Marius Konan est très indigné contre la mise sous tutelle de plusieurs communes ivoiriennes par le Ministère ivoirien de l’Intérieur et de la Sécurité. Le Député PDCI est donc monté au créneau pour interpeller le Président Alassane Ouattara sur les risques que font courir cette mesure.
Marius Konan dénonce un abus du pouvoir
La décision du ministre de l’Intérieur et de la Sécurité, Sidiki Diakité, de placer certaines communes ivoiriennes sous l’administration des délégations spéciales présidées par les Préfets ne passe pas du tout pour Marius Konan. Ce Député issue du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) dit ne pas comprendre en effet cette décision qui frise un abus de pouvoir.
Prenant le cas de la Commune du Plateau, l’Honorable Konan s’insurge contre la non installation du Maire Ehouo Jacques, qui a pourtant été élu lors du scrutin du 13 octobre dernier.
Cette élection a par ailleurs été confirmée par la Chambre administrative de la Cour suprême. Aussi, mettre cette commune au rang des autres, dont le Conseil municipal n’a pu être installé parce que dissout, suspendu ou le scrutin annulé, ne repose sur aucun fondement juridique. Raison pour laquelle il interpelle les autorités ivoiriennes pour éviter de pousser le peuple à bout par des décisions injustes.
Déclaration de l’Honorable Marius Konan
Comme bon nombre d’Ivoiriens qui ont pris le temps de suivre le journal télévisé de 20 heures du 1er janvier 2019, qui devait faire une rediffusion du message du chef de l’Etat, attendu pour être décrypté, nous avons été surpris par un communiqué signé du Ministre de l’Intérieur et de la Sécurité du 31 décembre 2018, à moins de 4 heures de la fin de cette journée.
Ce communiqué nous apprend que « conformément à la règlementation en vigueur » les conseils municipaux des communes de Booko, Grand Bassam, Plateau, Port-Bouet et Rubino n’ayant pas été installés au 31 décembre 2018, date d’expiration des mandats des anciens conseillers, il est mis en place des délégations spéciales présidées par les Préfets.
Dans la législation ivoirienne, la délégation spéciale relative aux collectivités territoriales est prévue par l’article 43 et suivant de la loi n°2012-1128 du 13 décembre 2012 portant organisation des collectivités libellé comme suit : « lorsqu’un conseil a été dissout ou suspendu ou que son élection n’a pas eu lieu ou a été annulée, une délégation spéciale est nommée par l’autorité de tutelle dans les quinze (15) jours qui suivent l’annulation, la dissolution, la suspension ou la constatation de l’impossibilité de l’élection ».
L’article 43 de la loi portant organisation des collectivités, décrit avec une nette précision, les conditions de mise en place d’une délégation spéciales. Faisons simple et apprécions donc le cas de la commune du Plateau au regard des conditions énoncées par la loi.
Les dispositions de cette loi disent que la délégation spéciale se fait après dissolution ou de suspension d’un conseil municipal. Alors question : le conseil municipal du Plateau a-t-il été dissout ou suspendu ?
La réponse est connue de tous les Ivoiriens, le conseil municipal du Plateau a été renouvelé le 13 octobre 2018. Plus de neuf mille (9.000) Ivoiriens inscrits dans cette commune ont porté leur choix sur la liste conduite par Ehouo Jacques Gabriel. Aucune décision connue des Ivoiriens n’a suspendu ou dissout ce conseil. D’ailleurs un recours exercé devant la cour suprême n’a pu prospérer et cette cour a confirmé par une décision rendue en fin de mois de novembre l’élection de la liste du PDCI-RDA. Le Plateau n’est donc pas concerné par ce cas de figure.
Les dispositions de l’article 43 de la loi sur les collectivités territoriales ne s’appliquent que lorsque les élections n’ont pas eu lieu ou ont été annulées. Question : l’élection du conseil municipal Plateau n’a-t-elle pas eu lieu ou a-t-elle été annulée ?
Ici encore les Ivoiriens et la communauté internationale savent que le conseil municipal de ladite commune a été élu le 13 octobre 2018 et cette élection n’a jamais été annulée. Pire, le préfet d’Abidjan avait donné un rendez-vous ferme pour l’installation du conseil municipal quand sa hiérarchie a suspendu sans raison valable cette formalité administrative. Le Plateau n’est donc pas concerné par ce cas.
Monsieur le Ministre de l’Intérieur, comme vous pouvez le constater, la commune du Plateau ne peut être légalement concernée par une décision de délégation spéciale au regard de la loi relative aux collectivités et les Ivoiriens voudraient bien connaitre le texte de loi qui sert de fondement à votre décision concernant le Plateau. A défaut, nous considérerons qu’il s’agit d’une décision arbitraire, illégale et injuste qui viole les libertés individuelles consacrées par la Constitution du 8 novembre 2016.
Par vos agissements vous frustrez des Ivoiriens parce qu’aujourd’hui vous avez le pouvoir, mais sachez que ce pays a une histoire et certains événements de notre passé récent sont encore trop frais dans notre esprit pour ne pas avoir de la compassion pour ceux qui abusent du pouvoir temporaire que leur confie le peuple. Aucun pouvoir n’est éternel, le peuple n’aime pas l’injustice et les abus de pouvoir.
Par ailleurs, je me permets d’informer le Ministre de l’Intérieur et de la Sécurité de ce que les agents des préfectures et sous-préfectures de Côte d’Ivoire étaient en grève jusqu’à la semaine dernière et cela depuis plusieurs mois. Ils demandent de meilleures conditions de travail.
Pour terminer, je nous invite à méditer cette pensée sur le droit du plus fort de Jean Jacques Rousseau qui démontre que la force n’a pas les attributs lui permettant de s’exercer durablement et est politiquement faible : « Le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le maître, s’il ne transforme sa force en droit et l’obéissance en devoir… Car sitôt que c’est la force qui fait le droit, l’effet change avec la cause ; toute force qui surmonte la première succède à son droit… Or qu’est-ce qu’un droit qui périt quand la force cesse… ».
A bon entendeur, salut.
Abidjan, le 02 janvier 2019
Honorable KONAN Marius
Député de la nation