Il y’a des signes qui ne trompent pas. L’absence remarquée du président Alassane Ouattara à la fête du Travail le premier mai dernier a été aussi surprenante que le cadre qui a abrité la cérémonie. Le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly qui a tenté d’expliquer la situation n’a pas vraiment convaincu. Les Observateurs de la scène politique ivoirienne y voient la concrétisation de la succession de Ouattara avec le Premier ministre comme candidat de la majorité. Correspondance de Nelson Zimin.
Amadou Gon Coulibaly aurait-il remporté la bataille de la succession de Ouattara
Mon Cher Kabako,
J’ai été attristé par ce qui s’est passé hier au Bénin, pays d’origine de votre cousin Fabrice Sawegnon. Votre « président stylé » a troqué ses chaussures de ville pour des chaussures rangers. Il y’aurait eu trois morts et de nombreux blessés lors d’une confrontation entre les forces de l’ordre et les partisans de l’ancien président Boni Yayi. Tu vois, c’est vraiment dommage qu’en Afrique des élections soient toujours conflictogènes et sources d’angoisses pour les populations. Mais bon, ainsi ne devrait pas aller l’Afrique. Tiens, parlant d’élections je crois que votre Duc, le président Ouattara ne se représentera pas. Je t’explique.
Dis-moi un peu, de mémoire d’Ivoirien, quel président s’est déjà fait représenter à la célébration de la fête du Travail ? Elle échoit au président de la République. Jamais, sauf pour cas de force majeure, un président de la République ne s’est fait représenter à cette cérémonie. Cependant, lors de la célébration du premier mai dernier, les Ivoiriens ont été surpris par deux faits inhabituels.
La célébration de la journée des travailleurs a eu lieu à la primature, et sous l’égide du Premier ministre Amadou Gon Coulibaly. Ton oncle Kognouman m’a alors demandé si votre président avait un souci. Je lui ai dit que non, avant de le rassurer qu’ Amadou Gon Coulibaly avait remporté l’appel d’offre pour la succession d’ Alassane Ouattara. Ton oncle m’a encore demandé : « donc il est mort » ? Je lui ai dit que non ! Alors, anticipant les interrogations qui pourraient s’en suivre, le Premier ministre a répondu que « Comme aux éditions précédentes, organisées sur la présidence de la primature en 2012, en 2013 et 2014, le président de la République a voulu laisser le soin au gouvernement, de poursuivre la dynamique du dialogue en cours, avec les différentes couches socioprofessionnelles, les partis et les groupements politiques et la société civile ». Mais tu sais que ce sont des conneries !
Amadou Gon Coulibaly prêt à être le candidat de la majorité RHDP
Dans l’embarras depuis quelques mois, Alassane Ouattara avait laissé en compétition deux de ses fidèles lieutenants. Le ministre de la Défense Hamed Bakayoko et le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly se livraient une bataille sournoise de succession à leur mentor. Alors qu’ Hamed Bakayoko testait le terrain de la mobilisation populaire en mettant en service Zasso Patrick, l’un de ses « haut-parleurs » pour annoncer sa candidature possible pour le compte du RHDP, Amadou Gon Coulibaly lui a opté pour une communication sur fond de précampagne sur les réseaux sociaux. L’homme n’a pas hésité un seul instant à s’approprier les actions du gouvernement et à faire déjà son bilan. En politique tu sais qu’on ne donne pas, on prend !
Amadou Gon Coulibaly, fait le point, exhorte et promets. Il est de fait en précampagne. « En effet, la Côte d’Ivoire a réussi de grandes performances économiques ces dernières années. Mais nous devons continuer à travailler sans relâche pour améliorer la vie quotidienne de nos concitoyens », ou encore « Je veux améliorer les conditions de vie de tous nos concitoyens, où qu’ils vivent », sont des déclarations que l’on peut lire sur ses comptes sociaux. Amadou Gon Coulibaly décline différents pans de ses ambitions présidentielles, soutenues par des projets d’envergures dont la création du programme social du gouvernement, le recrutement massif d’enseignants, l’accessibilité à l’eau potable, l’accès et le maintien à l’école des enfants de 6 à 16 ans.
« Malgré les réformes et la forte croissance économique de ces dernières années, de nombreux foyers ivoiriens souffrent encore. Sachez que mon gouvernement travaille sans relâche pour accélérer l’impact de son action ». Cette stratégie a, semble-t-il, porté ses fruits, car le président Alassane Ouattara n’hésite plus à mettre en avant celui qui s’apprête à défendre l’étendard du RHDP en 2020, sans risquer la cohésion du parti. Mais rien n’est moins sûr, avec un homme à la santé fragile. En politique, mieux vaut être sur pied pour tenir ses engagements, sinon Alain Robbe-Grillet nous dira : « L’engagement, c’est un mur conçu expressément pour que l’on fonce dedans ».
A Bientôt