La Côte d’Ivoire est toujours en tête de la course à l’endettement en Afrique de l’ Ouest. Malgré la présence d’un émérite économiste à sa tête, le pays d’ Houphouët-Boigny est devenu un des pays les plus redevables de la zone ouest-africaine… interrogations.
Côte d’Ivoire : Que fait-on du bon côté de la Refondation ?
Sous la Refondation, c’était la politique de l’autodétermination. Les succès du budget sécurisé avaient permis à la Côte d’Ivoire de casser les clichés qui circulaient sur son compte depuis des décennies, à savoir qu’elle ne pourrait vivre sans l’aide extérieure. Un ami, célèbre journaliste d’une grande radio de Ouaga, me disait en 2001, convaincu de son propos, qu’ «Abidjan n’est rien sans l’extérieur» et qu’avec les robinets coupés aux Réfondateurs, il fallait s’attendre à une crise économique sans précédent dans le pays.
Sans trop savoir où nous menaient les Réformateurs, je lui répondais qu’il ne « fallait jamais vendre la peau de l’ourse avant de l’avoir tué ». En réalité, je n’appréciais que très modérément l’idée selon laquelle le champion du Cacao et médaillé de bronze du café ne puisse pas vivre sur ses fonds propres. Lorsque ce dernier a pris connaissance un an plus tard du bilan de l’exercice qui animait notre débat, c’est la queue entre les jambes qu’il reconnaissait l’ambition insoupçonnée des dirigeants de l’époque. Et moi le « Diaspo », je n’arrêtais pas de savourer ce que je venais d’entendre, parce que ce copain est un sacré client sur les sujets politiques.
Cela dit, il est clair que les temps étaient quand même durs dans le pays où les Réformateurs n’ont pas non plus fait de merveilles en deux ans de gouvernance. En même temps, ce n’était pas vraiment ce qui leur était demandé. Mais comme tous les grands pays au monde, ils avaient au moins tracé la voie de ce qui aurait dû devenir la base de la politique nationale : construire la Côte d’Ivoire avec l’argent de la Côte d’Ivoire.
Et ce n’est pas utopique de le dire, car pendant la crise qui a duré de 2002 à 2011, alors que les robinets goutaient à peine, Laurent Gbagbo a continué de faire fonctionner le pays sans recourir à des dettes toujours plus importantes les unes que les autres. La crise est terminée depuis 2011 avec l’arrivée du Président Ouattara au pouvoir. Les dirigeants actuels disent à qui veut l’entendre que la Côte d’Ivoire est aujourd’hui un pays qui inspire confiance. Les choses auraient donc dû aller bien mieux, ce qui pour l’instant n’est pas vraiment frappant.
La Côte d’Ivoire s’est encore endettée
Mis à part le fait qu’Abidjan est devenue une ville très sale (il est vrai que l’incivilité de ses habitants y est pour beaucoup) avec des routes impraticables dans les quartiers d’Abobo à Yopougon, « Koum-beach » et même à certains endroits de Cocody, savoir que le pays fonctionne grâce aux crédits fout un sacré coup au moral. Après les 1,4 milliard d’Euros de crédit octroyé pour la construction du métro d’Abidjan, en réalité un « train urbain » qui va étonnamment couter 918 milliards de FCFA, le gouvernement ne cesse de courir après les prêts. Dans sa publication d’hier 7 février 2018, le périodique en ligne Africaintelligence, nous indique qu’Emmanuel Macron a de nouveau soutenu financièrement son ami Alassane Ouatara.
Le jeune président français aurait validé l’octroi de « 20 millions d’euros d’aide budgétaire supplémentaire à la Côte d’Ivoire ». Ce montant s’ajoute à d’autres, déjà octroyés à la Côte d’Ivoire mi-2017 (précisés sur le site du périodique) pour payer une partie du solde des fonctionnaires. Et ce n’est pas terminé, la Côte d’Ivoire version Alassane Ouattara espère recevoir un total de fonds bien plus importants « d’appui » de « Paris pour 2018 ».
Depuis sa prison de La Haye, Laurent Gbagbo a récemment affiché son étonnement face à cette course sans retenue à l’endettement menée par le régime de son successeur. Selon lui, la Côte d’Ivoire « a largement les moyens » de subvenir à ses dépenses les plus élémentaires..
Et sa réaction est inattaquable dans la mesure où il a gouverné le pays et que ses adversaires s’accordent à dire qu’ils (les Réfondateurs) n’avaient pas les coudées franches auprès des institutions financières internationales dans lesquelles, disent-ils, ils n’avaient pas les contacts pour se faire aider.
Alors, plutôt que de l’emprisonner et pourchasser ses anciens collaborateurs, ivoiriens avant tout, il faudra peut-être songer à solliciter les conseils de Laurent Gbagbo et de ces blacklistés pour une meilleure gestion de la chose publique en Côte d’Ivoire. Parce que les crédits, même s’ils ont permis de construire de belles infrastructures, et les ivoiriens sont reconnaissants au président Alassane Ouattara pour ces réalisations, ne sont bons à contracter que si ont les rembourse avant de quitter le pouvoir.