La justice française entend poursuivre deux militaires ivoiriens et un mercenaire biélorusse dans le cadre de l’affaire du bombardement de Bouaké. Mais le paradoxe, c’est que les autorités françaises tardent jusque-là à lever le secret sur cette affaire rocambolesque
Affaire bombardement de Bouaké, enfin le procès de vérité ?
Que s’est-il réellement passé dans le cantonnement de l’opération licorne au Lycée français de Bouaké, ce 6 novembre 2004 ? Près de 14 années après les faits, l’on continue de s’interroger sur cette affaire qui est loin d’avoir livré tous ses secrets. Huit soldats français et un humanitaire américain tués, ainsi que 33 personnes blessés et de nombreux dégâts matériels, tel était le bilan de cet assaut contre l’armée française lors de l’opération Dignité lancée par les forces pro-Gbagbo. Mais qui a ordonné le bombardement de Bouaké ?
Cette interrogation qui est loin d’avoir été élucidée pourrait enfin trouver une réponse lors du procès annoncé par les autorités judiciaires françaises. En effet, le parquet de Paris entend faire comparaître, Patrice Ouei et Ange Gnanduillet, deux lieutenants de l’armée ivoirienne, et le Biélorusse Yury Sushkin devant la Cour d’Assises, avec pour chefs d’accusation d’assassinats, tentatives d’assassinat et destruction des biens d’autrui aggravée par deux circonstances (en réunion et au préjudice d’une personne dépositaire de l’autorité publique). La juge d’instruction Sabine Kheris a d’ailleurs signé une ordonnance autorisant l’ouverture du procès dans les semaines à venir.
Notons que le bombardement de Bouaké était le pic de la crise ivoirienne. Après moult tractations, l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo avait décidé de lancer une opération militaire afin de détruire les sites stratégiques de la rébellion, et ce, contre l’avis de l’ex-président français Jacques Chirac. La suite, on la connait. L’armée française a détruit au sol, tous les aéronefs ivoiriens, au grand soulagement des rebelles.
Cependant, les soldats français ont laissé filer les pilotes des hélicoptères qui venaient à peine d’accomplir la basse besogne sur l’un de leurs cantonnements. Et depuis, c’est le black-out. Le dossier a été classé secret défense par les autorités françaises. Le vice-procureur du Tribunal de grande instance (TGI) de Paris a d’ailleurs regretté que l’Etat français n’ait pas favorisé l’éclatement de la vérité.
Avec l’ouverture annoncée de ce procès, le camp Gbagbo espère que comparaîtront également Dominique de Villepin, Michel Alliot-Marie et Michel Barnier, d’anciens officiels français qui ont été cités dans l’affaire, pour l’éclatement de la vérité.