Le 21 janvier 2019, le gouvernement de Côte d’Ivoire recevait les acteurs de la vie politique à l’effet d’étudier les modalités de réforme de la CEI (Commission électorale indépendante), qui au regard des dispositions de la loi électorale est hors mandat depuis 3 années successives. La réforme de la CEI traduirait la volonté du gouvernement à désamorcer la crise de confiance qui existe entre l’institution et la classe politique, puis entre le gouvernement et les acteurs politiques. Cependant, dès l’entame des discussions, des voix de contestation s’élèvent pour fustiger une exclusion de certains des débats, par le gouvernement.
Réforme de la CEI, l’actuelle est hors délai et déséquilibrée
Nous sommes en 2010, le 12 février lorsque le président Laurent GBAGBO engage la réforme de la CEI avec 12 membres du bureau dont certains étaient déjà en fonction depuis 2005. Monsieur Youssouf BAKAYOKO en est le président jusqu’à ce que son mandat légal prenne fin en 2016, conformément aux dispositions de la loi électorale encadrant la durée des mandats, et le fonctionnement de la Commission électorale indépendante (CEI). : « Les membres de la commission centrale sont nommés par décret pris en conseil des ministres pour une durée de six ans.»
La composition de la commission centrale pose également problème à l’ensemble de l’opposition politique et aux institutions panafricaines. Passée à 17 membres, la clé de représentativité a été faussée par la proportion des représentants du président de la République. Cinq (5) représentants de plus avec voix délibératives. Pour résoudre cette imparité, en juillet 2017 à Grand-Bassam, la Plateforme des organisations de la société civile pour l’observation des élections en Côte d’Ivoire (Poeci) et la CEI ont formulé une recommandation lors d’un atelier.
Cette recommandation qui supprime le pouvoir délibératif des représentants du gouvernement n’a pas été divulguée, mais transmise au président de la République et au Premier ministre. Leurs représentants devraient désormais avoir un statut d’observateurs. Appliquée ou pas, cette mesure n’a pas suffi à mettre tout le monde d’accord autour de la CEI qui s’est vu interpeler par la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples (CADHP) en des termes très clairs. La composition de la CEI « viole le droit à l’égalité de tous devant la loi, ainsi que le droit d’avoir un organe électoral national indépendant et impartial, chargé de la gestion des élections, prévues par les articles 10 (3) et 17 (1) de la Charte africaine sur les élections ». Alors, ordonne à l’État de Côte d’Ivoire d’y remédier. Aucune suite ne sera donnée à cette injonction et la CEI organisera les élections municipales d’octobre 2018, émaillées de graves irrégularités et contestations violentes.
Compétences controversées
En plus de la polémique qu’elle crée autour de sa composition, la CEI n’a pas réellement convaincu les Ivoiriens de sa capacité à piloter un processus électoral sans incident. Elle a donné le sentiment qu’au fil de chacune de ses opérations, elle a été dans l’incapacité de parfaire son organisation par un retour sur expérience. La CEI, sous la présidence de monsieur Youssouf BAKAYOKO a organisé plusieurs scrutins notamment l’élection présidentielle de 2010, les élections législatives de 2011 et de 2016, les élections municipales et régionales de 2013, et de 2018, l’élection présidentielle de 2015, et le référendum de 2016, toujours avec une organisation qui pêche à la proclamation des résultats, source de nombreuses annulations de votes par décision de justice et la reprise des scrutins comme ce fut le cas à Grand-Bassam, Port-Bouët, Lakota ou la crise du Plateau, lors des élections municipales d’octobre 2018. Si aujourd’hui la réforme de l’institution est à l’ordre du jour, l’organisation des pourparlers du gouvernement avec l’ensemble de la classe politique démarre sous de mauvais hospices.
Des absents au banquet
Des acteurs de poids de l’opposition ont été exclus des consultations du 21 janvier dernier, par le servies du Premier ministre Amadou Gon COULIBALY. Alors que certains n’avaient tout simplement pas été invités, d’autres se sont vus refuser l’accès aux lieux de la réunion.
C’est le cas du Front populaire ivoirien (FPI) qui par la voix de Monsieur ASOA ADOU secrétaire général (Proche du président Gbagbo), a dit «rester à l’écart de cette mascarade qui se prépare ». Il faut rappeler que le FPI avait récolté 48% des suffrages avec Laurent GBAGBO en 2010. De son côté, Lider du professeur Mamadou KOULIBALY a, par la voix de sa présidente, marqué son étonnement face au refus des organisateurs à leur accorder accès aux lieux de la rencontre alors que régulièrement invités par courrier daté et signé des services du Premier ministre.
Cette situation est de nature à faire peser sur l’élection présidentielle de 2020 le spectre de 2010, quand des indiscrétions de l’entourage du président de la République évoquent de plus en plus la certitude d’un troisième mandat. Après la réforme de la CEI, il faudrait peut-être revoir la composition du Conseil Constitutionnel.
LIADE GUISSY
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