L’entrée en vigueur de la nouvelle taxe sur les transferts d’argent via mobile des opérateurs de téléphonie mobile, pose des problèmes. Annoncée pour le lundi 25 février 2019, l’application des nouveaux tarifs a suscité la colère des consommateurs présentement dans un flou qu’il faudra bien dissiper.
La taxe sur les transferts d’argent difficile à comprendre
En à peine 24h, les positions se sont radicalisées et des injonctions sont vite faites sur la question de la taxe sur les transferts d’argent. C’est d’abord la direction générale des impôts qui a donné de la voix. Ensuite, l’agence de régulation des télécommunications de Côte d’Ivoire (ARTCI) est sortie de sa réserve pour donner suite à l’annonce de l’application de nouveaux tarifs sur les services de transfert d’argent via mobile le 25 février 2019.
Dans un communiqué en date du 8 février 2019, la direction des impôts appelait à la vigilance les usagers en indiquant que « le Directeur général des Impôts tient à préciser que l’article 14 de l’annexe fiscale 2019, n’institue aucune taxe nouvelle sur les transferts d’argent à la charge des consommateurs ». Cette note qui donne une appréciation claire de la partie qui devrait supporter la nouvelle taxe est en accord avec l’énoncé de l’annexe fiscale 2018 relative à ce sujet. « La taxe est à la charge du donneur d’ordre et prélevée au taux de 0,5% du montant des transferts d’argent effectués, par l’opérateur national de téléphonie dont la plateforme est utilisée pour le transfert ou par le fournisseur local de réseau de transfert de fonds », peut-on lire dans l’annexe fiscale 2018, entrée en vigueur en janvier 2019.
Qui est le donneur d’ordre ? Selon sa définition, « le donneur d’ordre » est le maître d’ouvrage, donc une personne physique ou morale pour laquelle un projet est mis en œuvre et doit être réalisé. De ce point de vue, l’on pourrait considérer comme donneur d’ordre « l’entreprise de téléphonie mobile ». Il est généralement le commanditaire du projet. En attendant une explication plus claire de la part des autorités, l’effectivité de cette taxe sur les transferts d’argent est déjà une réalité dans les charges fixes des entreprises de téléphonie mobile qui verront certainement leurs marges réduites. Cela explicite la tentative des entreprises de téléphonie de faire supporter la taxe par le client, et la réaction vigoureuse de L’ARTCI.
Un arbitrage contraignant pour la problématique taxe sur les transferts d’argent
Alors que les nouveaux tarifs des transferts d’argent, majorés de la nouvelle taxe connaissaient un début d’application, la direction générale de l’organe de régulation des télécommunications en Côte d’Ivoire, fait un arbitrage qui en rajoute à la confusion. La direction de l’ARTCI, dans un communiqué en daté du 26 février 2019, enjoint aux entreprises de téléphonies mobile du pays de mettre fin à l’application des nouveaux tarifs. « Les nouveaux tarifs constatés ce jour sur les services de transferts d’argent via mobile n’ont pas fait l’objet de communication préalable à l’ARTCI. Par conséquent, l’ARTCI exige de tous les opérateurs de téléphonie mobile l’arrêt immédiat de leur application ». Le défaut de communication dont fait mention l’ARTCI ne clarifie pas davantage la question de l’interprétation des textes de l’annexe fiscale dont la compréhension bloque l’applicabilité de la taxe et garde encore les consommateurs dans un flou qui ne rassure pas.
Une taxe pour un secteur qui échappe à la compréhension des autorités fiscales ?
L’essor de l’e-Banking avec le développement du numérique en Côte d’Ivoire, a favorisé le développement de nouveaux marchés à fortes valeurs ajoutées. Dans un pays où le niveau de bancarisation reste encore faible, la solution mobile a été une alternative à la mobilisation de l’épargne des citoyens à revenus faibles. Cela représente des revenus conséquents pour les opérateurs de téléphonie mobile, qui en ont fait un produit de leurs portefeuilles.
L’exemple d’Orange Côte d’Ivoire est assez révélateur. En lançant le e-Orange Bank, l’entreprise entend accroitre ses revenus qui s’élevaient à 10 milliards de FCFA en 2O17. Ainsi l’État de Côte d’Ivoire cherche à maitriser cette nouvelle niche fiscale qui a pendant longtemps échappé au contrôle de ses services fiscaux, comme le révèle l’annexe fiscale de 2018. « L’imposition de ces transactions demeure encore en deçà du potentiel véritable, car l’administration fiscale éprouve des difficultés à appréhender le volume réel des transferts d’argent effectué notamment par mobile money ». Toute la problématique est là. Comment définir une taxe juste pour un marché dont on ignore l’ampleur, et la faire supporter par les entreprises de téléphonie mobile, puis exclure une incidence sur le pouvoir d’achat des consommateurs ?
En attend qu’une solution rapide soit trouvée à cette crise, l’attente des consommateurs reste entière : supporteront-ils ou pas la nouvelle taxe sur les services de transfert d’argent via mobile ?
NELSON ZIMIN