Entre interdiction de spectacle et gestion de la crise sanitaire du Covid-19, l’étau se resserre autour des acteurs de la danse en plein confinement. Une situation qui met en lumière les limites d’un secteur toujours en avant plan des grands événements et pourtant en arrière-plan des faveurs du moment. De quoi inspirer le Chorégraphe international Georges Momboye qui vient de mettre sur pied, l’OICDC, une organisation des professionnels de la danse.
Les acteurs de la danse et de la chorégraphie subissent de plein fouet la crise du Covid-19, Georges Momboye dit tout
Directeur du Ballet National et du cirque de Côte d’Ivoire, vous venez de mettre en place une organisation en ces temps de crise sanitaire. De quoi s’agit-il réellement ?
Aujourd’hui, le constat est clair. Les danseurs et chorégraphes sont toujours en premier plan lors des grands événements. Il ya aussi cette nouvelle génération de couper décaler qui utilise beaucoup la danse pour vendre ses œuvres. Autres choses, vous faites un tour au Burida, vous verrez qu’il y a à peine 4 à 5 chorégraphes inscrits ; il n’existe pas d’outils véritables pour récolter les droits des danseurs proprement dits ; du coup, les chorégraphes qui devaient bénéficier du même droit que les musiciens se retrouvent lésés. Et cette crise nous a montré les faiblesses du secteur de la danse. Même les 500 millions de francs cfa déboursés par l’Etat récemment pour soutenir la culture et les arts, les danseurs n’en ont pas bénéficié. Ajouté à la mauvaise organisation de notre secteur, il y’a donc urgence. Voilà entre autres, les raisons qui ont motivé la création de l’OICDC (l’Organisation Ivoirienne des Chorégraphes Danseurs et Circassiens).
Quelle sera la mission réelle de l’OICDC ?
L’OICDC veut désormais se positionner comme un interlocuteur valable, fiable et crédible, respectueux des valeurs et des normes qui régissent le monde des arts vi-à-vis de la tutelle, des institutions, des organisateurs de spectacle pour tous les acteurs du secteur de la danse. Cela pour les organiser et les mettre en confiance pour pouvoir recueillir facilement leurs droits.
En quoi est-ce que percevoir ses droits pour un danseur relèverait-il d’une organisation comme la vôtre ? Se déclarer au Burida n’est-il pas une démarche personnelle du créateur lui-même ?
Tout à fait ! Vous dites vrai. Mais après observation, on pourrait convenir qu’il manque quelque chose à notre maison commune. Sur le terrain, le Burida a cette faciliter de collecter les droits dans tout espace qui fait usage d’œuvre discographique. Mais qu’en est t-il pour le chorégraphe, le danseur? Nonobstant les droits voisins, il manque au Burida un outil de vérification à ce niveau pour que cela soit répertorié et recueilli pour permettre aux acteurs clés d’en bénéficier. En Europe vous avez la SACD, qui est d’ailleurs la plus ancienne des sociétés de gestion collective des droits d’auteurs. Nous voulons donc faciliter la tâche au Burida en se positionnant comme son interlocuteur en matière de danse et de chorégraphie en Côte d’Ivoire.
Quels sont les objectifs principaux de votre Organisation (OICDC) ?
Défendre les droits des auteurs chorégraphes, danseurs interprètes et circassiens ; Réorganiser le secteur de la danse et des arts du cirque ici et en Europe et Promouvoir la danse et les arts du cirque sur l’étendue du territoire. Voilà en substance.
Quelles sont les conditions d’adhésion à votre organisation ? Qui peut en être membre?
Peut être membre, un Chorégraphe professionnel, qui a déjà fait ses preuves sur scène, qui est auteur d’œuvres existantes. Sont membres tous danseurs ou circassiens appartenant à une compagnie légale. A coté de cela, nous ouvrons notre organisation à tout danseur libre, n’appartenant à aucune compagnie, qui pratique la danse de qualité et qui tire sa principale source de revenue de cette activité.
Quel avantage y a-t-il à adhérer à l’OICDC en ces temps de crise sanitaire ?
Attention ! Nous ne nous résumons pas à cette période de crise. C’est clair, nous allons en sortir. Mais au-delà, le premier avantage c’est la professionnalisation de tous nos membres. Il faut qu’ils soient respectés de par leur art à travers l’OICDC. A côté, il y a l’organisation du secteur, donc de la visibilité désormais pour eux. Il est évident que détenir une carte de membre donnera droit à un accompagnement au plan socio professionnel.
Avez-vous la caution de la tutelle dans cette quête d’apporter un nouvel élan au secteur de la danse en Côte d’Ivoire ?
Evidemment ! J’ai été récemment reçu en audience par notre Ministre, le Docteur Raymonde Goudou à qui je dis merci au passage. Et nous avons fait le tour de la question. Jai présenté nos objectifs en bon interlocuteur crédible de notre secteur vis-à-vis de l’Etat de Côte d’Ivoire. Madame la Ministre nous a encouragés dans ce sens.
Bientôt cette crise sera un souvenir lointain et en tant que Directeur du Ballet National, vous dirigez aussi l’OICDC. Que projetez-vous à la reprise pour ramener les ivoiriens aux salles de spectacle ?
Nous espérons sortir de cette situation qui n’a que trop duré et qui confine de plus en plus les ivoiriens. Nous projetons de proposer une semaine nationale de la danse plurielle sur toute l’étendue du territoire. Ceci en hommage aux ivoiriens après avoir traversé cette période de crise.
En la matière, vous êtes une référence pour les jeunes générations. Un message à leur endroit ?
Oui. Aujourd’hui nous venons de perdre notre Maman Rose Marie Guiraud dont je salue la mémoire. Elle a construit un centre et formé des talents à travers le monde. A bas la division. Il est temps pour nous de se rassembler. Je dis à tous ces jeunes et collègues de l’expression corporelle que l’OICDC est la leur. Notre organisation a besoin de tous. Il est temps de se regrouper autours d’un idéal pour émerger avec succès au sein d’une organisation commune. Du fond de mon cœur, je souhaite qu’on porte ensemble ce projet pour une visibilité et un avenir meilleur pour nous acteurs de la danse.
Quel appel souhaitez-vous lancer à nos autorités en ces temps de vache maigre ?
Je voudrais encore remercier le Président de la République, SE Alassane Ouattara, le gouvernement ivoirien et surtout notre Ministre pour tout le soutien à la culture. Mais surtout plaider pour un clin d’œil aux danseurs et chorégraphes et que nous sommes. Plus de spectacles, pas de danse et nous en souffrons dans l’ensemble. Un appui financier à quelque niveau que ce soit pourrait permettre de soulager à demi mot, les danseurs en attendant la reprise.