De retour à Diawala, son village natal, Guillaume Soro a prononcé un discours de paix. Pour l’ancien chef de la rébellion ivoirienne, « il y a un moment pour faire la guerre », s’en remettant désormais à « la patience, au silence et à l’endurance » pour conduire sa destinée.
Guillaume Soro, nouvel apôtre de la paix
Passé le temps de la guerre et de la division entre Ivoiriens, Guillaume Soro entend désormais œuvrer au pardon, à la paix et à la réconciliation nationale. Ce triptyque est désormais devenu le leitmotiv du Président de l’Assemblée nationale ivoirienne.
A l’occasion de l’inauguration de la Mosquée de Diawala, la localité qui l’a vu naître, le chef du Parlement a indiqué à la population que le temps de la belligérance est totalement révolu, faisant place à un vivre ensemble harmonieux dans une nation ivoirienne réconciliée avec elle-même.
Le discours de Guillaume Soro à Diawala
Je dis toujours qu’il y a un moment pour se fâcher, un autre pour faire la guerre ; il y a un moment pour s’accorder le pardon, et il y a un moment pour faire la Réconciliation. Le moment où on se fâchait là, quand tu te fâchais, personne ne s’en plaignait; mais au moment où vient la réconciliation, il faut que tout le monde s’y mette et fasse la Réconciliation.
Mais il y a certaines personnes, qui c’est au moment où on veut faire la Réconciliation qu’ils veulent échauffer leurs muscles. Ce n’est plus le moment. Il faut que chacun prenne son bâton de pèlerin pour la réconciliation. C’est pourquoi je voudrais féliciter ici le préfet. Hier, ils ont eu à rencontrer le Président ; c’est le corps préfectoral qui connait mieux la situation sur le terrain ; c’est le corps préfectoral qui est dans le village, qui visite le campement, les hameaux.
Vous connaissez la Côte d’Ivoire mieux que nous, parce que c’est vous qui vivez avec les populations au quotidien, donc ce que vous nous dites, nous devons vous écouter. Hier (avant-hier, NDLR), le corps préfectoral a dit au président de la République qu’il faut faire la réconciliation. Ils ont même dit qu’il faut libérer les prisonniers politiques, qu’il faut faire le dégel pour que la Côte d’Ivoire aille dans le sens de la paix et de la réconciliation.
S’ils le disent, c’est parce qu’ils le vivent au quotidien. Donc, notre rôle à nous c’est de les écouter sinon pourquoi avoir des préfets et des sous-préfets ? Si ce n’est pour nous remonter les informations. Alors en ce vendredi saint où nous sommes ici dans l’espace de cette mosquée, je veux que tous ceux qui sont ici, nous faisons le vœu, le serment de servir la cause de la paix et de la réconciliation en Côte d’Ivoire.
Je demande aux imams, je vous demande avec insistance de prier pour la paix en Côte d’Ivoire. Priez pour que la Côte d’Ivoire soit un pays réconcilié. Et nous pouvons nous réconcilier et nous devons nous réconcilier. Vous avez vu, j’ai fait venir à l’assemblée, la présidente de l’assemblée nationale du Rwanda.
Au Rwanda, elle a dit qu’en 100 jours, il y a eu un million de morts. Chez eux là-bas, en 100 jours, il y a eu un million de morts. Mais ils se sont réconciliés, ils se sont pardonnés. Mais chez nous grâce à Dieu, grâce à vos prières, à vos bénédictions, il n’y a pas autant de morts comme au Rwanda. On n’épiloguera pas sur les chiffres de 3000 morts comme annoncé, mais si la guerre au Rwanda a fait un million de morts et qu’ils se sont pardonnés, mais nous aussi, nous pouvons nous pardonner.
Les imams, je vous demande la réconciliation, la paix, l’amour en Côte d’Ivoire et c’est ce combat que je suis en train de mener. Quelquefois, j’ai l’impression que je suis en train d’aboyer tout seul, parce que je le dis et les gens me regardent ébahis. Mais s’il y a bien une personne bien placée pour parler de la réconciliation, de la paix, de l’amour, c’est moi, parce que moi j’ai vu ce que c’est que la guerre. Moi, j’ai vu des gens mourir à côté de moi, je n’ai plus envie de ça, c’est pourquoi je parle de paix et de réconciliation.
Mais ceux qui sont là, qui disent ‘’ on ne veut pas réconciliation’’, ils n’ont jamais vu une balle siffler. C’est à la télévision, ils entendent dans les films westerns où on se tire dessus. Ils s’amusent avec la Réconciliation. Mais quand quelqu’un comme moi, tu es dans un avion et puis on tire et tu vois les gens mourir à coté de toi ; ou bien, tu es sur le front et tu vois les gens mourir, tu vois la vie quitter dans leurs yeux ; quand tu sors de là, tu parles de paix, tu parles de réconciliation.
Donc tous ceux qui m’accusent, il faut qu’ils sachent que je parle de paix, de réconciliation parce que je ne veux plus que la guerre existe encore en Côte d’Ivoire, c’est pourquoi je veux la paix ; c’est pour ça je veux la paix dans mon pays. Et quand je dis, il faut demander pardon ; les gens se disent » si Guillaume demande pardon, il demande pardon pour quoi ? Donc ça veut dire que c’est lui qui a tué les gens, c’est pourquoi il demande pardon’’.
Mais demander pardon existe dans la religion. On dit dans la religion de demander pardon pour ses fautes, pour ses péchés. Mais tous les jours-là, on prie, on demande pardon à Dieu, est-ce que c’est parce que tous les jours on fait des péchés contre Dieu. Mais on demande pardon à Dieu. On doit demander pardon parce que dans notre vie, dans notre quotidien, tous les jours, on peut avoir des manquements, on peut blesser quelqu’un sans savoir qu’on l’a blessé ; on peut faire du tort à quelqu’un sans savoir qu’on lui a fait du tort.
Il faut demander Pardon. Et puis le pardon, ça ne t’affaiblit pas, ça te grandit. Quand vous êtes chez vous à la maison, votre fils de deux ans te dit papa, je vais te frapper, et puis il commence à te donner des coups, vas-tu le frapper aussi ? Non tu lui pardonnes. Le pardon, c’est ça qui permet aux hommes et aux femmes de vivre dans la paix.
C’est vrai je suis en train de parler de réconciliation tous les jours, les gens ne m’entendent pas mais je suis convaincu qu’avec vos prières, vos bénédictions, les gens entendront, les gens comprendront la nécessité du pardon pour que nous puissions vivre en harmonie sur cette terre de nos ancêtres, appelée Côte d’Ivoire.