et nous savons biens ceux qui étaient visés, les catholiques) – Ne pas s’ingérer dans les affaires qui concernent les affaires propres des cultes (financement, constructions de lieux de culte, traitement salarial des ministres…). Dans le même temps – Pas d’interférence des Cultes dans les affaires qui concernent la République – L’Etat ne subventionne pas les Cultes – L’Etat assure la liberté de conscience. – Il garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées dans l’intérêt de l’ordre public . – Il ne professe aucune croyance religieuse.
1.3 L’ETAT ET LES CULTES, DEUX MÉTHODES DIFFÉRENTES : MÊME BUT LE BIEN DE L’HOMME
Dans le fond, tout cela n’est pas toujours clair. Ce qui vient d’être énuméré est exclusivement relatif à la République française. J’avoue mon ignorance en ce qui concerne les dispositions ivoiriennes. Mais, vu que la CI est fille sortie des entrailles de la France, je doute qu’à quelques exceptions près, ce ne soit les mêmes choses. Or en France, tous les lieux de culte construits avant les dispositions de 1905 sont une propriété de l’Etat. A vrai dire, ce sont les biens de l’Eglise confisqués par l’Etat. Et, parce que ces lieux de cultes sont propriété de l’Etat alors, il en est le responsable et l’Eglise en quelque sorte en est le locataire.
C’est un peut-être en cela qu’il y a la difficulté. Souvent, les rapports entre l’Etat et les Cultes sont présentés comme si l’un est ennemi de l’autre dans une marche parallèle. Si tant est que l’Etat est en conflit avec les Cultes, comment comprendre que l’Etat laïc accorde dans le cas de l’Eglise catholique par exemple, la possibilité de construire des écoles, des universités, des hôpitaux… Les membres de l’Eglise ou des Cultes, en tant que citoyens d’un pays sont sous la responsabilité sécuritaire de l’Etat qui, pour des raisons précises concernant le bien des enfants de la République, peut intervenir ou même interdire certaines manifestations des Cultes qui ne favoriseraient point l’unité et la fraternité.
NON Monsieur le catholique Adjoumani, l’Etat n’est pas ennemi des Cultes parce que les Cultes aussi ont leur part de responsabilité dans la gestion des biens de l’Etat qui sont les biens des peuples appartenant au même pays et à la même République. Au nom d’une certaine séparation de l’Etat et des Cultes, l’Etat ne peut pas croire être au-dessus de tout et de tous et « manger les enfants de la République ». C’est de la manipulation politicienne qui passe mal cher catholique et cher fils, Adjoumani. Lorsqu’il y a des abus, si les autres cultes ne peuvent rien dire, l’Eglise n’a pas le droit de se taire. Il ne faut surtout pas penser que les enfants de la République sont à la solde de l’Etat.
Le rôle de l’Etat, c’est d’organiser ce qui est juste et convenable pour le bien de tous et non le contraire. L’Etat n’a pas le droit de servir aux enfants de la République des sévices. Dans les pays où l’Eglise et l’Etat ne sont pas souvent en bonne intelligence, c’est que l’un se trouve dans une situation qui ne puisse faire taire l’autre. Bien souvent lorsque l’Eglise est réprimée, c’est parce qu’elle refuse que l’homme – tout homme – soit blâmé et rendu en esclavage parce qu’aucun Etat n’est constitué pour rendre des hommes en des bêtes et des brutes.
C’est le cas régulièrement des pays de l’Amérique latine. Malheureusement l’Eglise peut aussi se faire complice de l’Etat devant certaines situations d’abus et de détresses humaines. Mais ce sont des cas rares car l’Esprit Saint est à l’œuvre dans l’Église et dans le monde. Si les Philippines, la Pologne et bien d’autres pays se sont mis debout, c’est grâce à la parole de l’Eglise qui ne veut pas se faire complice de certains tyrans. « Il vaut obéir à Dieu qu’aux hommes. » NON Monsieur le catholique Adjoumani, un catholique ça fait sérieux, où avez-vous appris votre catéchisme ?
2 LES LAÏCS DANS LE MONDE ET DANS L’EGLISE
La petite approche définitionnelle sur laïc montre déjà son rôle. Le laïc dans l’Eglise catholique est fidèle du Christ baptisé dont l’importance se situe dans sa double mission de participation à la vie de l’Eglise et à celle du monde (pour les affaires de la cité – famille, village, pays : dans les affaires économiques, politiques, sociales, culturelles…) Sa mission c’est d’être le levain qui fait monter la pâte du monde, le sel de la terre et la lumière du monde. En vérité, il est le représentant de Jésus et de sa bonne nouvelle là où les membres du clergé (diacres, prêtres et évêques) à cause de leur charge spécifique, ne peuvent pas être.
Le laïc, fidèle chrétien, est pour cela très important pour apporter la bonne nouvelle du salut au monde. Son action est aussi bien vaste, délicate qu’importante et incontournable. Ce n’est pas seulement dans le domaine politique mais dans les secteurs de la vie là où la vie de l’homme est engagée : sport, cinéma, santé, mass média, sciences, culture, arts.
Le laïc n’est pas moins important qu’un clerc, se voyant comme un subalterne devant un prêtre. Non, ce n’est pas comme cela que marchent les choses. Le laïc et le clerc sont tous les deux des fidèles du Christ, la différence se trouve dans le service et la responsabilité. Le laïc est collaborateur du prêtre ; son avis et son action compte pour l’organisation et le bon fonctionnement de la communauté paroissiale ou ecclésiale. Il n’est pas là juste pour faire la quête, offrir les dîmes et faire à manger en somme pour l’entretien du clergé.
Certes, c’est aussi cela mais pas que cela seulement et toujours. En tant qu’expert en économie et finances, spécialiste en agriculture et dans le bâtiment, en médecine, en politique…il est aussi important que la vendeuse de piment au marché ou la ménagère ou la servante de la maison même si chacun joue son rôle et tous, sont des chances pour l’Eglise. C’est pour cela qu’il ne faut pas vous taire. Se taire, n’est-ce pas se faire complice de toutes les dérives et tous les abus. Mais pour ne pas se taire, il faut se former, bien se former, avoir des compétences à faire valoir pour le bien de tous.
Le cadre catholique dans le parti politique de son choix ou dans tout’ autre association apolitique doit pouvoir influencer positivement le milieu auquel il appartient. On a souvent des difficultés en CI pour ne prendre que cet exemple, parce que les cadres catholiques ont du mal à se faire confiance lorsqu’il s’agit d’allier leurs expertises et/ou compétences et leur foi. Pourtant, ils ont influencé certains choix dans certains pays où ce sont opposés à des décisions dans leur pays, ce qui sauva les leurs.
Il ne s’agit pas d’avoir peur de dire une chose contraire à un évêque ou à un prêtre en faisant d’eux (les membres du clergé) des démiurges (demi-dieux). Cependant, il faut les respecter pour ceux qu’ils sont et pour celui qu’ils représentent. On peut trouver les mots justes pour parler à un prêtre comme lui aussi, a le devoir du respect à un laïc et reste tenu (lui le prêtre) de rappeler ce laïc à l’ordre (avec élégance) même si c’est lui qui a construit l’église et le presbytère ou qui assure l’entretien financier des prêtres. La collaboration doit se faire dans le respect des uns et des autres et non des uns par les autres, uniquement.
CONCLUSION
A l’approche des élections en CI et, suite aux nombreuses et différentes déclarations des uns et des autres pour ou contre ces jours-ci, il est nécessaire de savoir quelle est notre mission. La politique n’est pas tout de la vie et elle n’est pas au-dessus de tout. Bien sûr il s’agit de la gestion des biens de tous et de la gouvernance des hommes. C’est énorme et c’est délicat parce qu’un homme vaut un homme et l’exercice du pouvoir politique est noble mais combien exigent.
On ne gère pas des hommes comme une banque de données numériques par des calculs. L’exercice de tout pouvoir ne donne aucun droit à son exécutant de se croire désormais l’égal de Dieu. D’ailleurs, Dieu qui nous aime, nous respecte ; il ne se comporte pas envers nous ayant des bêtes de somme à sa disposition afin de nous ce qu’Il veut. Un tel Dieu sadique, ce n’est pas sûr qu’Il soit celui qui nous sauve. Formez des associations pour de vraies raisons non pour accompagner des leaders par des applaudimètres pour des ventres à remplir. La vie est belle, elle vaut mieux que ces balivernes.
La vie chrétienne est une mission divine. Que nos « fiat », c’est-à-dire nos « oui » nous conduisent toujours plus au large, de sorte que, sous la conduite du Maître de la moisson, nous puissions pêcher du bon poisson pour la vie du monde. Non ce n’est pas nécessaire une association des cadres catholiques du RHDP Ce ne l’est pas non plus pour le FPI, PIT…PDCI… Une seule suffit pour conjuguer vos efforts afin d’être des porte-flambeaux de la Bonne Nouvelle de Jésus. C’est à ce titre que le LAÏCAT est créé fin 2008. Je sais ce que je dis et je dis ce que je sais. Sur le LAICAT, je peux parler aussi.