Longtemps incriminé dans l’affaire de la disparition de Guy-André Kieffer, Laurent Gbagbo a tenu à dire sa part de vérité dans cette affaire qui est loin d’avoir livré tous ses secrets. Dans sa dernière publication, « Libre. Pour la justice et la vérité », co-écrit avec le journaliste François Mattei, l’ancien président ivoirien donne quelques pistes qui pourraient permettre de faire éclater (enfin) la vérité sur la disparition du journaliste franco-canadien.
Affaire Kieffer, Laurent Gbagbo incrimine des barons du régime Ouattara
Le 16 avril 2004, cessait de paraître Guy-André Kieffer, alors qu’il avait rendez-vous avec feu Michel Légré, l’ancien beau-frère de l’ex-première dame Simone Gbagbo. Ce rapprochement entre la disparition du journaliste et la famille Gbagbo avait fini par convaincre l’opinion nationale et internationale de l’implication de l’ancien président Laurent Gbagbo dans cette affaire.
Aussi, dès l’accession du Président Alassane Ouattara au pouvoir, Ally Coulibaly, ministre de l’Intégration africaine et des Ivoiriens de l’Extérieur, déclarait dès le 13 avril 2011, alors qu’il recevait les proches du disparu : « Cette affaire a longtemps connu des obstructions dans la manifestation de la vérité. À un moment donné, les auteurs de l’enlèvement de Guy-André Kieffer ont bénéficié d’une protection. Cette situation est terminée, la justice passera. »
Mais jusque-là, le dossier n’a pas avancé d’un iota. Le nouveau juge d’instruction français, Cyril Paquaux, qui devait se rendre à Abidjan pour un complément d’enquête avait reçu des menaces par presse interposée.
Ainsi que le révèle Me Alexis Gublin, l’avocat de la famille Kieffer : « Le juge d’instruction français Paquaux enquête sur des faits qui peuvent être éventuellement reprochés ou imputés à des Ivoiriens. Ce qui a donné lieu en début d’année 2016 à un certain nombre de menaces en Côte d’Ivoire. Menaces sur lesquelles, en notre connaissance, les autorités ivoiriennes n’ont strictement rien fait. »
Qui a donc intérêt à ce que la vérité sur la disparition de Guy-André Kieffer n’éclate pas au grand jour ? A quel niveau d’instruction se situe le dossier Kieffer ? Les autorités ivoirienne collabore-t-elles véritablement dans l’avancée de l’enquête comme elle l’avaient promis dès leur accession au pouvoir ?
En attendant d’en savoir davantage, l’ancien président Laurent Gbagbo donne quelques pistes à explorer pour la manifestation de la vérité.
Loïc Folloroux cité dans le livre de Laurent Gbagbo sur l’affaire Guy-André Kieffer
« De forts soupçons de financement des rebelles ont pesé sur la filière cacao, provenant d’une partie des bénéfices détournée à leur profit par Armajaro (dirigée par Loïc Folloroux, beau-fil du Président), en liaison avec Alassane Ouattara et les siens. Le cacao, c’est l’or et le sang de la Côte d’Ivoire. Il sert depuis longtemps à alimenter les spéculations des sociétés étrangères – Houphouët s’y était confronté en son temps – caisses noires, exportations illicites et achats d’armes.
Le 16 avril 2004, alors qu’il enquêtait dans cette zone d’économie grise où l’argent circule à flot, le journaliste franco-canadien Guy-André Kieffer disparaît à jamais. Les accusations contre le clan Gbagbo, en l’occurrence contre un beau-frère de Simone Gbagbo, n’aboutiront à rien. Ancien ministre de Laurent Gbagbo, Ahoua Don Mello m’a affirmé que le journaliste avait révélé dans un article publié sous pseudonyme en 2002 l’imminence d’une attaque militaire contre la Côte d’Ivoire, financée par des industriels du cacao. Cette autre piste n’a jamais été explorée. Ce qui est très étonnant quand on sait l’implication des Ouattara, au travers de Loïc Folloroux, dans la filière cacao et ses méandres secrets au plus haut niveau mondial.
Adama Bictogo, un proche de Ouattara, était dans les années 2004 et 2005 très occupé à exporter d’énormes quantités de cacao détournées de Côte d’Ivoire. Il passait par le port de Lomé, au Togo, en se servant d’une base commerciale au Burkina Faso, au Luxembourg, et d’une banque française. On ne saura pas ce que Kieffer aura découvert, mais il est certain que ses investigations menaçaient des intérêts commerciaux précis et nombreux. »