Uhuru Kenyatta et Raila Odinga se sont rencontrés, ce vendredi 9 mars, pour faire la paix des braves. Et ce, dans l’intérêt supérieur de la nation kenyane. Cette hauteur d’esprit pourrait également inspirer le président Alassane Ouattara et l’ex-président Laurent Gbagbo pour la réconciliation nationale tant souhaitée par les Ivoiriens.
Bientôt une rencontre Ouattara – Gbagbo comme au Kenya ?
Qui aurait cru qu’Uhuru Kenyatta et Raila Odinga pourraient se retrouver de sitôt, s’appelant « mon frère » et parlant de réconciliation ? Et pourtant, c’est à cette scène surréaliste que les deux têtes fortes de la politique kenyane ont donné d’assister ce vendredi. L’opposant kenyan s’était en effet rendu au palais présidentiel pour parler de paix et de réconciliation avec le président Kenyatta.
« Mon frère et moi nous nous sommes réunis aujourd’hui, pour dire que ces dissensions s’arrêtent ici. Nous refusons de laisser notre diversité tuer notre pays. Nous refusons d’être les leaders par lesquels la nation kenyane échouera », a déclaré l’opposant.
De son côté, le chef de l’État s’est voulu rassembleur et surtout porté sur l’intérêt général. « Nous en sommes arrivés à un accord commun, un accord selon lequel ce pays est plus grand que n’importe quel individu. Et pour que ce pays se rassemble, ses dirigeants doivent se rassembler », a-t-il indiqué au terme de cette rencontre très salutaire qui va, à n’en point douter, offrir une nouvelle chance de réconciliation au peuple kenyan.
Et pourtant, ces deux hommes étaient de farouches adversaires. La crise postélectorale née de la contestation de la dernière présidentielle avait placé le pays presque au bord de la guerre civile. Mais avec cette rencontre entre les frères ennemis d’hier, il va de soi que leurs partisans leur emboitent également le pas.
La réconciliation nationale, une nécessité vitale pour les Ivoiriens
La situation est quasiment la même en Côte d’Ivoire, où le pays s’est clivé entre pro-Ouattara et pro-Gbagbo. Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo s’étaient alors livré une bataille sans merci lors de la crise postélectorale. Cette crise s’est soldée par la mort de 3000 personnes, selon le bilan officiel. Après l’arrestation de l’ex-président Gbagbo en avril 2011, plusieurs de ses partisans, dont son épouse Simone Gbagbo, ont été incarcérés.
La justice ivoirienne s’est par ailleurs déchainée contre les cadres de l’ancien régime au point d’en condamner plusieurs à de lourdes peines d’emprisonnement. Et pourtant, plusieurs observateurs ne cessent d’appeler à une justice transitionnelle en Côte d’Ivoire, à l’image de celle de l’Afrique du Sud.
Ainsi aujourd’hui, le « vivre ensemble » tant prôné par le camp présidentiel n’est qu’un simple slogan qui n’a véritablement aucune incidence sur le quotidien des populations. Il suffit de se connecter sur les réseaux sociaux pour se rendre compte de la fracture sociale en Côte d’Ivoire. Les Ivoiriens continuent de se regarder en chiens de faïence, et la tension entre les partisans d’Alassane Ouattara et ceux de Laurent Gbagbo est toujours perceptible.
Et si dans ce climat délétère, le président de la République, Son Excellence Monsieur Alassane Ouattara ouvrait le bal en accordant une grâce présidentielle à tous ces détenus proches de l’ancien président qui croupissent encore en prison ? Loin d’être une caution à l’impunité, cet acte fort du chef de l’État permettrait assurément de détendre l’atmosphère et donner une nouvelle chance à la Côte d’Ivoire.
De leur côté, les opposants pro-Gbagbo doivent également mettre de l’eau dans leur vin et s’engager dans un véritable dialogue républicain qui permettra de panser les coeurs meurtris des Ivoiriens. Comme Laurent Gbagbo aimait à le dire : « Asséyons-nous et discutons ! ». Car, tant que chaque camp reste cloîtré dans sa position, c’est la Côte d’Ivoire qui en pâtira.
À l’image des leaders politiques kenyans, Alassane Ouattara et Laurent Gbagbo pourraient également donner la chance à leur pays de devenir une nation vraie afin que les Ivoiriens du Nord, du Sud, de l’Est, de l’Ouest et du Centre se retrouvent pour s’unir dans une Côte d’Ivoire une et indivisible, « la patrie de la vraie fraternité », tel que chantée dans l’Hymne national.
Les Ivoiriens rêvent donc de voir Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé sortir de la CPI, et avec le président Alassane Ouattara, se donner des accolades, appelant leurs partisans à en faire de même. Cette nouvelle Côte d’Ivoire dépend donc de la classe politique qui doit montrer l’exemple au reste du peuple, à l’image des dirigeants kenyans.
Mais la question qui taraude les esprits sur les rives de la lagune Ébrié est la suivante : Les acteurs politiques ivoiriens pourront-ils mettre de côté leur égo pour penser à l’intérêt supérieur de la Côte d’Ivoire ? Bien malin qui pourra y répondre.