L’émergence 2020 arrivera plus tôt que prévu. C’est du moins ce qu’a affirmé Michel Camdessus, ancien patron du FMI, en visite à Abidjan.
Emergence 2020, un coup de comm’ de Camdessus pour Ouattara ?
A son accession à la Magistrature suprême, le président Alassane Ouattara avait promis de faire de la Côte d’Ivoire un pays émergent à l’horizon 2020. Mais à moins de deux ans de cette échéance, les avis sont partagés. Alors que certains observateurs doutent fortement de l’atteinte de cette émergence en 2020, à l’instar de la Reggae star Tiken Jah Fakoly qui estime que c’est une « utopie », d’autres pensent plutôt que le président ivoirien est sur la bonne voie pour relever ce défi.
Au nombre de ces derniers se trouvent Michel Camdessus. Accueilli à l’aéroport FHB par le président Ouattara, ce 28 mai, l’ancien Directeur du Fonds monétaire international (FMI) était l’invité de la Confédération générale des entreprises de Côte d’Ivoire (CGECI), ce 29 mai. Accompagné du Vice-président ivoirien Daniel Kablan Duncan et du Premier ministre Amadou Gon Coulibaly, l’économiste émérite s’est prononcé sur le thème : « Champions nationaux et émergence ivoirienne ».
Saluant les performances de l’économie ivoirienne ces dernières années et exprimant sa fierté devant les nombreux projets en cours dans le pays, l’ancien gouverneur de la Banque de France s’est voulu formel : « La Côte d’Ivoire pourrait accéder à l’émergence un peu avant le temps prévu ». C’est-à-dire bien avant 2020, échéance fixée par le président ivoirien.
Le pays est certes en chantier avec les nombreux ponts, routes et autres infrastructures économiques réalisés sous la gouvernance de ADO. Le taux de croissance avoisinant les deux chiffres atteste également de cette performance économique.
Cependant, la grogne sociale se fait de plus en plus assourdissante, tant la paupérisation ne cesse de gagner du terrain. La richesse nationale est inégalement répartie, une petite minorité (proche du pouvoir) profite de cette croissance, alors que la majorité des Ivoiriens vit dans une misère inqualifiable. Le poids de la dette contractée par les nouvelles autorités ivoirienne risque d’hypothéquer l’avenir du pays sur une très longue période.
Par ailleurs, plusieurs personnalités proches de l’ancien président Laurent Gbagbo sont encore en prison ou en exil. La réconciliation nationale reste également un luxe en Côte d’Ivoire. Ainsi, le climat politique augure, à n’en point douter, d’un lendemain des plus inquiétants, la tension autour de la présidentielle de 2020 se faisant de plus en plus perceptible.
De quelle émergence anticipée parle donc Michel Camdessus eu égard à tous ces facteurs ? La population profite-t-elle véritablement de cette croissance dont se targuent les gouvernants ? Ou plutôt serait-ce un coup de main communicationnelle de l’ex-DG du FMI à son ancien adjoint chargé du département Afrique pour voiler les revers de la gouvernance du chef d’Etat ?
Quoi qu’il en soit, la déclaration de M. Camdessus continue d’alimenter les débats sur les rives de la lagune Ébrié. Notons l’économiste français séjournera en Côte d’Ivoire du 28 mai au 02 juin. Et cette présence suscite également beaucoup de commentaires. Certains vont jusqu’à le soupçonner d’être à Abidjan pour prendre sa part du gâteau.