L’actuel ministre burkinabé de la Défense Cherif Sy, président du parlement de transition (CNT) au moment du coup d’Etat manqué de septembre 2015 au Burkina, a affirmé mercredi que l’ancien président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire Guillaume Soro lui aurait confié que c’est lui qui conversait avec Djibrill Bassolé sur la bande sonore, dans l’affaire dite des écoutes téléphoniques.
Selon Chérif Sy, Soro avait reconnu sa voix sur la bande sonore
Appelé en qualité de témoin à la barre du tribunal militaire qui juge 84 personnes pour leur implication présumée dans le putsch manqué de septembre 2015, l’ancien président du parlement de transition (CNT) Chérif Sy a livré sa version des faits, se prononçant au passage sur cette affaire qui avait défrayé la chronique et suscité une polémique dans les deux pays.
“Les gens se sont focalisés sur Guillaume Soro mais il y avait d’autres personnalités’’ impliquées dans de coup d’Etat manqué, qui avait fait 14 morts et 270 blessés, a déclaré d’entrée Cherif Sy, sans jamais dévoiler les noms de ces “autres personnalités’’.
“Si Soro me dit que c’est lui qui a dit. Je suis surpris que des gens viennent dire que ce sont de fausses écoutes’’, a-t-il poursuivi, en réponse à une question du parquet.
Seize minutes et 32 secondes. C’est la durée de cette conversation au cours de laquelle les deux personnes, présentées comme Guillaume Soro et Djibrill Bassolé, ancien ministre des affaires Etrangères du Burkina, évoquaient leur plan pour relancer le coup d’Etat raté du général Gilbert Diendéré contre le régime de transition.
“On frappe dans une ville, en haut quelque part là-bas. On récupère un commissariat, une gendarmerie… eux ils vont fuir, ils ne peuvent pas résister, et comme on me dit que l’armée est autour de Ouagadougou, l’armée va vouloir se réorganiser pour aller vers là-bas…’’, expliquerait Guillaume Soro, tandis que Djibrill Bassolé acquiescerait par de simple “hein, hein’’.
Proposition de financement, rémunération des militaires, stratégie à adopter au cas où ce plan réussisse, mais aussi menaces de morts envers deux personnages majeurs de la transition… “Il y a deux personnes chez vous là, que moi je ne laisserai jamais, Bassolé, dit alors son interlocuteur. En tous cas, quand on va finir tout ça là, ces deux personnes là, tu dois accepter que je règle. Il y a Salif Diallo et puis un Sy là… Ah non, non, non, ça je ne vais pas laisser, Bassolé, non, non, non…Ces gens peuvent pas vivre et vous allez être tranquille. Quelle que soit ta bonne volonté Bassolé, ceux-là que j’ai cités là, ils ne peuvent pas être vivants et le Burkina va être tranquille’’.
Interrogé ensuite par les avocats de la partie civile sur la même affaire, M. Sy a expliqué avec détails avoir “eu l’occasion de rencontrer (Soro) en octobre 2015 à Paris (après l’échec du coup d’Etat et l’éclatement de cette affaire) à une réunion des présidents de parlements des pays francophones’’.
“Il m’a dit que ce sont des incompréhensions et qu’au moment où il tenait ces propos, il ne me connaissait pas. Et qu’il voudrait qu’on en parle. Je lui ai dit que s’il voulait vraiment qu’on en parle, qu’il vienne au Burkina. Il m’a dit qu’on pouvait en parler à Paris après la réunion. Je lui ai répondu qu’après la réunion, je retourne dans mon pays’’, a-t-il relaté.
Mais avant leur rencontre à Paris, Cherif Sy a précisé avoir été “approché’’ dans un premier temps à Ouagadougou par un émissaire de Guillaume Soro : “Son ancien chargé de communication, un jeune frère que j’ai connu dans le métier de journalisme. Lui-même étant journaliste aussi. Il est venu me rencontrer après le coup d’Etat manqué. Je lui ai dit que ce n’était le moment de discuter de ces questions’’.
En Côte d’Ivoire, Guillaume Soro a toujours rejeté les accusations de son implication présumée dans cette tentative de coup d’Etat, qualifiant la bande sonore de « grossier » et de “Fake’’.